Attaf reçoit un appel téléphonique de la ministre des Affaires européennes et internationales de la République d'Autriche    Oran: conférence historique à l'occasion du 69e anniversaire de la mort en martyr du héros Ahmed Zabana    Tennis/Tournoi M25 Monastir: Toufik Sahtali qualifié au 2e tour    ANP: sortie de 10 promotions de l'Ecole supérieure du matériel d'El-Harrach    Il y a 20 ans disparaissait l'icône du style "Tindi", Othmane Bali    Constantine: 11e Festival international de l'inchad du 25 au 30 juin    Wilaya d'Alger : Saison estivale, rentrée scolaire et grande campagne de nettoyage au cœur d'une réunion    Adhésion du CODESA à l'Organisation mondiale contre la torture    Conférence-débat à Alger sur les entreprises d'Etat et les défis du management stratégique    Bac 2025: plusieurs condamnations à des peines de prison pour fraude et fuite de sujets d'examen    ANP : arrestation de neuf éléments de soutien aux groupes terroristes en une semaine    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 55637 martyrs    Forum africain de l'énergie : Yassaa présente l'expérience de l'Algérie en matière d'énergie durable    Chlef: plus de 300 projets enregistrés au guichet unique    Déjouer toutes les machinations et conspirations contre l'Algérie    « Abdelmadjid Tebboune n'a pas accordé d'entretien à des journaux français »    Ligue 1 Mobilis: le leader tient bon à Chlef, CRB nouveau dauphin    Campagne de sensibilisation autour des menaces sur les récoltes de la tomate industrielle    Les MAE de plusieurs pays arabes et musulmans condamnent    Ambiance maussade en Israël où la guerre des ombres devient l'apocalypse publique    Un nouvel élan aux efforts de développement équitable et intégré    Les dernières sueurs de la saison    La finale WAT – MCA décalée à mercredi    Au cœur des Hauts Plateaux de l'Atlas saharien, Aflou offre bien plus qu'un paysage rude et majestueux    Para-athlétisme/GP de Tunis: 11 médailles pour l'Algérie, dont 4 en or et un record mondial signé Berrahal    Le président de la République reçoit l'ambassadeur du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord auprès de l'Algérie    Agrément à la nomination du nouvel ambassadeur d'Algérie au Koweït    L'USMA stoppe l'hémorragie, l'USMK enchaîne    La télévision d'Etat annonce une nouvelle salve de missiles contre l'entité sioniste    Quels impacts le classement du GAFI (Groupe d'action financière) sur la liste grise et noire dans la lutte contre la corruption ?    La première journée des épreuves marquée par une bonne organisation dans les wilayas de l'Est du pays    Une date célébrée à travers plusieurs wilayas de l'est du pays    Ghaghaa, la fontaine oubliée... ou l'art d'assoiffer la mémoire    C'est parti !    Les lauréats de l'édition 2025 couronnés    L'Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel met en garde    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L' Islam rayonne au Louvre
Publié dans Le Midi Libre le 22 - 09 - 2012

"Au cœur d'al-Rusafa, il m'est apparu un palmier/Exilé des siens sur la terre d'Occident, loin du pays des palmiers/Je lui dis : tu me ressembles dans l'exil et l'éloignement/Et dans l'immensité qui me sépare de mes enfants et de mes gens/Tu as poussé sur une terre où tu es un étranger/Et je suis comme toi au bout du monde, et tu es comme moi dans l'exil/Tu t'abreuves de la rosée du nuage de l'aube qui s'écoule/Tandis que l'averse fouette tes plus hautes branches." Un poème arabe du VIIIème siècle, dit par une voix de femme, accueille le visiteur. On entendra, plus loin, sonner la poésie persane et turque. "Exilé sur la terre d'Occident", le nouveau pavillon des arts de l'Islam, au Louvre, recrée et rassemble douze siècles d'une civilisation à l'inouïe richesse, étendue des rivages de l'Atlantique jusqu'aux confins de l'Inde.
Le projet de mettre à l'honneur ces collections dans un nouvel espace - aux 15.000 pièces d'origine s'en sont ajoutées 3.000 autres, déposées par les Arts décoratifs - existe depuis plus de dix ans. Ironie du sort, l'ouverture du pavillon a coïncidé avec l'embrasement du monde musulman après la diffusion du film islamophobe Innocence of Muslims. Certains se satisfont du contre-point : François Hollande, en visitant les lieux mardi, a ainsi déclaré que "l'honneur des civilisations islamiques" était "d'être plus anciennes, plus vivantes, plus tolérantes que certains de ceux qui prétendent abusivement parler en leur nom" : "Quel plus beau message que celui livré ici ? (...) Dans cette profusion d'oeuvres on comprend que les meilleures armes pour lutter contre le fanatisme qui se réclame de l'islam se trouvent dans l'islam lui-même", a-t-il ajouté.
