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Beni-Saf: Un pôle de croissance extraordinaire ?
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 22 - 07 - 2018

«Quand le cœur n'y est pas, les mains ne sont pas habiles» proverbe
Il est clair que les ressources, surtout naturelles, font d'une communauté une source de vie exemplaire avec l'art des bras et de la cervelle; c'est toute une culture sociale mise en place suivie d'une éducation sociétale permettant de booster l'ouverture de la voie au progrès. Le mouvement raffiné et l'évolution sociétale font avancer la société vers un mode de production qui puisse satisfaire convenablement la société, c'est-à-dire vivre dans un certain bien-être, à commencer par les idées, et le ventre dans un cadre de plaisir et de joie.
Commençant par un phénomène bien près de chez nous. Depuis belle lurette, la fréquentation des plages naturelles, comme celle de Rachgoun mitoyenne avec celle de Madrid, devenues de plus en plus suivies surtout pendant les périodes estivales. Selon des révélations historiques contenues dans le livre «l'Album des Béni-Safiens», il fut décidé en 1959 d'ouvrir un chemin depuis «Chabat Ksaria», un sentier qui passerait au pied du château colonial et desservirait les deux plages sus-citées, c'est en ouvrant la plate-forme de ce chemin qu'a la limite d'une vigne de l'actuel village ou quartier ex-domaine El-Bradj (ferme serbe), une équipe d'ouvriers de la commune de Béni-Saf découvrit, en février 1953, le site préhistorique appelé, depuis, l'escargotière.
Pendant que se faisaient les travaux et leur avancement, il a été découvert sur le talus nord-est un gisement spécifique composé d'amas de pierres polies de cendre et de coquilles d'escargot d'une quantité conséquente.
Une douzaine de squelettes calcifiés furent mis au jour çà et là. Les trouvailles de ce phénomène ont été peut-être reprises par la presse française de l'époque.
Cet état de fait historique montre bien, d'après les archéologues de l'époque, qu'il s'agissait bel et bien d'une «escargotière». Paraît-il d'une station préhistorique de l'époque néolithique, c'est-à-dire relative à la dernière période de l'âge de la pierre. Il y avait un peuplement de «l'homo-médita-el-arbi» contemporain et «l'acheulien» qui se situe entre 10.000 et 8.000 ans avant notre ère. Cependant la mise en exploitation du port de la plage de Madrid pendant la période romaine et celle du port de Béni Saf, qui date de 1882, permettant le développement de la petite flotte de pêche avec la venue d'ailleurs de nouveaux pêcheurs (espagnols), l'escargotière faisait encore fonction de commerce de restauration ou gargote pour les marins. Les historiens sont appelés à se prononcer anthropologiquement sur ce fait, de façon plus scientifique.
La région est riche en ressources naturelles durables, des civilisations connues historiquement ont mis leurs empreintes dans cette région par voie de mode de production.
Par ailleurs, une autre ressource naturelle qui a fait les beaux jours d'un certain temps pour la population de la ville de Béni-Saf, il s'agit de l'exploitation des moules, un produit de la mer qui avait embelli la gastronomie de la ville par des mets qui faisaient gaver bien des êtres humains. Ailleurs, les huîtres faisaient référence à la fête de Noël et du jour de l'an. A Béni-Saf, les moules consommées par les Béni-Safiens représentaient toute une courte fête par leur goût et leur saveur.
Les moules sont des organismes aquatiques très résistants et sont solidement fixées par des faisceaux de filaments appelés scientifiquement «byssus» servant pour se fixer solidement à un support de rochers ou épaves situés sur les rivages de mer. Les moules sont protégées par deux coquilles, elles font partie de la famille des mollusques bivalves appelés communément «mytiloides». Les Béni-Safiens, et en particulier ceux du quartier de Sidi Boucif, les surnomment «Masionness», mot argotique venu d'Espagne.
