Une pratique démocratique à l'abri de toute forme de dérive    es 15 solutions pour atténuer l'écart du cours du dinar algérien entre le marché officiel et celui du marché parallèle    Higer célèbre 20 ans de présence en Algérie    Plus de 52 000 migrants morts depuis 2014    Manifestations massives dans plusieurs capitales du monde en solidarité avec la Palestine    Une personnalité avec un esprit constructif    Athlétisme/Championnat arabe (3e j): l'Algérie en tête du classement    Sur le littoral de Sidi Lakhdar, c'est déjà l'été !    Ces armes de guerre et drogues qui débarquent des ports français    Atout majeur pour la préservation du patrimoine de la région    De Gustav Landauer à Hassan Nasrallah ou l'universalité de l'esprit de la société    Récital andalou à Alger de l'orchestre de l'association "Ahl El andalous"    Prévention et lutte contre le cancer: mettre en place une stratégie nationale    L'intérêt national, avant tout    « Votre partenaire de confiance pour des études à l'étranger »    2e tour des éliminatoires du CHAN 2024    «Tout faire pour nous qualifier à la phase finale»    L'appel d'Antonio Guterres    Hommage au doyen Kaddour M'Hamsadji    Foot /Coupe d'Algérie (U19-garçons) : le CRB renverse le MCA et arrache le trophée    38e Congrès de l'UIPA: les participants appellent à des décisions audacieuses pour relever les défis auxquels la nation arabe est confrontée    Déclarations attentatoires aux symboles et aux constantes de la nation: le dénommé Belghit Mohamed Amine placé en détention provisoire    Hadj 1446H : départ du premier groupe de pèlerins samedi prochain    "Les massacres français du 8 mai 1945 : mémoire nationale et positions internationales", thème d'un colloque international mercredi et jeudi à l'Université de Guelma    Opep+: l'Algérie et sept autres pays annoncent une nouvelle augmentation de leur production pétrolière à partir de juin    Le Commandement des Forces navales organise des portes ouvertes sur le Service national des Garde-Côtes    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'alourdit à 52.495 martyrs    ADE : signature de cinq conventions pour la modernisation des services d'eau    Le président de la République accorde un intérêt majeur à la presse nationale et aux métiers de l'information et de la communication    1ers Jeux scolaires Africains 2025 : réunion des chefs de mission les 19 et 20 mai à Alger (CASOL)    Batimatec: tenue de la 27e édition du 4 au 8 mai à Alger    Accidents de la route: 12 morts et 516 blessés en 48 heures    Recueillement à la mémoire des martyrs de l'attentat terroriste du 2 mai 1962 au port d'Alger    La responsabilité politique du ministre Bruno Retailleau    Le projet de loi présenté à l'APN    Les représentants de la société civile interpellent les hautes autorités du pays    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'émotion à géométrie variable
Monde
Publié dans La Nouvelle République le 12 - 03 - 2022

On s'émeut, depuis une semaine, du sort des civils ukrainiens alors qu'on ferme les yeux, depuis des décennies, sur le destin tragique de nombreux peuples opprimés à travers le monde. Comment, dans ces conditions, se prétendre universaliste et faire la leçon ? Il importe d'abord de condamner sans réserve l'invasion russe de l'Ukraine. L'intervention militaire de Poutine dans ce pays pour y décapiter un gouvernement démocratiquement élu n'appelle que colère et condamnation.
Reste que dans le fond, et à la lecture de l'histoire récente, difficile de ne pas donner raison au président russe, sur quelques points : d'abord il est légitime pour les Russes d'exiger une sécurité, « une profondeur stratégique», et donc d'avoir des pays voisins qui ne leur soient pas hostiles. Il est donc normal que l'élargissement de l'OTAN dans ces territoires frontaliers soient perçues comme une menace. Après la Roumanie et la Pologne, l'Ukraine était la ligne rouge. Et tout le monde le savait. On compte de plus 14 000 personnes massacrées dans le Donbass depuis 2014. Les Occidentaux ont fait preuve de lâcheté en fermant les yeux. Cela met au jour le deux-poids-deux-mesures de la France et de toute la communauté internationale qui s'émeuvent – et avec raison – de la mort de civils ukrainiens, mais qui font silence depuis de trop longues années sur le massacre et la torture qui sévissent ailleurs dans le monde. Cette émotion à géométrie variable nous renvoie fatalement à l'impunité sans égale dans le monde dont Israël bénéficie grâce au soutien inconditionnel des Etats-Unis depuis près de soixante ans ; à ses dizaines de transgressions de résolutions internationales ; aux poursuites engagées depuis mars 2021 par la Cour Pénale Internationale pour de présumés crimes de guerre commis dans les territoires palestiniens, territoires où sévit le crime d'apartheid selon l'ONG de défense des droits de l'homme Human Right Watch. Dans le pays des droits de l'homme, on dénonce les tentatives du « gouvernement turc de s'ingérer dans les histoires françaises et notamment religieuses » mais on se tait sur le cas d'Israël dont les cas d'ingérence manifeste se multiplient ces dernières années dans les affaires intérieures de notre pays sans la moindre protestation du gouvernement français. L'irruption systématique d'assauts inquisiteurs coordonnés entre le gouvernement israélien, son ambassade à Paris et l'organisation communautariste du CRIF est systématiquement suivie d'un silence approbateur. Pire, la moindre critique de la politique israélienne est la cible d'appels à la censure, de procès en sorcellerie, d'exhortations à abjurer, de demandes d'excuses publiques entre autres manœuvres d'intimidations – parfois violentes – visant à instiller « la crainte que quiconque ose critiquer Israël dans les circonstances présentes s'expose à l'accusation d'antisémitisme ».
