L'Algérie accueillera l'année prochaine la 42e session du Conseil des ministres arabes de la Justice    Réunion technique pour renforcer les échanges commerciaux    Des indicateurs économiques positifs et les projets de numérisation renforceront le processus de réformes    L'Algérie alignera huit athlètes au Koweït    Vers la concrétisation des opportunités de coopération    Du Soudan au génocide de Ghaza    Le DG de l'AAPI examine les moyens de renforcer la coopération économique avec l'ambassadeur d'Egypte    Ligue 1 (mise à jour) : MCA-CRB et JSK-USMA fixés au 24 décembre    Entre espoirs et blessures en série avant les matches amicaux            A la découverte des routes de l'Empire romain    M. Nasri rencontre le président sahraoui en Angola    «La justice numérique est une responsabilité collective et un avenir judiciaire»    Saisie de 1.140 comprimés de psychotropes, une quantité de poudre noire et des cartouches de chasse    Le projet de loi organique portant statut de la magistrature devant la commission spécialisée de l'APN    Invité de l'émission de Frédéric Haziza sur RadioJ Giesbert déverse sa haine contre Zohran Mamdani, et accuse les Juifs qui ont voté pour lui de « dégénérescence mentale »    «La France doit reconnaître ses crimes commis en Algérie»    Programme TV du 4 novembre 2025 : Coupes et Championnats – Heures et chaînes    Programme TV du samedi 25 octobre 2025 : Ligue 1, Bundesliga, CAF et championnats étrangers – Heures et chaînes    Programme TV du 24 octobre 2025 : Ligue 2, Ligue 1, Serie A, Pro League – Heures et chaînes    Festival international du Malouf: fusion musicale syrienne et russe à la 4e soirée    Adhésion de l'Algérie à l'AIPA en tant que membre observateur unique: le Parlement arabe félicite l'APN    Industrie pharmaceutique : nécessité de redoubler d'efforts pour intégrer l'innovation et la numérisation dans les systèmes de santé nationaux    Conseil de sécurité : début de la réunion de haut niveau sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Examen de validation de niveau pour les diplômés des écoles coraniques et des Zaouïas mercredi et jeudi    APN : la Commission de la santé à l'écoute des préoccupations des associations et parents des "Enfants de la lune"    Réunion de haut niveau du Conseil de sécurité sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Boudjemaa reçoit le SG de la HCCH et le président de l'UIHJ    Athlétisme / Mondial 2025 : "Je suis heureux de ma médaille d'argent et mon objectif demeure l'or aux JO 2028"    Ligne minière Est : Djellaoui souligne l'importance de la coordination entre les entreprises de réalisation    Mme Bendouda appelle les conteurs à contribuer à la transmission du patrimoine oral algérien aux générations montantes    CREA : clôture de l'initiative de distribution de fournitures scolaires aux familles nécessiteuses    Poursuite du suivi et de l'évaluation des programmes d'investissement public dans le secteur de la Jeunesse    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 65.382 martyrs et 166.985 blessés    La ministre de la Culture préside deux réunions consacrées à l'examen de l'état du cinéma algérien    Le Général d'Armée Chanegriha reçoit le Directeur du Service fédéral pour la coopération militaire et technique de la Fédération de Russie    Foot/ Coupe arabe Fifa 2025 (préparation) : Algérie- Palestine en amical les 9 et 13 octobre à Annaba    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Quotidien des Beyrouthins sous les bombes
Tête haute et cœur serré
Publié dans El Watan le 14 - 08 - 2006

Ce sont d'abord les yeux qui scrutent les carrés de ciel entre les sommets d'immeubles. « MK ! », disent les Beyrouthins, devenus experts en aviation militaire depuis le début de l'agression israélienne.
