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L'Algérie est humour !
Publié dans El Watan le 12 - 02 - 2015

Si on procède à des fouilles dans les tréfonds du terroir algérien, on serait surpris de découvrir non pas seulement du gaz et du pétrole, mais également un véritable gisement de blagues et de déconnes. Et ce gisement-là, contrairement aux autres ressources, est intarissable ! On ne le sait que trop peu, en effet, mais l'une des spécificités du peuple algérien est bien sa capacité à rire de tout et à tout tourner en dérision. En témoigne le nombre incroyable de blagues produites par nous-mêmes et sur nous-mêmes, et ce, depuis l'indépendance jusqu'à aujourd'hui.
Cette spécificité algérienne, celle de l'humour, a fait l'objet, tout récemment à Oran, d'une conférence au Crasc (Centre de recherche et d'anthropologie sociale et culturelle) animée par Elizabeth Perego, une jeune Américaine qui a séjourné de nombreux mois en Algérie pour préparer précisément une thèse sur l'humour algérien, et cela pour le compte de l'Université de l'Ohio, aux Etats-Unis. Cette conférence a été organisée en collaboration avec le Centre d'études maghrébines en Algérie.
Pas de pénurie de blagues
Elizabeth Perego est donc revenue sur la chronologie de l'humour algérien, en prenant soin de s'attarder sur ses différents aspects. Il faut dire que l'humour à l'algérienne a brillé d'abord par les bandes dessinées durant les années 1970 (notamment celles de Slim), les films (Inspecteur Tahar, Hassan Terro and co), mais aussi et surtout par la quantité incroyable de blagues «informelles», celles qui voient le jour au hasard de discussions dans les cafés, avant de voyager à travers tout le pays.
En ces années-là, 1960 et 1970, les Algériens prenaient un malin plaisir à rire d'eux-mêmes, en créant des blagues à la pelle : qui sur la bureaucratie, sur le président Boumediène, ou encore sur les différentes pénuries que connaissait le pays. Une des blagues en vogue à cette époque : «Un jour, une chaîne impressionnante d'Algériens se formait au niveau de tous les ports d'Algérie. Tous voulaient quitter le pays.
Le président Boumediène est allé vers eux et leur a demandé où ils partaient comme ça. ‘‘Il n'y a rien ici, il y a pénurie de tout, on en a marre, on veut quitter le pays pour aller vivre ailleurs'', lui réplique une jeune femme. Boumediène réfléchit un moment et s'exclame : ‘‘Si mon peuple part, je pars avec lui !'' Et là, un autre Algérien lui réplique : ‘‘Ah, mais si vous partez, ça change tout, nous on reste !''» Autre blague de l'ère Boumediène, celle où on faisait dire à Caïd Ahmed, chef du FLN (le Saâdani de cette époque) : «L'Algérie est au bord du précipice… depuis, elle a fait un pas en avant !» «Il y avait que les blagues dites sexuelles qu'on n'osait pas dire en public», explique Elizabeth Perego.
Pourtant, ces blagues-là existaient bel et bien, seulement elles étaient racontées en comité restreint. Les blagues algériennes de cette époque commençaient presque toutes par : «Il était une fois un Français, un Anglais et un Algérien…» Comme s'il fallait à chaque fois faire le comparatif avec les habitants de pays plus prospères pour bien illustrer notre misère.
Mais cette époque n'était qu'un préambule : là où l'Algérie a connu son «boom» humoristique, c'était durant les années 1980, pendant le règne de Chadli. Si le bilan de cet ancien Président est très discutable, il faut admettre qu'il a été une source d'inspiration incroyable pour les Algériens, qui ont presque tous vêtu le costume d'humoriste de fortune. A titre illustratif, on peut se souvenir de cette émission télévisuelle de l'Unique, où un groupe d'enfants étaient appelés à raconter des blagues.
L'un d'eux en prenant la parole a déclaré : «Il était une fois Chadli…», ce après quoi, subitement, la chaîne de l'Unique se crypta. Bien simple, les blagues de Chadli étaient tellement nombreuses que certains ont même créé une blague… sur ces blagues-là, comme le raconte Mme Perego : «Fatigué que son peuple se moque de lui en permanence, un jour Chadli a fait une descente dans Alger-Centre et a procédé à une rafle de toutes les blagues qu'on avait faites sur lui.
Il a mis toutes ces blagues dans de gros sac, et les a jetées dans la Méditerranée. Au bout de quelques heures, tous les poissons de la côte algéroise étaient montés à la surface… morts de rire.» Pour la sociologue américaine, «les blagues sur Chadli représentaient l'âge d'or de l'humour algérien». A préciser néanmoins que cet humour, si talentueux soit-il, n'avait aucun support pour s'épanouir pleinement : à cette époque, la presse n'était pas libre, l'audiovisuel encore moins, et bien sûr il n'y avait pas encore Internet.
