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Empreinte : La modernité des Mille et Une Nuits
Publié dans El Watan le 16 - 03 - 2006

Proust, Faulkner, Joyce, Dos Passos et Saint-John Perse, tous ces écrivains qui ont révolutionné la littérature occidentale, ont tous considéré que Les Mille et Une Nuits, constituent le chef-d'œuvre de l'humanité. Proust les considérait comme le premier roman qui ait jamais été écrit.
Faulkner en faisait son livre de chevet. Dos Passos a toujours répété qu'il était influencé par la structure de ce texte. Saint-John Perse en a emprunté son pseudonyme dans la mesure où les Perses auraient participé à l'écriture de ce roman moderne, dont on situe l'écriture au XIIe siècle. Joyce avait toujours rêvé de le traduire en irlandais. Avant eux, Stendahl et Goethe en avaient fait le livre culte de leur époque. Stendhal disait que les Mille et Une Nuits occupaient les trois quarts de ses rêves. La citation de ces « faiseurs de la littérature » n'est pas une façon de prouver par le témoignage de l'autre, l'importance et la modernité de ce texte, mais de dire qu'il a déclenché la modernité du roman, voire sa naissance. En effet, ce texte est un vrai roman dans la mesure où il se base sur trois éléments essentiels. Tout d'abord le sujet qui est d'une ampleur extraordinaire parce qu'il va subvertir tout ce qui est humain : l'histoire universelle, le politique, la sexualité, la religion. Ensuite la structure romanesque qui est en soi toute une révolution, puisqu'elle abolit la narrativité chronologique pour déployer une écriture labyrinthique et dédaléenne (Cf le roman de Joyce : Ulysse) qui n'est pas dû au hasard ou à une certaine coquetterie littéraire, mais qui ne fait que coller à la manière avec laquelle fonctionne la mémoire qui tourne en rond et ignore complètement la ligne droite. Enfin, la textualité qui installe la poétique du texte, comme une nécessité absolue, telle que la voulait Barthes. Ainsi, ce texte annule la linéarité pour une forme tournante. Mais c'est surtout la charge explosive et subversive que porte ce texte qui a beaucoup frappé les écrivains du XXe siècle dans la recherche d'une nouvelle forme qu'ils ont pu trouver dans Les Mille et Une Nuits. Ce roman arabe dans sa langue est un roman écrit par toutes les ethnies qui composaient l'Empire musulman de l'époque. Il est pour cela cosmopolite et humaniste. Il établit clairement les luttes de classe de l'époque et les luttes politiques, avec une acuité étonnante. Le texte s'enfonce dans cette énorme machine qu'est la conscience humaine avec ses avatars et ses jubilations. Avec ses malheurs et ses bonheurs. Avec sa pathétique de l'humain, parfois grossière et grotesque ; parfois émouvante et pitoyable. Ce texte est un phénomène. Il prône en plein moyen-âge occidental la dévalorisation de tout ce qui est sacré, traditionnel et intégré par toutes les civilisations et toutes les religions. Roman antiraciste, il proclame la liberté des hommes et des femmes. Il libère l'érotisme et clame la liberté du corps dont l'importance apparaît clairement à chaque détour de page. C'est, peut-être, le premier texte pornographique de l'humanité. Certes, il y a beaucoup d'érotisme et de sensualité, mais parfois la sexualité devient carrément bestiale et anthropophagique. D'une façon débridée, mais volontairement débridée ! Et ce n'est pas par hasard que toutes les traductions des Mille et Une Nuits ont été des traductions expurgées de tout ce qui est sexuel, subversif et antireligieux. Ainsi la traduction de de Galand parue en France au XVIIe siècle est d'une infidélité aberrante. Ainsi dès la période de la décadence arabo-musulmane, les Mille et Une Nuits ont été châtrées ! Et jusqu'à nos jours la version intégrale est mise sous le boisseau dans la plupart des pays musulmans ; quand elle n'est pas carrément ou tout simplement interdite au gré des fluctuations politiques. Mais la complexité de ce texte en fait quelque chose d'ésotérique et de philosophique. Il est donc peu lu ; malgré sa célébrité et toute l'aura dont on l'entoure. C'est pourquoi la question de son origine se pose et s'est toujours posée ; ainsi l'historien El Messaoudi (Xe siècle) n'hésite pas à affirmer que ce texte est d'origine persane. Il appuie sa thèse en faisant coïncider la parution de ce livre avec la prise du pouvoir dans l'Empire musulman par les Abbassides, dont les origines persanes ne font aucun doute. Mais en réalité, les Mille et Une Nuits sont un grand roman épique et picaresque écrit collectivement par tous les peuples qui constituaient l'Empire musulman, dès le IIe siècle de l'hégire. C'est une épopée sans frontières géographiques ou linguistiques. Et c'est ce qui fait sa force, sa modernité et sa résistance à l'érosion du temps. C'est le livre de la subversion totale et de l'émancipation absolue. Un livre qui remet en question déjà l'histoire. Toute l'histoire humaine et qui la réécrit sans aucune scorie. C'est donc le livre du tout et du rien. Le livre du plein et du vide. En un mot, un livre absolu !

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