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Lettre à Annie Steiner, moudjahida algérienne : déclaration d'amour (filial)
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Publié dans El Watan le 09 - 03 - 2013

Entre le 8 mars et le 8 mai, cette belle missive où se mélangent l'histoire, la vie et l'émotion.
Chère Maman Annie, depuis que je travaille à Alger-Centre, je te vois plus souvent. A mon grand plaisir. Comme je te connais, tu ne voudras jamais me dire si ce plaisir est partagé, à cause de la couche de pudeur qui masque tes sentiments jusqu'à faire douter de leur épaisseur. Je vois bien une lueur briller dans tes yeux quand tu t'aperçois que je suis là. Tu me tends à peine le dessus de ton crâne, blanchi d'avoir si longtemps affronté fièrement toutes les contingences, pour que je puisse y déposer un baiser respectueux.
Tu m'interroges tout de suite sur la santé de chacun des membres de ma petite famille. Ensuite, tu me demandes des nouvelles de ton autre fils, nettement plus absent que ce dont tu peux m'accuser. Lui vit encore loin de toi, là-bas au bled, et s'est davantage éloigné, depuis qu'il s'est épris de politique, ses nouvelles responsabilités l'obligeant à l'astreinte de fait.Il m'oblige ainsi à donner pour deux.
Chaque midi, je me suis habitué à liquider rapidement mon déjeuner à la cantine de l'Administration qui m'emploie, pour aller avaler un qaoua au Café Auber, et finir par m'engouffrer dans la librairie «Kalimate» où j'ai de fortes chances de te trouver, presque un jour sur deux, quand le temps te permet de mettre le nez dehors.
Tu es là, assise, à accaparer l'attention ou la curiosité des clients, amusés de voir cette petite dame venue de deux rues plus bas – ce qu'ils ne soupçonnent pas, car paraissant d'ailleurs –, leur jeter des regards assassins en dessous, comme pour leur reprocher de ne pas aimer les livres autant qu'elle, et les forcer presque à acheter et acheter encore. Tu ne leur dis rien, mais ils comprennent tout.
Je ne me suis jamais étonné de te voir fréquenter ce genre d'endroit bien famé (ça se dit ?), pour plusieurs raisons, dont trois principalement :
1- «Kalimate» est une librairie où l'on vend les livres que l'on aime, que l'on a envie de lire, de feuilleter, de posséder pour la vie. On l'espère éternelle, cette vie, quand on a pris la précaution de s'entourer de livres. Comme toi, je viens dans cette librairie pour en humer l'odeur et voir de près, tenir dans mes mains, tous les livres que j'ai envie de lire sans jamais avoir le temps de le faire et, de toutes les façons, pas du tout les moyens d'en acheter plus d'un par mois ;
2- Les femmes qui tiennent cette librairie ont des allures de prêtresses du temple, discrètes et attentives, au service du culte livresque. Elles ont un visage radieux, qui s'illumine davantage dès qu'on leur pose la moindre question sur un livre, accourent derrière leur ordinateur pour vérifier la commande ou l'arrivage, vous le sortent des rayons lorsqu'elles le repèrent, vantent son contenu, toujours émerveillées de voir que vous le connaissez, que vous le cherchiez, et de partager votre joie de l'avoir enfin trouvé ;
3- Je t'ai même surprise une fois en pleine discussion, au fond de la boutique, presque à l'abri des regards, avec l'une de tes complices en générosité, ourdir quelque complot pour courir à l'aide des humbles et des persécutés de toutes les machinations encore malfaisantes que tu continues de traquer.
A ton âge ! Je te pousse un peu à laisser ton rire silencieux, malicieux, dissiper l'atmosphère studieuse de bibliothèque de la librairie, en te raillant un peu, ou en nous amusant des propos un peu trop au goût du jour, de lecteurs qui te reconnaissent, mais ne te connaissent nullement des avis contraires à l'impression communément admise, sur tel ou telle, lorsqu'ils veulent te rendre témoin de leur bien-pensante opinion.
Tu les laisses bien penser à haute voix, mais à moi, ton fils en Révolution, tu dis ce que tu caches, sur la consécration nouvelle de «planqué» récidiviste, devenu soudain le héros du jour, réussissant même, par sa mort, à éclipser celle d'un plus connu…
Je te dis ça aujourd'hui, pour ne pas avoir à radoter, un jour où j'aurais une autre douleur à apaiser… Mais comme je te sais décidée à aller jusqu'au bout du combat de ta vie, j'ai peur en fait de céder plus vite que ton cœur, acquis à la Cause, et n'avoir finalement jamais l'occasion de te faire cette déclaration d'amour filial.
Ma mère naturelle (Ma), que j'ai vue, les larmes plein les yeux, partager avec toi des rires en guise de réminiscences des mêmes engagements, est tacitement d'accord pour que je te donne un peu de la maternité dont tu as accepté stoïquement d'être déchue pour la liberté du peuple et le pays qui n'ont jamais cessé d'être les tiens.
J'ai en mémoire les vers que tu as clamés à la gueule du juge qui a, au regard du monde, osé prononcer cette sentence.
Tu restes la seule femme au monde à l'avoir jamais subie, non pas pour avoir failli à tes devoirs, mais pour avoir choisi définitivement entre la Justice et rester mère.Tu as choisi la Justice, et tu es redevenue quand même mère, bien plus tard, une fois Justice rendue.
Alors, pour compenser un peu des années où tu as supporté cette déchéance sans afficher ta peine, tous les enfants de chahid que compte ce pays sont devenus tes enfants.
En révolution.
Et puis, grâce à toi, si d'aventure je ne l'avais pas encore totalement compris, j'ai définitivement admis qu'une flamme éternelle brûle dans la poitrine de chacun des enfants de ce pays, le jour où j'ai vu des filles et des garçons se presser pour t'entourer de toute leur admiration, leur tendresse, quand tu as terminé de leur raconter qui était l'héroïne dont leur lycée porte le nom : Malika Gaïd.
Il leur fallait l'aura de l'éternelle révoltée que tu restes pour que tous ces enfants étalent au grand jour et devant qui veut le nier leur attachement aux idéaux de ce pays.
Tu peux maintenant te prélasser dans la librairie «Kalimate», ou gambader de ton pas sautillant dans les rues de la ville, pestant contre ceux qui ne savent jamais ce que résister signifie, me rappeler qu'il faut que je te préviennes à temps pour que tu ailles au bled faire la Marche du Souvenir, au matin du 8 Mai.
Malgré ton âge avancé (que je ne donnerai pas pour ne pas te contrarier), toi qui continues encore, chaque jour, de nous donner la preuve qu'on peut aimer ce pays pour ce qu'il est, pas pour ce qu'il nous donne, tu veux revenir encore cette année faire la Marche du Souvenir du 8 Mai 1945.
Le plus beau cadeau que nous puissions recevoir de ton cœur palpitant encore au rythme des djebels, c'est que tu fasses de chaque pas de la Marche, saine habitude du mois de Mai, une prière pour tous nos martyrs. Gros bisou sur le sommet de ton crâne blanchi, Maman Annie.


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