IATF: les contrats signés permettront à l'Algérie de diversifier son économie    Agression contre le Qatar: la communauté internationale appelée à freiner l'escalade irresponsable de l'entité sioniste    Ligue 1 Mobilis: MB Rouissat ramène un précieux point de Mostaganem    El-Bayadh: inhumation du moudjahid Madani Tayeb    Une délégation chinoise en visite dans plusieurs services de la Protection civile à Alger    Convention de coopération entre les ministères de l'Education et de la Jeunesse: réunion de coordination pour finaliser l'arrêté interministériel    Le Parlement européen adopte une résolution sur la situation humanitaire à Ghaza    Ouverture lundi de la session parlementaire ordinaire 2025-2026    Import/Export: création de deux organismes spécialisés, l'ALGEX dissoute    Le ministère de l'Intérieur réalise une étude de terrain sur la promotion de la démocratie participative au niveau local    Hadj 2026: Braik préside l'ouverture des travaux de la commission de révision des cahiers des charges    Ouled Djellal : décès du Moudjahid Tayeb Boussaha    Des organisations et associations nationales condamnent les tentatives de désinformation sur la position de l'Algérie vis-à-vis de la cause palestinienne    IATF-2025: le rêve africain est né à Alger    Ouverture lundi prochain à Boumerdès de la 27e édition de la Semaine nationale du Saint Coran    IATF 2025: appel à renforcer les réseaux de distribution du livre africain    Les campagnes de désinformation ne freineront pas la volonté de l'Algérie de protéger sa jeunesse    Plate-forme des entreprises et des hommes d'affaires    « Fédérer les efforts pour préserver le gaz naturel comme source d'énergie propre et stratégique »    Vives condamnations à l'international    L'ONU condamne !    Les innovations et les technologies modernes suscitent un vif intérêt auprès des participants    Hamlaoui préside une rencontre interactive à Aïn Defla    Eliminatoires du Mondial-2026 : Guinée 0-Algérie 0 Et le football dans tout ça ?    Vague de chaleur, pluies et orages    « Une importante quantité de produits pyrotechniques saisie »    Si El Hachemi Assad souligne l'engagement et les efforts déployés    Deux médailles supplémentaires pour l'Algérie    L'Espagne se balade en Turquie    Que pèse l'Otan face à une alliance Russie-Chine-RPDC ?    Un trésor numismatique hors-norme découvert à Kaboul    Lancement du 2e prix «Mon Premier Livre» dédié aux jeunes    Lancement des travaux de restauration de Bordj Moussa    Un tournoi vendredi en mémoire d'Abderrahmane Mehdaoui au stade Chahid "Mouloud Zerrouki'' des Eucalyptus    Gymnastique : l'Algérienne Nemour engagée dans trois grandes compétitions en cette fin d'année    Inhumation des moudjahidine Youcefi Mohamed Bencheikh et Telli Hamza    Programme TV - match du mercredi 29 août 2025    Programme du mercredi 27 août 2025    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



André Mandouze, un homme en avance
« Ce matin encore j'étais à Alger... »
Publié dans El Watan le 22 - 12 - 2005