"Une fête de l'esprit
et des yeux"
Sophie Makariou, directrice du département, acquiesce. "Il s'agit de monter l'Islam, avec un grand I", expliquait-elle mardi. Soit l'Islam de la civilisation plutôt que de la seule religion. Un Islam qui rassemble les cultures andalouses, ottomanes, persanes, mameloukes. Qui brasse des langues diverses et des peuples différents, y compris non musulmans. "Le mot Islam, il faut l'assumer, lui redonner sa grandeur, il faut le porter, il ne faut pas le laisser aux djihadistes", ajoutait-elle. Alors que les tensions se sont aiguisées avec la publication de caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo, la conservatrice prévient toutefois que les objets présentés, si merveilleux soient-ils, "ne peuvent être les avocats des horreurs contemporaines". "Il faut les laisser être ce qu'ils
sont : de très belles choses, souligne-t-elle. On est invité ici à une fête de l'esprit et des yeux."
La métaphore est juste : on visite le pavillon comme l'on voyagerait. On découvre d'abord, dans le "rez-de-cour", la vaste verrière mordorée imaginée par Mario Bellini et Rudy Ricciotti, qui laisse apparaître les façades de la cour Visconti. Une "aile de libellule" pour les architectes - une dune, un tapis volant ou un dos de dragon pour
d'autres -, protégée d'une résille de métal qui laisse pénétrer en la filtrant la lumière naturelle et donne sur les œuvres du VIIème au XIème siècle. Un escalier coulé d'une pièce dans un béton noir mène au "parterre" où la visite se poursuit : dans une demi-pénombre luisent les trésors du XIème au XVIIIème siècle. Ici, des poignards et des sabres ciselés, damasquinés, incrustés de pierres précieuses. Plus loin les céramiques d'Iznik et de Kütahya qui joignent le bleu de cobalt, le vert émeraude, le rouge rubis. Ailleurs des moucharabiehs, des tapis d'Inde, de Turquie et d'Iran, puis un porche mamelouk du XVe siècle, reconstruit pièce à pièce et qui, placé entre deux parties de la salle, redevient lieu de passage.
L'écriture comme sommet
de l'esthétique
L'unité de ces œuvres si diverses ? Peut-être, d'abord, l'écriture. Chaque vitrine en témoigne : elle est partout et devient une matière d'invention infinie, sur laquelle on ne cesse de jouer. "Cette place est tout à fait singulière, souligne Sophie Makariou, et existe dès le début des civilisations islamiques : on trouve dès le VIIème siècle une écriture parfaitement normée et régulière, une calligraphie harmonieuse, qui utilise l'art des nombres." Celui-ci est également omniprésent, exprimé aussi bien, explique la conservatrice, "dans des décors géométriques que dans des décors floraux, comme dans le grand mur de céramique ottomane qui clôt la visite". "Partout se manifeste, ajoute-t-elle, le goût pour la précision du dessin, la recherche systématique de la perfection, du raffinement."
Les vedettes de la visite ? Le lion de Monzón en bronze, créé en Espagne vers le XIIe siècle, qui servait de bouche de fontaine et semble prêt à bondir. Le baptistère de Saint-Louis, d'origine mamelouke, qui servit pendant des siècles au baptême des enfants royaux de France. Ou l'un des premiers objets de la collection : une aiguière en cristal de roche, qui fut réalisée au Caire au tout début du XIe siècle et offerte au trésor de l'abbaye de Saint-Louis en 1152. Sophie Makariou leur préférerait presque une autre pièce : un petit bol d'apparence modeste, fait d'une terre cuite de couleur pâle et couvert d'un décor végétal en relief. "Il est tout à fait singulier, parce qu'il porte une inscription en arabe qui n'a pu encore être déchiffrée et qu'il ne porte pas ces glaçures qui rendaient les céramiques imperméables." Or, dans le monde arabe, rappelle-t-elle, on préfère alors les objets sans glaçures. Pour leur fraîcheur, mais aussi, comme le disent les poèmes, parce que l'on aime le goût de la terre.
"Au cœur d'al-Rusafa, il m'est apparu un palmier/Exilé des siens sur la terre d'Occident, loin du pays des palmiers/Je lui dis : tu me ressembles dans l'exil et l'éloignement/Et dans l'immensité qui me sépare de mes enfants et de mes gens/Tu as poussé sur une terre où tu es un étranger/Et je suis comme toi au bout du monde, et tu es comme moi dans l'exil/Tu t'abreuves de la rosée du nuage de l'aube qui s'écoule/Tandis que l'averse fouette tes plus hautes branches." Un poème arabe du VIIIème siècle, dit par une voix de femme, accueille le visiteur. On entendra, plus loin, sonner la poésie persane et turque. "Exilé sur la terre d'Occident", le nouveau pavillon des arts de l'Islam, au Louvre, recrée et rassemble douze siècles d'une civilisation à l'inouïe richesse, étendue des rivages de l'Atlantique jusqu'aux confins de l'Inde.