Les moules se trouvent généralement dans des endroits naturels en mer ou dans des lieux d'exploitation ou aquaculture nommée «mytiliculture». La localité en mer où se trouvent les moules s'appelle le «banc de moules» ou, plus précisément, les «moulières». Les moulières, ou bancs sauvages de moules, sont situées à faible profondeur, parfois à fleur d'eau. Jadis, le littoral béni-safien, sur les rivages de la mer Méditerranée, était riche en moulières et faisait la joie et le plaisir pour tout un chacun de faire la cueillette en vue d'une éventuelle consommation d'un art culinaire. Actuellement, la pollution (les eaux usées, les vidanges d'huile des chalutiers et les autres saletés en plastique…) a détruit pratiquement tous les bancs de moules, et les moulières se font de plus en plus rares.
Les Béni-Safiens mangeaient ou plutôt dégustaient souvent les moules, gastronomiquement parlant, il existe de très nombreuses recettes issues de l'art culinaire propre aux Béni-Safiens. Avec des moules, le gastronome béni-safien faisait des mets; le plus simple, le plus ordinaire et le plus populaire est celui des moules au riz, genre «paella» ou bien encore des moules en friture avec une sauce tomate ailée. Ailleurs, en Belgique et surtout au nord de la France, les repas de moules sont très réputés sinon populaires, ils les dégustent aux frites, ils représentent un repas spécifique de la région.
Les moules peuvent être consommées crues parfois arrosées d'une vinaigrette ailée pour un meilleur goût, et une bonne saveur, paraît-il c'est bon pour la santé.
La difficulté qui fait partie du style de consommation est alors d'ouvrir la coquille comme tous les coquillages bivalves, la moule encore vivante est difficile à ouvrir mais suite à la cuisson, elle s'ouvre facilement.
Voilà un produit de mer qui donne du goût, de la saveur et surtout du plaisir quant l'art gastronomique que l'on ne peut retrouver que chez ceux qui font des efforts pour l'avoir et le savoir-faire de ces mollusques.
C'est pendant la période de printemps et surtout de l'été que beaucoup de gens dans leurs randonnées du plaisir longeant le superbe littoral béni-safien en profitant de la sorte à la cueillette des moules, ces randonneurs ne sont pas des pêcheurs mais des amateurs qui aiment bien ce double plaisir pour une finalité ou la jouissance de déguster les moules qui n'est pas donnée à tout le monde.
En dehors de ces deux saisons, jadis les moules étaient quand même disponibles par la grâce d'un exceptionnel pourvoyeur et ramasseur de moules dont il faisait son métier, qui faisait de lui une personne singulière de Béni-Saf devenue une icône qui fait partie de l'histoire restreinte propre de Béni-Saf, ce fameux personnage se nomme M. Benaouda Mohamed, son âge un peu trop avancé, très pauvre de nature, mais il savait s'imposer par ce fabuleux unique métier de ramassage de moules dans des endroits et dans des conditions inimaginables, à vrai dire, il était impassible en tant qu'Homme.
Son lieu préféré de ramassage des moules était un petit rocher de moins de 4 m2 nommé «Pedra marsionness» en plein milieu de la mer, à une centaine de mètres à la nage de la côte, ce rocher à fleur d'eau se situe entre la plage de Sidi Boucif et la jetée Est du port de Béni-Saf; «Pedra marsionness», mot espagnol qui signifie pierres des moules, ce rocher, bourré de moules à longueur d'année, représente un véritable gisement exploité uniquement par M. Benaouda. Vu le manque flagrant de petites barques à l'époque, la nage était son unique et principal moyen pour y accéder à la ressource.
Pendant l'été ou en période de printemps, la possibilité conditionnelle était permise pour le plaisir de nager et de cueillir par satisfaction les moules, c'est un charme que l'on pouvait avoir pour exister.
