Pas moins de 15,8 milliards de DA, tous programmes confondus, sont consacrés à l'amélioration du cadre urbain dans la wilaya d'El Tarf. Soit près de 16 000 milliards de centimes. Epoustouflant ! Et pourtant. 321 quartiers sont concernés dans 21 des 24 communes de la wilaya. 255 sont déjà aménagés et 61 sont en cours. Ceux qui restent, soient 150 cités, doivent démarrer prochainement selon le directeur de l'urbanisme de la wilaya d'El Tarf, Abbou Mohamed Hosni. Il aura fallu traiter 43 ha de terrain, y réaliser ou refaire 121 km de voirie, 23 km de réseau d'alimentation en eau portable et 75 km de réseau d'assainissement. On y a installé 270 bancs, 4677 points d'éclairage public et planté 2317 arbres, dont beaucoup de ces palmiers que l'on voit partout dans le pays comme s'il en manquait dans la région qui a un tout autre caractère bioclimatique. Toujours avec les chiffres fournis par la direction de l'urbanisme de l'architecture et de la construction (DUAC), ces aménagements du cadre urbain ont touché dans les cités près de 7000 logements sociaux et participatifs, et la réalisation de 10 places publiques et 13 ronds-points. El Tarf, le chef-lieu, et El Kala se taillent la part du lion. La première a véritablement changé de visage mais seulement pour le visiteur qui ne fait que la traverser, car les aménagements urbains ne touchent pour l'instant que les abords de la rue centrale qui traverse la ville et tout ce qui longe la double-voie d'évitement au sud. Pour les résidents, qui certes se réjouissent de la réalisation de vastes places publiques où ils peuvent prendre l'air à satiété, il n'y a aucun changement du cadre urbain dans les rues adjacentes au centre et sur les sites de vie proprement dits où l'on continue à slalomer entre les nids de poule et où les trottoirs sont défoncés quand on en trouve et l'éclairage absent ou défectueux s'il existe. Chassez le naturel il ne reviendra pas de sitôt A El Kala, c'est encore les sites dits «touristiques», c'est-à-dire les abords des plages urbaines qui gardent la faveur des autorités locales qui leur accordent la priorité des priorités. En dehors de cela, rien n'est fait réellement pour améliorer le quotidien des résidents qui croupissent dans les cités et lotissements aux accès dénoncés. Il est vrai qu'on peut interpréter différemment la formule «aménagement urbain». Cela peut signifier embellir la ville le long des axes les plus empruntés ou améliorer le cadre de vie de ses populations résidentes. En fait l'un n'empêche pas l'autre lorsqu'on sait s'y prendre. Les citoyens qui attendent depuis des lustres les aménagements promis et qui dit-on, malgré les assurances des responsables, ne verront pas le jour avec la venue de la crise économique. En effet, inscrits pendant la période vaste du baril à 140 dollars, on a perdu du temps à les mettre en œuvre. Dans les autres localités de la wilaya, quelques-unes, la rue principale a été traitée. Double-voie avec dos d'âne, trottoirs et rampes de candélabres qui prêtent à controverse. Et à propos de ces luminaires dont l'esthétique contraste avec celle du douar, les présidents d'APC, que nous avons approchés et soucieux des finances de leur communes, s'interrogent les moyens pour entretenir ces lampadaires aux ampoules très coûteuses à remplacer, et à la facture d'électricité de ces kilomètres de rampe qu'ils devront prendre nécessairement en charge. Les professionnels que nous avons consultés s'accordent à dire qu'en matière d'architecture et d'urbanisme, c'est encore le mimétisme et la généralisation des styles qui prime, le meilleur exemple est celui des palmiers. C'est le choix étrange des autorités locales qui ont été sommées pourtant de faire participer la population et les spécialistes dans leurs choix en conformité avec ce leitmotiv récent de démocratie participative. Mais à El Tarf, wilaya verte comme le montre ses images d'Epinal, l'adage le plus répandu est « chassez le naturel, il ne reviendra pas de sitôt».
