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L'islamisme radical est-il le seul ennemi de la démocratie ?
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Publié dans El Watan le 12 - 11 - 2011

Yacine Teguia. Membre du Mouvement démocratique et social
A la suite des élections tunisiennes et de la large victoire du parti de Ghannouchi, le débat sur la menace islamiste est revenu à l'ordre du jour. C'est avec pertinence, et en avouant une évolution considérable des positions qu'il affirmait jusque-là, que M. Bakir s'interroge, dans une contribution parue dans El Watan et le Quotidien d'Oran. Est-ce que «la plateforme politique d'Ennahda présage de la remise en cause du caractère républicain de l'Etat tunisien, de sa nature démocratique ? Prône-t-elle la mise sous tutelle du suffrage universel ? Menace-t-elle la séparation et l'équilibre des pouvoirs ? Remet-elle en cause la souveraineté populaire comme source de légitimité et prône-t-elle l'instauration de plusieurs collèges ? Introduit-elle des distinctions fondées sur le sexe, l'ethnie, les croyances, la capacité ou la richesse ? Se refuse-t-elle au respect des règles du jeu démocratique d'accession et d'alternance dans l'exercice des pouvoirs?» A toutes ces questions, nous pouvons répondre non, même si le programme du parti porte en entête : Au nom de Dieu, Le Clément, Le Miséricordieux.
Et nous pouvons même ajouter qu'Ennahda n'a pas annoncé aux Tunisiens qu'ils devront changer d'habitudes alimentaires et vestimentaires, même s'il se propose de protéger les femmes de la débauche. Pour autant, pouvons-nous considérer que l'issue des élections a été celle que méritait le peuple tunisien ? Oui, nous diront ceux qui estiment que ce parti a toujours refusé de pactiser avec Ben Ali, qu'il luttera contre la corruption avec conséquence et qu'il serait celui qui aurait le plus souffert de la répression. Oui, diront ceux qui pensent que c'est tout simplement le jeu démocratique, et qu'Ennahda a su parler au peuple. Non, diront ceux qui s'inquiètent de voir un membre d'Ennahda à la tête de l'éducation. Non, s'offusqueront ceux qui s'alarment lorsque Ghannouchi refuse de répondre quand on lui demande ce qu'il pense de la séparation du politique et du religieux. Trop tard, semble dire M. Bakir, «dans la mesure où Ennahda a été admis comme un partenaire politique dans le processus du changement. Qu'il n'a pas été dénoncé comme une menace sur ce processus». Il ajoute même, pour faire bonne mesure : «La vigilance ne devrait pas signifier de s'en remettre à la primauté des préjugés et des procès d'intention.» Mais n'est-ce pas lui qui fait un procès injuste à ceux qui ont peut-être commis une erreur d'appréciation ? N'a-t-il pas lui-même été membre d'un parti qui a accepté, dans le processus engagé après Octobre 1988, une organisation qui était une menace pour la transition démocratique en Algérie ? N'a-t-il pas ensuite demandé l'arrêt du processus électoral dans lequel avait participé cette organisation intégriste ? Et même son interdiction ? Pour ma part, j'estime que c'était légitime, mais je ne me permettrai pas de laisser planer le moindre doute sur l'attitude des démocrates et des forces de gauche tunisiennes.
Elles ont eu raison d'accepter la participation d'Ennahda dans la compétition, tout simplement parce qu'à partir du moment où un parti renonce formellement à l'instauration d'un Etat théocratique, on ne peut pas considérer que c'est encore un parti islamiste. Ce n'était pas le cas du parti dissous en Algérie. C'est pourquoi, s'il ne faut pas sous-estimer la menace, il ne faut pas, pour autant, la surestimer. Surtout, il ne faut pas se tromper sur sa nature. «Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde», disait Albert Camus. Enfin, le contexte international n'est pas le même que celui qui a présidé à l'arrêt du processus électoral en Algérie, et la société tunisienne de 2011 n'est pas la société algérienne 20 ans plus tôt. Et si l'archaïsme en matière de pensée et de pratique religieuse, qui existe dans certains segments de la société tunisienne, peut mener à l'Islam politique, il ne doit pas être confondu avec lui. Mécaniquement. M. Bakir estime que c'est le «Printemps arabe» qui a permis l'émergence d'un courant islamo-démocrate, et s'interroge sur sa capacité à résister aux pressions des Salafistes. Le titre de sa contribution est «Tunisie : victoire islamiste ou évolution
réformiste ?» Il nous explique qu'avec Ennahda, nous avons à faire à une forme de réformisme pas à l'islamisme radical. Il oublie juste de nous préciser que si ce réformisme est bien là pour contrarier le radicalisme, c'est autant le radicalisme islamiste que le radicalisme démocratique et laïc. Un peu comme Bouteflika qui, pour justifier sa politique d'amnistie, renvoie dos à dos deux extrémismes, dont l'un aurait agi au nom de l'Islam et l'autre au nom de la laïcité. En fait, M. Bakir se trompe, il n'est pas juste oublieux. Tout comme le nationalisme arabe, l'islamisme est en crise. Mais l'un et l'autre s'adaptent et… s'allient. En vérité, c'est la résistance démocratique à l'islamisme radical qui a permis qu'Ennahda «avance comme filiation du courant réformiste musulman du siècle passé». D'abord, parce que tant que la menace de l'aile politique intégriste et radicale était là, la pensée religieuse n'a jamais connu d'avancée. Il faut juste se rappeler que Ghannouchi était le conseiller d'un des chefs du parti des assassins. Il l'a abandonné pour des raisons tactiques, quand a été prise la décision d'occuper les places publiques d'Alger, dans le cadre de la grève insurrectionnelle de juin 1991. D'ailleurs, il reste à Ghannouchi quelques séquelles de cette époque. Quand il parle du français comme d'une «pollution», il n'est pas sans rappeler celui qu'il conseillait et qui dénonçait les «éperviers du colonialisme».