Seulement en plein hiver, le froid et une mer trop agitée, le métier de M. Benaouda, dans des conditions pareilles, ne permettait à quiconque d'y aller à la nage jusqu'au rocher et passer plus d'une heure en train de cueillir des moules dans des conditions inconcevables, le temps de remplir un sac d'une contenance de 30 kg à 40 kg. M. Benaouada le faisait quotidiennement et quelle que soit la nature du temps, il traversait à la nage la mer, sur le rocher, il fait sa cueillette, remplit son sac, puis retourne à la nage avec son sac, cette fois-ci rempli de moules. Le sac est accroché par une corde autour du cou, il est tiré par la force du crawl jusqu'au rivage. Il mettait ses habits en haillons sans se nettoyer et balance son sac plein de moules sur son dos où dégouline la flotte d'eau de mer sur son corps. Pour y accéder en ville, il escalade avec son sac pesant mis sur son dos, une gigantesque falaise de Sidi Boucif, trop abrupte dont l'accès n'est pas aussi facile. Ensuite, il trimbale son sac à travers toutes les rues de la ville de Béni-Saf pour vendre sa marchandise en criant très fort «Marsoness Gordo !» (grosses moules) pour attirer l'attention et l'envie des acheteurs. Il n'avait pas de balance pour peser sa marchandise vendue, il préférait à vue d'œil offrir un poids plus que celui qui est sollicité, une façon de vénérer un surplus (offrande) de moules à l'acheteur que de se voir être maudit en disant à l'acheteur que «Dieu nous pardonne». Sa convenance, son courage et sa sûreté de vivre durement avec «la sueur de son front», comme on dit bien chez nous, «pour gagner son pain quotidien» était une ancienne culture de vivre honnêtement de son activité. La ville de Béni-Saf lui avait permis de lui donner un statut sans pareil.
A toute peine est dû un salaire
Ce métier, comme tous les autres métiers, Benaouda l'avait exercé avec amour et nécessité, jusqu'à son dernier jour, sans répit, dans des conditions inimaginables, il faisait la cueillette et la distribution commerciale qui lui prenait la journée entière, il ne connaissait point de malaise, de faux-fuyant, de rhume, de grippe ou autres maladies et incommodités, son quotidien se manifestait avec le cri de «Marsoness Gordo !», les conditions de son travail étaient très très dures, pareilles à sa peau très dure (écailleuse), semble-t-il, on nous racontait de lui que l'aiguille de la seringue de l'infirmier ne pouvait pénétrer dans son corps, tellement sa peau était dure et coriace.
Cet être ou icône représente un patrimoine historique ineffaçable de la mémoire des Béni-Safiens, son courage et son affront face à la nature et à la vie font de lui un exemple inouï, un personnage qui vit durement et honnêtement de son labeur, de ses bras, de ses sentiments, de sa raison d'être, de l'amour de son métier exceptionnel, de l'art de bien faire et de satisfaire une demande toujours croissante, il trouvait le goût et la bonté, le maigre salaire lui procurait toute une satisfaction de sa raison d'être et de son plaisir d'être heureux à sa façon.
Le mérite lui revient pour que chaque Béni-Safien ait de lui une pensée éternelle et un modèle de vivre pour que chacun sache que le travail est une richesse et l'art un amour à cette richesse.
Les ressources naturelles que Béni-Saf possède pourraient fournir un pôle de croissance économique extraordinaire par un développement harmonieux, une chaîne de restauration avec une gastronomie purement béni-safienne, encourageant le tourisme et créant dans le site balnéaire tout ce qui a attrait au bien-être de ceux qui visitent la ville de Béni-Saf mais c'est ce qui reste à redéfinir de plus près par des sages qui ont une vision d'exploitation de la durabilité et de la rentabilité des ressources existantes, le poisson, les mollusques (moules), les escargots, les agrumes, la vigne… Tant de biens et de richesses dont les idées et les bras ne sont pas disponibles dans l'immédiat, ceux-ci manquent beaucoup, la pollution est en train de détruire une partie de ces ressources durables comme le poisson.
* Ecrivain
- L'Album de Béni-Saf a été édité en 1988 par l'Association des Béni-Safiens sous la direction de Lydie Gonzalez-Bozon, grâce aux archives réunies par la présidente de l'ABS. Les photographies et les témoignages recueillis sont regroupés par thème pour évoquer l'histoire et la vie jusqu'en 1954 des Béni-Safiens...


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