Que d'émotion ! Motions, communiqués, déclarations, l'Algérie officielle se rebiffe. Aux armes ! Les plumitifs. La nation subit un énième outrage, insultée par un colonisateur impudent qui continue à ne penser que du bien de lui. Les bienfaits de la colonisation. Parlez-m'en. Tempête dans un crâne à défaut de la transparence d'un verre d'eau.
En 1954, André Mandouze fait paraître le numéro 1 d'une revue : Consciences Maghrébines. Le bon professeur n'a pas l'habitude de mâcher ses mots, quand il parle en français pour dire leurs quatre vérités à ceux qui entendent le français : « Le colonialisme sévit en Afrique du Nord. Terreur au Maroc. Ratissage en Tunisie. Truquage « calme » et étouffement des libertés en Algérie : la machine coloniale grippe dans tous ses rouages. Au Maghreb comme au Kenya, à Madagascar comme à Porto Rico, en Indochine comme en Afrique du Sud. » En 1954, la machine coloniale est grippée, et ce n'est pas l'éminent latiniste qui jouera les apothicaires pour lui apporter remède. André Mandouze pose son diagnostic, il signe le bulletin du mauvais élève qui renie les idéaux libertaires et républicains de l'école qui l'a vu naître et grandir, et puis, tout de go, il monte à Paris pour proclamer son engagement aux côtés des Algériens colonisés. Le 27 janvier 1956, Mandouze fait trembler les murs de la salle Wagram en lançant son fameux : « Ce matin encore, j'étais à Alger, et je vous apporte le salut de la résistance algérienne. » Alger tremble. L'université française d'Alger attend de pied ferme le retour du professeur renégat. Dans l'université française d'Alger, il y a de grands arbres. On a préparé une bonne corde pour pendre, haut et court, celui qui devra son salut aux étudiants « musulmans ». Heureux temps d'une université où l'on se battait pour des idées et des profs qui avaient des idées. Que d'émotion ! André Mandouze quitte Alger en catastrophe et s'installe dans une métropole française et coloniale où il ne tarde pas à être jeté en prison. Cette prison a gardé en mémoire la Bastille détruite par la République. Le temps passe et les bons souvenirs aussi. Le bon professeur ne reniera jamais son engagement pro-algérien, et s'il devient le premier recteur de l'université d'Alger, il ne le restera pas longtemps, tandis que les arbres dans le jardin arrêtent leur croissance, tremblant de toutes leurs feuilles, craignant d'être abattus pour céder la place aux kiosques à commerce indépendants. Au moins, on n'aura plus la tentation d'y pendre quelqu'un ou quelqu'une qu'on préfère liquider sur papier et dans le secret des bureaux. Positivons. Un grand salut d'Alger, cher professeur. Cher professeur, la dernière fois que j'ai visité la galerie de portraits des recteurs honorés par l'université d'Alger, je ne vous ai pas trouvé. Votre bonne bouille de myope me manque. Il paraît que votre santé s'est affaiblie et votre myopie accentuée. A Alger, votre place est vide, vidée de cette période de notre histoire où la résistance nationale avait le bon goût du transnational. Nulle place pour votre cadre sur le mur du rectorat, tout comme pour les universitaires algériens interdits aujourd'hui d'encadrement, sauf escortés par un Français. J'ai étudié, enseigné, formé, j'ai défendu une thèse. Je croyais avoir fait ce qu'il fallait pour avoir droit à la reconnaissance légitime et académique. J'ai eu tort. L'école dite doctorale de français ne veut pas de moi toute seule pour diriger les travaux de mes étudiants. On veut bien encore de moi pour encadrer un étudiant algérien, mais attention, la présence à mes côtés d'un collègue français (à égalité de diplôme et de statut, dans le meilleur des cas) m'est imposée comme indispensable pour veiller sur un travail cadré selon les mesures françaises. Que d'émotion. Je bois un grand verre d'eau et je laisse la tempête se déchaîner dans mon crâne. Dans l'université d'aujourd'hui, me voilà de retour sur les lieux du crime. Je retourne au second collège d'autrefois, et j'y retrouve une formidable compagnie, studieuse, talentueuse. Entre indigènes, on parle avec passion de l'esprit de la loi française et des droits de l'homme universel. Plus fort. J'entends Djamal Amrani hurler sous la torture. Et Gloria Lasso et Gilbert Bécaud qui s'époumonent à travers les haut-parleurs de la villa Susini pour couvrir son supplice. Plus fort. Allez ! les témoins, dites-moi que la colonisation c'est pas bien. Dites-moi qu'il ne fallait pas quitter le collège. Fallait rester en classe. Musique. L'officier prend une corde mouillée et Lakhdar ne sent plus sa tête. Fallait pas partir... Fallait rester au collège... Les bourreaux fixent dans les liens une longue perche qui achève d'immobiliser l'étudiant qui est pris à bras-le-corps et jeté dans le bassin... Les coups pleuvent... Musique... Musique... Faut viser. Taper la plante des pieds. Faut les empêcher de marcher, ces bâtards. Que d'émotion. L'Algérie a marché. Sur la route française, y avait une foule énorme. Des étudiants qui étaient devenus des manœuvres, des paysans expropriés, des servantes trop longtemps humiliées comme celle de M. Ricard que Mourad a défendue en donnant un coup de tête mortel à son patron. En tôle, Mourad. Y avait que du beau monde en prison. Y avait même des Français comme Mandouze. Tous ont cru qu'ils avaient tout bien fait pour que nous soyons égaux en droits et en devoirs, à égalité de nation et de citoyenneté. Tout juste ! A contre-courant d'un colonialisme qui ne voulait pas que nous disposions de nous-mêmes. Cher professeur, je vous apporte le salut d'Alger où l'on a coupé le jarret opiniâtre de la foule résistante et fière. Ici, personne n'entend les voix qui s'offusquent d'un nouveau code de l'indigénat. Tout est calme et silencieux. J'en tremble. Parlez-moi encore des méfaits de la colonisation. Mon verre s'est vidé. J'espère au moins pouvoir disposer encore du sommeil du juste.

Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.