Dès qu'on entend ce bourdonnement particulier, semblable à celui que ferait un scooter aérien, on tente de déceler dans le ciel ce point noir malicieux, ce drone, avion-espion sans pilote qui fait la fierté de l'industrie militaire israélienne dans les grandes foires de ventes d'armes à travers le monde. Deux pays, Israël et les Etats-Unis, sont nettement en avance pour les drones tactiques et de longue endurance. En Israël, Israel Aircraft Industries (IAI) a produit le Hunter Eagle, drone de longue endurance qui constitue le support du projet en cours, le Système intérimaire de drone Male (SIDM) de la firme française EADS. IAI a réalisé un chiffre d'affaires de 75 millions de dollars US en 2006. Il était de 25 millions de dollars l'an dernier. La société israélienne Elbit, quant à elle, produit notamment le drone Hermes, utilisé en Grande-Bretagne. En Palestine, le drone MK, vieille connaissance des victimes de bombardements israéliens, est appelé « Oum Kamel ». Lorsque les bombardements de la banlieue sud de Beyrouth — 1 km2 où vivaient avant le 12 juillet un demi-million de personnes — intervenaient tard dans la nuit ou à l'aube, avant les horaires irréguliers de la dernière semaine, les Oum Kamel rôdaient dans le ciel d'été de la capitale à partir de 18h. Les pronostics alors vont bon train. « Ils vont frapper Haret Hreik et Bir Abed », avancent les uns, alors que d'autres jurent sur le Coran ou sur la vierge que c'est plutôt les camps palestiniens de Sabra, Chatila et Bordj Baradjnah qui seraient au programme des avions et navires israéliens vu les zones survolées par les MK. Puis, il y a l'attente, alors que le vrombissement lointain des avions de chasse emplit le ciel et les tympans des Beyrouthins à bout de nerfs.
Le boom des somnifères
« Même ici à Djemayzé (un des quartiers chrétiens de Beyrouth-Est) on ne se sens pas en sécurité. Les Israéliens peuvent nous frapper et dire ensuite qu'il s'agissait d'une erreur », dit une vieille dame tenant une épicerie rue Gouraud. « Dès 19h, je me mets assise dans un coin de la maison. J'attends. Et quand ça commence, je pleure comme une gamine et à la fin, j'essaie de dormir une heure ou deux. Je ne fais plus le ménage ni la lessive. A peine je demande à un jeune voisin de me faire les courses une fois par semaine. J'habite loin du qasf (bombardement, le mot le plus courant à Beyrouth en ce moment), mais avec les Israéliens, on ne sait jamais », confie Iman, professeur d'université habitant près d'Al Hamra, une des grandes rues du centre-ville. L'heure des frappes approche. Les rues nocturnes sont quasi-vides. Difficile de trouver un taxi, pourtant réputé pour son harcèlement sonore des clients. Les reporters photographes et les cameramen ont pris les devants : ils ont des amis dont les balcons d'appartement offrent un superbe panorama sur Dhahiya (la banlieue). La chaîne de télévision libanaise NBN, dont le siège est à Jnah, sur la bordure maritime de la banlieue, place chaque jour une caméra au dernier étage de son immeuble face aux quartiers ciblés. Les quelques magasins ferment. Ne résistent au soir qui tombe que les bars de Djemayzé et une boîte de nuit dans le même quartier durant le week-end. Les ventes de somnifères ont explosé dans les pharmacies, nous indique un pharmacien d'Al Hamra. Le climat d'une ville sous embargo aérien, maritime et routier, les pénuries d'essence, les scènes des familles réfugiées installées dans les jardins publics, rend Beyrouth au bord de la crise de nerfs. Un état contagieux. Le sommeil reste le seul salut possible dans cette ville installée sur un volcan fumant et parfois explosant. Ces heures d'attente sont généralement accompagnées par des coupures électriques. Dans moins d'une semaine, le Liban épuisera ses réserves de fioul pour faire tourner les générateurs. Bougies. Lampes de poche. Portables. Les hommes