L'artiste Abdellah Behlil (40 ans) passe inaperçu. Sa timidité lui joue de mauvais tours. Il mène une vie pénible avec sa femme et ses deux filles, qu'il a volontairement bien voulu élever. Il guette les mammifères marins qui avaient échoué sur les rivages de la côte de la wilaya de Tipaza. C'est un sculpteur sur l'os de ces grands poissons. Le traitement du squelette du mammifère se fait suivant plusieurs étapes différentes, durant une année, avant de commencer à le transformer. L'artiste Behlil, après des années d'expérience et de sacrifices, a appris beaucoup de secrets. C'est un artiste autodictacte, avide d'apprendre davantage. Cet artiste sculpteur arrive à produire 50 colliers à aprtir d'une vertèbre de 20 centimètres du rétacé. Behlil, après avoir désossé le mammifère marin en prenant toutes les précautions nécessaires, récupère 35 vertèbres. Il est dépourvu de moyens matériels pour s'adonner à sa vocation, mais Behlil a réussi à fabriquer grâce à son génie des boucles d'oreilles, des bracelets, des gourmettes, des ceintures et des couronnes pour femmes à l'aide de l'os du poisson. Il a sa propre formule pour modeler toutes les formes des articles. Il possède un stock de six quintaux d'os de poisson, mais refuse de dévoiler le lieu de stockage de sa matière première : « Je ne dois pas mettre plus d'une heure pour désosser le mammifère marin, dit-il, à cause des fortes odeurs qui se dégagent de son gigantesque corps », ajoute-t-il. Une partie du stock de l'os du poisson date de 14 ans. C'est grâce à la célébration de la Semaine des arts et culture chenouis, qui s'est déroulée à Tipaza en 1995, que l'artiste Behlil a été révélé au public. Il participe à certaines manifestations culturelles organisées à travers le pays. Mais qu'attend cet artiste de la presse ? « Je veux m'épanouir, nous répond-il, mais je vous avoue qu'à travers votre tribune, je veux lancer un appel aux autorités concernées, pour que je puisse obtenir une perceuse et une tronçonneuse, de modèle petits que je fixerai sur une table, il s'agit à outils vitaux pour travailler et faire nourrir ma famille », conclut-il. Notre interlocuteur se dit très déterminé à vivre avec le fruit de ses efforts. Il reconnaît que ces petites machines ne coûtent pas cher. « Mais que voulez-vous que je fasse, je n'ai pas l'argent pour les acheter », déclare le sculpteur, avec un air timide, humble. C'est l'un de ces artistes de la wilaya de Tipaza qui luttent pour survivre. Drôle de destin pour une situation dramatique de l'artiste.