Ce n'est qu'après les événements d'Octobre 1988 et les ouvertures démocratiques qui s'en sont suivies que l'humour algérien a trouvé sa consécration, notamment par le biais de la presse. Le journal El Manchar, un peu le Charlie Hebdo algérien, en était le parfait exemple. A cela, il faut noter qu'Ali Dilem a été à cette époque le premier caricaturiste à avoir dessiné un président algérien, en l'occurrence Chadli Benjdid.
Humour noir
Cet «outrage irrévérencieux» avait été commis dans Alger Républicain, journal communiste, en 1989. Pendant les années 1990, celles de la terreur et de l'intégrisme, on avait également notre lot de blagues. Toutefois, précise Elizabeth Perego, celui qui demeurait le héros de la blague (ou plutôt l'antihéros) n'était jamais le terroriste, mais toujours un Algérien qui rencontrait des déboires à cause d'un terroriste. «On peut expliquer cela par le fait que les Algériens ne considéraient peut-être pas les terroristes comme étant des leurs, Algériens comme eux.» Parmi les blagues de la décennie noire, il existe celle-ci : «Un jour, un conducteur ivre est stoppé lors d'un faux barrage.
Le terroriste lui demande de baisser la vitre, quand il remarque qu'il empeste l'alcool, il se met à lui faire la morale, ce à quoi l'automobiliste saoul lui répond : ‘‘Ecoute, je suis assez fatigué comme ça, épargne-moi ta morale. Vas-y vite, égorge-moi et laisse-moi rentrer chez moi !» Cette blague, ainsi que bien d'autres dénotent combien le rire algérien est empreint d'humour noir. Parmi l'une des dernières blagues sur le terrorisme, on compte celle du lendemain des attentats du 11 septembre : George Bush convoque tous les présidents arabes pour leur demander qui a commis ces attentats.
Quand arriva le tour de Bouteflika, ce dernier lui a déclaré : «S'il s'agit d'égorgement et de boucherie, alors il se peut que ces terroriste soient des nôtres, maintenant s'il s'agit de piloter et de détourner un avion, là je peux vous garantir que ce ne sont pas nos terroristes, ils n'ont pas les facultés intellectuelles pour cela.» Une blague, faut-il le souligner, qui se racontait dès le 12 septembre.
La conférence d'Elizabeth Perego ne s'est pas trop attardée sur les années 1990, et n'a pratiquement pas parlé des années 2000 et 2010. Il faut dire que sa thèse sur l'humour algérien est encore en gestation, et de facto inachevée. Cela dit, force est de constater que ces dernières années on produit de moins en moins de blagues.
Une des rares blagues des années 2000 est relative à la voiture Maruti, qui a envahi le commerce automobile algérien : «Un jour, un homme conduit sa Maruti sur une route nationale, et tout d'un coup elle s'arrête. Il descend pour voir s'il y a une panne de moteur, ce dernier est nickel. Finalement, il découvre qu'il n'en est rien : sa Maruti a juste roulé sur un chewing-gum, depuis elle s'est retrouvée collée au sol et n'arrive plus à avancer.» Cette pénurie de blagues qu'a connue la dernière décennie ne signifie nullement que les Algériens n'ont plus le sens de l'humour.
Loin s'en faut ! Juste que l'avènement d'Internet, et surtout des réseaux sociaux, le bon vieux rire artisanal algérien a disparu peu à peu au profit d'un rire plus industriel. Aujourd'hui, l'humour est omniprésent dans les réseaux sociaux, mais cet humour est plutôt de l'école des Guignols de l'Info ou des émissions satiriques câblées. Un humour qui n'a certes rien à envier à celui des pays les plus avancés en matière de liberté d'expression, mais qui, dans le même temps, a beaucoup perdu de sa spécificité.
Cet humour virtuel est ficelé généralement à l'aide de photo-shop, avec en bas de petits commentaires «bêtes et méchants». Ou encore, on peut le trouver dans les caricatures (Le Hic, Dilem, etc.), les billets et les chroniques, comme celle de Chawki Amari (Point Zéro), ou encore, autre phénomène de ces dernières années : les journaux électroniques satiriques, à l'image d'El Batan ou de Bled Mickey.
L'année dernière, l'élection présidentielle a énormément nourri l'humour algérien, mais il c'était un humour sophistiqué. Quant à la bonne vieille blague mascaréenne, celle qui part d'un café pour faire en un tournemain le tour de l'Algérie, elle commence, hélas, à devenir un lointain souvenir. Pourtant, avec un Premier ministre comme Abdelmalek Sellal, lui-même assumant parfaitement son goût pour l'humour, notre époque aurait pu battre des records en matière de blagues…


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