retrouvent leurs peurs ataviques de l'obscurité des grottes et de la nuit. ça va commencer. Mais il semble parfois que les avions s'éloignent. Un répit ? Les optimistes et les nouveaux venus à Beyrouth commettent la même erreur, même si y croire favorise le sommeil. Mais le champ de l'optimisme est réduit à zéro par ces déflagrations monstrueuses qui font trembler la terre et les cœurs. Les vitres vibrent violemment. Les cardiaques flanchent. Les nourrissons explosent en pleurs paniques. Les médecins dans les services des urgences se tiennent l'estomac de peur que les malades soient encore une cible, comme ce fut le cas à Tyr. Les chauves-souris suspendent leurs discrets vols. Les chats disparaissent. Les déflagrations s'intensifient. Veulent-ils tout raser ? Réaliser un trou vers le centre du globe ? « Israël peut détruire la banlieue sud en une seule journée, mais en procédant ainsi par étapes il terrorise plus et dans la durée », dit un commerçant ayant quitté sa maison dans la banlieue sud et installé chez des proches au centre de Beyrouth, alors que dimanche 13 août, 11 immeubles dans le quartier Rouiss-Maâmoura, à Dhahiya, ont été détruits par 20 frappes en une minute à 14h50, à quelques heures du cessez-le-feu attendu demain matin.
« Allah, Nasrallah, et toute la Dhahiya ! »
Durant la première semaine de bombardements, un trompettiste beyrouthin s'est installé dans son balcon alors qu'une pluie de feu s'abattait sur la banlieue à deux kilomètres à peine de son appartement. Le musicien a enregistré sur son balcon un concerto, dialogue entre sa trompette et les déflagrations dont les explosions varient en intensité, créant une chaotique symphonie macabre. Un tour ensuite à la Dhahiya, avec le « Hezbollah-Tour », les sorties vers la banlieue qu'organise le parti de Nasrallah pour les journalistes — maximum une heure en fin de matinée, tournée à Haret Hreik, QG du hizb, où le « carré de sécurité » a été rasé deux jours après le début de l'agression, et rencontre avec des enfants brandissant en chantant des drapeaux jaune et vert du Hezbollah — ou avec un taxi (20 à 50 dollars l'heure). Au quartier Chiyah, particulièrement ciblé ces derniers jours, les brigades canines du hizb de recherche de cadavres s'attellent depuis des jours sur les décombres d'immeubles rasés. Seize immeubles ont été détruits en une seule attaque, la semaine dernière. Pourtant, la vie n'a pas complètement disparu des ruines de la banlieue sud : certaines familles sont restées car confiantes en « Dieu et en Sayyed Hassan (Nasrallah) ». D'ailleurs, un des slogans phares à Beyrouth reste « Allah, Nasrallah wé Dhahiya kouleha (et toute la Dhahiya ! ) ». Mais autant de ferveur ne cache pas les craintes des habitants dont la majorité a quitté ses habitations. « Nous avons peur que les projets de reconstruction tombent entre les mains de corrompus », souligne un habitant de la banlieue. L'autre peur est de voir la banlieue, ensemble de quartiers populaires et commerciaux, se transformer en jumelle de Solidere (du nom de la Société libanaise pour le développement et la reconstruction, dont l'actionnaire principal fut Rafic Hariri), le nouveau centre-ville huppé de Beyrouth et dont des parties, comme le Saïfi Village, représente un « ghetto de milliardaires », selon un journaliste d'Annahar. Pour le moment, les Libanais n'en sont pas là, l'urgent reste d'affronter ces tonnes de flammes et d'explosifs larguées du ciel et de la mer. Une des armes du « somoud », la résistance, reste l'humour libanais. Une des blagues qui circulent à Beyrouth est la suivante : un miraculé quitte la banlieue après un bombardement vers le centre-ville la main levée avec le « V » de la victoire. « On a gagné ? », lui demande un passant. « Non, il reste deux immeubles encore debout dans la banlieue. »


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.