Par ailleurs, M. Bakir néglige le fait que le courant réformiste musulman a été toléré par le colonialisme du siècle passé, lui aussi, afin de contrarier le courant radical, incarné par les tenants de l'indépendance. Nos oulémas, que l'on peut classer dans ce courant réformiste, étaient des assimilationnistes, la troisième voie, entre le statu quo et le changement radical. En Algérie, le FLN, et en Egypte Nasser, réaliseront les tâches que ce courant était, au final, chargé de contrarier. Il ne faut donc pas s'étonner qu'aujourd'hui encore des pressions soient exercées par les Etats occidentaux et du Golfe pour que l'Algérie reconnaisse le CNT libyen qui vient d'annoncer qu'il allait instaurer la charia et donc que notre pays s'accommode aussi des résultats électoraux en Tunisie. Au moment où se pose la question du dépassement du compromis entre rentiers, libéraux et islamistes en Algérie, ne serait-ce pas un «encouragement» au pouvoir pour ne pas aller trop vite ? A ne pas céder à la pression de la rue ? Quitte à faire comme Mohammed VI, quelques réformes qui seront appréciées. D'une certaine manière, ce ne serait pas la Tunisie qui serait le cas unique dans la région, mais bel et bien encore l'Algérie. «Les étrangers qu'on préfère, ce sont les étrangers de couleur, parce qu'on les repère de loin», chantait Charlélie Couture. En fait, pour M. Bakir, il semble qu'en politique les seuls à représenter une menace sont ceux qui veulent vous égorger. Si vous n'avez pas un couteau entre les dents, eh bien ça y est, vous n'êtes plus un danger. Même si votre politique pousse les gens à s'immoler par le feu ou à risquer leur vie en traversant la mer sur des barques de fortune. De ce point de vue, Ennahda représenterait peut-être bien un péril ; pas le même que Khomeiny ou les talibans. Ce serait pourtant une menace d'autant plus grande qu'elle serait pernicieuse.
Non pas parce que Ghannouchi fait preuve d'un double discours, derrière lequel il cacherait sa radicalité, mais bien parce que, comme le FIS algérien, il dit clairement ce qu'il a l'intention de faire : rien, ou pas grand-chose, surtout en matière économique. Il annonce même qu'il est prêt à des alliances gouvernementales, car les partis qui prétendaient s'opposer à Ennahda ont, pour l'essentiel, le même programme que lui. Voilà la Tunisie condamnée à l'immobilisme. Comme l'Algérie de Bouteflika, dont M. Bakir estimait, il y a quelques années, que s'il était effectivement le représentant du despotisme néolibéral, alors cela signifierait que le pays était sorti de la crise et que l'on pouvait se réjouir, puisque ni le système rentier ni l'islamisme n'étaient plus des menaces. A l'heure où les indignés se lèvent partout à travers la planète pour dénoncer le fait que les intérêts de 1% s'imposent à ceux de 99% des citoyens, il ne faut plus être aveugle sur les dangers qui pèsent sur la démocratie. Il ne faut pas oublier comment, en Europe, on oblige les peuples à voter jusqu'à ce qu'ils votent comme il faut, c'est-à-dire, jusqu'à accepter que soient gravées, dans le marbre constitutionnel, la libre concurrence et les politiques d'austérité. Tocqueville mettait en garde contre un despotisme «plus étendu et plus doux» qui «dégrade les hommes sans les tourmenter». Nous y voilà, mais ce n'est pas un drame, nous dit M. Bakir.


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