Dans le pays des droits de l'homme, le président de la République tend une carte blanche aux oppresseurs par l'accueil en grande pompe qu'Emmanuel Macron réserve à Benjamin Netanyahu à Paris le 16 juillet 2017, lui adressant un affectueux «cher Bibi». Et à nouveau le 5 juin 2018 au lendemain du massacre de centaines de civils palestiniens commis durant des mois par l'armée israélienne ; puis par l'annonce d'une définition de l'antisémitisme élargie à l'antisionisme participant de fait à un amalgame coupable et entretenu de longue date par le communautariste CRIF. Un amalgame désormais inscrit dans la loi après l'adoption par l'Assemblée nationale d'une proposition de résolution LREM le 3 décembre 2019. Un amalgame instrumentalisé en mai 2021 où un palier de la partialité a été franchi après les assauts meurtriers israéliens de mai 2021 (219 morts dont 63 enfants, 1500 blessés en moins de deux semaines) sur lesquels le président français est resté d'un mutisme complice. Dans le pays des droits de l'homme, on déclare s'opposer à « l'entrisme du salafisme »et on fustige « l'islam politique » du président turc Recep Tayyip Erdoğan mais on entretient des relations d'intérêts privilégiées avec des tyrans sanguinaires du monde arabe dont l'instrumentalisation politique de l'islam est notoire Ils sont reçus dans les salons feutrés du Président Macron en personne. Celui qui, la veille, rendait hommage « au combat pour la liberté » celui dont le ministre de l'Intérieur considère l'islam politique comme « un ennemi mortel pour la République », déroule le tapis rouge au Maréchal égyptien Sissi et au Prince saoudien Mohammed Ben Salman, deux des pires despotes du monde arabe, placés à la tête de régimes carcéraux où sévissent corruption, emprisonnements, assassinats ciblés et tortures. Stupéfiant universalisme que voilà.
De même, nous n'avons souvenir d'aucune sanction occidentale contre les Etats-Unis quand ils ont, au souverain mépris du droit international, envahi l'Irak et exécuté son président un jour de fête. On n'oublie pas le cas de l'Egypte, où l'Occident s'est tu après le coup d'Etat militaire de Sissi malgré les massacres et la torture qu'a subi le gouvernement démocratiquement élu. De même, après la tentative avortée de coup d'Etat en Turquie où l'Occident s'est ému des purges ou encore en Arabie Saoudite à qui on vend des armes pour pilonner des hôpitaux au Yémen. Qui, dans tous ces cas connus de tous, a songé à la fermeture de leur espace aérien, à leur exclusion de la FIFA ou à leur bannissement de la plateforme SWIFT... ?
Si la position du président russe ne manque pas de fondement, il ne faudrait pas néanmoins que les pro-Poutine se perdent dans le soutien aveugle de sa montée aux extrêmes. S'il faut critiquer le cynisme et l'indignation sélective des Etats occidentaux, cela ne signifie pas de défendre Poutine à tout prix. A cause de l'élargissement de l'Otan aux frontières de la Russie, du non-respect des accords de Minsk II et de la militarisation souhaitée par l'Ukraine, la Russie craint pour sa sécurité et cela est compréhensible, mais cela ne peut se faire au détriment du droit international. Il faut sans condition dénoncer l'invasion militaire de l'Ukraine et tout faire pour protéger ses frontières. De la même façon, il faut garantir à la Russie les conditions de sécurité qu'elle exige. On ne peut dans ce sens que soutenir la proposition d'Eric Zemmour de composer « un grand traité européen de pacification qui dira que les frontières de l'Ukraine doivent être reconnues par la Russie, mais en échange l'OTAN doit s'engager à ce que l'Ukraine ne rentre jamais dans l'OTAN ».
L'Occident traverse un moment difficile mais elle n'est pas en position de faire la leçon, et surtout pas sur des questions de constance et d'universalisme des principes. De belles âmes comme Emmanuel Macron, Bernard Henri Lévy ou Raphaël Glucksman se disent solidaires du peuple ukrainien. Eh bien, qu'ils cessent leur hypocrisie, qu'ils cessent leur universalisme à deux vitesses et cessent de mépriser, par leur silence sélectif, la détresse de tous les opprimés, sans distinction d'intérêts.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.