L'indice de confiance des grandes firmes manufacturières japonaises a atteint cet été un niveau inédit en plus de 3 ans, profitant d'une conjoncture internationale meilleure, mais la question est de savoir si la série positive continuera, selon les analystes. La dernière enquête trimestrielle de "sentiment à court terme" (Tankan) menée en juin par la Banque du Japon (BoJ) et dont les résultats ont été publiés lundi révèle un indice du moral des industries de premier plan désormais à +17 (contre +12 précédemment), renouant avec son niveau de mars 2014. "Le bond constaté suggère que l'activité économique s'est accélérée au cours du trimestre passé", a commenté dans une note Marcel Thieliant de Capital Economics. "Les fondamentaux économiques sont bons", a renchéri pour l'agence Bloomberg un des analystes de Société Générale. Le Tankan, indicateur important de l'état d'esprit du monde des affaires, montre que, même si l'économie nippone est toujours handicapée par une inflation qui n'arrive pas à atteindre les 2% souhaités par la banque centrale, les industriels, eux, sont plutôt enthousiastes. Les exportations évoluent positivement depuis des mois et, même si elle a connu des accès de fièvre ponctuels liés notamment à des élections à l'étranger, la monnaie japonaise n'a pas flambé durablement. Elle se maintient à un niveau de l'ordre de 110 yens pour un dollar, loin du seuil d'alerte de moins de 100 yens contre un billet vert. Vis-à-vis de l'euro aussi, le taux de change est favorable. Le résultat du moral des grandes sociétés manufacturières n'avait pas progressé trois trimestres de suite depuis 2013-2014. L'étude Tankan, menée auprès de plus de 10.000 entreprises de toute taille et tout secteur entre le 30 mai et le 30 juin, mesure la différence entre le pourcentage de firmes qui jugent la situation favorable et celles qui la considèrent défavorable. Du côté des grandes entreprises non-manufacturières, l'enquête trimestrielle de la BoJ montre une progression de 3 points (à +23), les secteurs des services bénéficiant d'une consommation des ménages moins morose et d'un tourisme qui se porte bien. Le nombre de visiteurs étrangers devrait en outre fortement progresser d'ici à 2020, dopé par la politique volontariste du gouvernement à l'approche des jeux Olympiques de Tokyo la même année. Le monde de la construction en profite aussi largement compte tenu des travaux à réaliser en amont.
Cercle vertueux encore loin Tous secteurs confondus, le moral des grandes entreprises progresse de 4 points (à +20). Même tendance positive, mais bien moins prononcée, pour les autres catégories, avec un indice en hausse de 1 point (à +16) pour les firmes de tout secteur de moyenne envergure. Un gain de 2 points à +7 est aussi à relever pour les plus petites sociétés. Le Japon vit actuellement sa plus longue période de croissance depuis 11 ans, avec cinq trimestres consécutifs d'augmentation de son produit intérieur brut (PIB). Toutefois, l'horizon n'est pas forcément au beau fixe à plus long terme. Les entreprises le disent elles-mêmes dans le Tankan, puisqu'un recul est selon elles à prévoir dans chacune des différentes catégories pour la prochaine vague, en septembre. L'analyste de Capital Economics affiche un certain scepticisme face à ces prévisions pessimistes, rappelant que "les entreprises non-manufacturières prévoyaient des baisses dans les enquêtes de précédents Tankan", reculs qui ne se sont in fine pas matérialisés. L'analyste de Société Générale se montre en revanche plus prudent: "les perspectives sont négatives et une politique axée sur l'économie est nécessaire pour dissiper ce sentiment", a-t-il insisté. Le Premier ministre Shinzo Abe a encore promis récemment de continuer à faire de l'amélioration de l'activité la priorité de son action, qui, malgré quatre ans et demi de stratégie "abenomics", est loin d'avoir durablement sorti le pays de l'ornière. Si tout va bien sur le front de l'emploi (du moins sur le plan statistique), la consommation des ménages et les investissements des entreprises ne sont pas encore revenus à un niveau tel que puisse être entretenu le "cycle vertueux" que promet M. Abe depuis son retour au pouvoir fin 2012.
La croissance du secteur manufacturier ralentit Le secteur manufacturier japonais a vu sa croissance ralentir en juin en raison d'une faiblesse de la demande intérieure mais la révision à la hausse des commandes à l'exportation donne à penser qu'il reste sur une tendance positive. L'indice PMI Markit/Nikkei calculé auprès des directeurs d'achats est ressorti à 52,4 le mois dernier, selon les données définitives, contre 52 en première estimation, et 53,1 en mai. L'indice se maintient ainsi pour un dixième mois consécutif au-dessus du seuil de 50 à partir duquel il rend compte d'une croissance de l'activité. "Bien que le chiffre définitif du PMI confirme un ralentissement de la croissance, le secteur continue de profiter de la hausse mondiale de la demande, particulièrement en Asie du Sud-Est, de laquelle émanent principalement les commandes", a déclaré Paul Smith, économiste chez IHS Market. Le sous-indice des nouvelles commandes, qui comprend à la fois les marchés intérieur et extérieur, a atteint 52,3, contre 51,3 en estimation flash et 53,4 en mai. Le sous-indice des nouvelles commandes à l'exportation a été revu en hausse à 53,4 le mois dernier, contre 52,5 en première estimation. Il s'établissait à 53,0 en mai. Selon des données publiées vendredi, la production industrielle du Japon a connu en mai sa plus forte contraction depuis le tremblement de terre dévastateur de mars 2011 et les stocks ont atteint leur niveau le plus élevé depuis près d'un an.