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amours et amertumes
La chronique africaine de Benaouda Lebdaï
Publié dans El Watan le 26 - 10 - 2013

Des écrivains africains écrivent les villes de leur vie.
L'Afrique attire, l'Afrique fascine, l'Afrique est magique de par ses campagnes, ses montagnes, ses hauts-plateaux, ses forêts, ses déserts, ses côtes rocheuses ou sablonneuses, ses peuples fiers malgré les problèmes inhérents à ce continent. L'Afrique attire également par ses villes colorées et animées, dont les noms évocateurs résonnent comme des lieux mystérieux et inspirants, à l'instar de Ouagadougou, Mogadiscio, Mombasa, Accra, Niamey, Marrakech, Gaborone, Johannesburg, Kinshasa ou Cotonou, sans oublier Alger, deux fois capitale du Festival panafricain. Un ouvrage Amours de villes, villes africaines m'a été présenté à Libreville, dont le fil conducteur est la ville africaine. Huit écrivains africains ont été sollicités pour livrer la perception de leur ville favorite. Florent Couao-Zotti, Kangni Alem, Tierno Monenembo, Ludovic Obiang, Mongo Beti, Boubacar Boris Diop, Boualem Sansal et Monique Ilboudo ont choisi d'évoquer les villes de Cotonou,
Ti Brava, Conakry, Libreville, Alger, Ouagadougou, Ndar-Geej et Saint Louis.
Ces écrivains évoquent leur attachement à leur ville, mais ils ne taisent pas leur irritation ou leur colère vis-à-vis de ce qui ne va pas. Ils évoquent avec force détails les liens marquants établis entre les citadins et leurs villes : un lien fort et sensuel, un amour particulier, intime, avec parfois l'envie de partir ailleurs, même si l'attachement est fort. Si les écrivains sont perçus comme des architectes de textes, ils deviennent dans cet ouvrage des architectes qui reconstruisent leurs villes selon leurs sentiments, leurs sensibilités et leurs visions qui s'inscrivent dans le choix des lieux.
Cotonou est un gros village, et les Cotonois de «gros villageois», comme le commente la journaliste de la télévision nationale, ce qui vexe les DVC (les Directement Venus de la Campagne) et les natifs de Guinkomey, l'un des plus vieux quartiers de Cotonou. L'humour traverse ce texte qui évoque deux Cotonou, le clinquant et la poubelle avec ses odeurs d'essence dont la vente, en dehors des stations laisse perplexe : «On voit l'essence partout, on la sent à toute heure, on la respire à tout vent». Et donc, Cotonou est vivante, portant en elle tant de secrets, dont celui de la roublardise où les rires, les crises, les joies et les colères font d'elle une ville hybride tant attachante. Kangni Alem évoque Ti Brava, une ville burlesque pour touristes et chercheurs d'aventures qui veulent venir à bout de toutes sortes de difficultés.
La violence des mots décrit les bidonvilles où Bruce Lee est le héros ultime et où les beaux ne sont pas encore nés, comme le dit le ghanéen Ayi Kwei Armah, si critique de la corruption sous Nkrumah. Pour Tierno Monenembo, Conakry est «un scandale», une ville qui a vu passer les plus grands, dont Aimé Césaire, mais aussi des prostituées «qui ne possèdent ni le sex-appeal des ‘‘malindrosas'' de Rio, ni le raffinement fellinien de Buenos Aires». Le romancier affirme que les villes africaines sont trop récentes, trop artificielles, trop détournées de leurs sources. Dans ce tableau sinistre, les plages de Conakry la sauvent par leur beauté légendaire, mais le poète Fodibo Keita y fut torturé.
La capitale du Gabon, Libreville, est narrée par Ludovic Obiang, une ville perdue et perturbée où Monsieur Paul disparaît et où ses amis sont à sa recherche à travers les rues, ruelles et chemins. La ville est décrite par ce biais, une ville où l'expropriation aléatoire est du domaine du possible, une épée de Damoclès sur les Librevillois, victimes des corruptions. A la manière de Fanon, Obiang nous révèle les quartiers résidentiels et surtout les bidonvilles et les quartiers construits en dur mais jamais finis, «rêve d'une grandeur inachevée» comme dans tant de villes africaines.
Les plages «aux antipodes des dépliants touristiques» sont à éviter comme la peste. Il décrit l'état calamiteux des routes, les immondices, les eaux malsaines à l'origine de paludisme, les longues chaînes à l'hôpital, les cadavres de nouveau-nés abandonnés au milieu des décharges. Le tableau est pessimiste mais si réel, métaphore du désespoir du petit peuple méprisé. Au milieu de tout cela, l'espoir des gens reste intact, leur gentillesse et leur joie de vivre les sauvent. Monsieur Paul devient une pierre parmi d'autres pour construire les hauts murs des dignitaires qui «se protègent d'une colère qui gronde».
Mongo Beti décrit avec humour Yaoundé, une ville où il n'y a pas d'eau mais où il pleut sans cesse, paradoxe qui dénonce les dirigeants qui ne font rien pour leur peuple. Ougadougou est la ville du cinéma où les deux-roues sont rois, pétaradant dans la poussière sahélienne, où les monuments érigés ne sont pas au goût de tous et où «les Ouagalaises sont des femmes libres et de bonnes mœurs», ce qui fait leur charme. Dans cette ville, les véritables citadins aiment manger de la viande et les avenues portent des noms comme le Général De gaulle ou Houari Boumediene. Malgré tous les problèmes, Monique Ilboudo dit qu'il fait bon y vivre.
Boualem Sansal décrit la belle Alger qui est «européenne jusqu'au bout des ongles, arabe dans l'âme, berbère dans le sang, africaine dans ses rêves houleux comme un troupeau de buffles en rut, indéchiffrable dans ses calculs, absurde dans ses caprices, folle dans ses passions». Alger la Blanche est présentée à travers son histoire millénaire, des Carthaginois aux Byzantins, aux Arabes, aux Turcs et aux Français et enfin l'Indépendance. Les Algérois, les vrais, savent festoyer, nous dit Boualem Sansal, et cela vient du temps de Barberousse. Le romancier algérien remonte le temps de La Casbah depuis les Ottomans en passant par les Juifs et leurs échoppes du côté de la «Mosquée des Juifs». Déroulé de l'histoire dans un texte fort où la colonisation n'est pas épargnée avec tous ses méfaits pervers.
La décennie noire est dénoncée quand Alger, «Dzaïr», n'était appelée que «Assima» (la capitale), et que les islamistes la nommaient «nid de vipères». Deux mille ans d'histoire mouvementée mais «le temps tourne en rond dans ses murs». Sansal nous dit que les Algérois ont l'esprit large, un grand cœur. A Alger, «il y a les gens, des femmes, des hommes et des enfants d'une grande beauté, mais les montrer du doigt n'est pas correct, il faut les aborder et leur parler», et c'est uniquement comme cela que l'on peut conquérir leur cœur et leur intimité. Cet ouvrage est succulent à lire, car il révèle l'amour que les villes africaines peuvent procurer. Il dit aussi les failles et les problèmes dus à la corruption et la gabegie, et sans concession aucune.
«Amours de villes, villes africaines», Editions Dapper, Paris, 2001.


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