Le projet de mettre à l'honneur ces collections dans un nouvel espace - aux 15.000 pièces d'origine s'en sont ajoutées 3.000 autres, déposées par les Arts décoratifs - existe depuis plus de dix ans. Ironie du sort, l'ouverture du pavillon a coïncidé avec l'embrasement du monde musulman après la diffusion du film islamophobe Innocence of Muslims. Certains se satisfont du contre-point : François Hollande, en visitant les lieux mardi, a ainsi déclaré que "l'honneur des civilisations islamiques" était "d'être plus anciennes, plus vivantes, plus tolérantes que certains de ceux qui prétendent abusivement parler en leur nom" : "Quel plus beau message que celui livré ici ? (...) Dans cette profusion d'oeuvres on comprend que les meilleures armes pour lutter contre le fanatisme qui se réclame de l'islam se trouvent dans l'islam lui-même", a-t-il ajouté.
"Une fête de l'esprit
et des yeux"
Sophie Makariou, directrice du département, acquiesce. "Il s'agit de monter l'Islam, avec un grand I", expliquait-elle mardi. Soit l'Islam de la civilisation plutôt que de la seule religion. Un Islam qui rassemble les cultures andalouses, ottomanes, persanes, mameloukes. Qui brasse des langues diverses et des peuples différents, y compris non musulmans. "Le mot Islam, il faut l'assumer, lui redonner sa grandeur, il faut le porter, il ne faut pas le laisser aux djihadistes", ajoutait-elle. Alors que les tensions se sont aiguisées avec la publication de caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo, la conservatrice prévient toutefois que les objets présentés, si merveilleux soient-ils, "ne peuvent être les avocats des horreurs contemporaines". "Il faut les laisser être ce qu'ils
sont : de très belles choses, souligne-t-elle. On est invité ici à une fête de l'esprit et des yeux."
La métaphore est juste : on visite le pavillon comme l'on voyagerait. On découvre d'abord, dans le "rez-de-cour", la vaste verrière mordorée imaginée par Mario Bellini et Rudy Ricciotti, qui laisse apparaître les façades de la cour Visconti. Une "aile de libellule" pour les architectes - une dune, un tapis volant ou un dos de dragon pour
d'autres -, protégée d'une résille de métal qui laisse pénétrer en la filtrant la lumière naturelle et donne sur les œuvres du VIIème au XIème siècle. Un escalier coulé d'une pièce dans un béton noir mène au "parterre" où la visite se poursuit : dans une demi-pénombre luisent les trésors du XIème au XVIIIème siècle. Ici, des poignards et des sabres ciselés, damasquinés, incrustés de pierres précieuses. Plus loin les céramiques d'Iznik et de Kütahya qui joignent le bleu de cobalt, le vert émeraude, le rouge rubis. Ailleurs des moucharabiehs, des tapis d'Inde, de Turquie et d'Iran, puis un porche mamelouk du XVe siècle, reconstruit pièce à pièce et qui, placé entre deux parties de la salle, redevient lieu de passage.
L'écriture comme sommet
de l'esthétique
L'unité de ces œuvres si diverses ? Peut-être, d'abord, l'écriture. Chaque vitrine en témoigne : elle est partout et devient une matière d'invention infinie, sur laquelle on ne cesse de jouer. "Cette place est tout à fait singulière, souligne Sophie Makariou, et existe dès le début des civilisations islamiques : on trouve dès le VIIème siècle une écriture parfaitement normée et régulière, une calligraphie harmonieuse, qui utilise l'art des nombres." Celui-ci est également omniprésent, exprimé aussi bien, explique la conservatrice, "dans des décors géométriques que dans des décors floraux, comme dans le grand mur de céramique ottomane qui clôt la visite". "Partout se manifeste, ajoute-t-elle, le goût pour la précision du dessin, la recherche systématique de la perfection, du raffinement."
Les vedettes de la visite ? Le lion de Monzón en bronze, créé en Espagne vers le XIIe siècle, qui servait de bouche de fontaine et semble prêt à bondir. Le baptistère de Saint-Louis, d'origine mamelouke, qui servit pendant des siècles au baptême des enfants royaux de France. Ou l'un des premiers objets de la collection : une aiguière en cristal de roche, qui fut réalisée au Caire au tout début du XIe siècle et offerte au trésor de l'abbaye de Saint-Louis en 1152. Sophie Makariou leur préférerait presque une autre pièce : un petit bol d'apparence modeste, fait d'une terre cuite de couleur pâle et couvert d'un décor végétal en relief. "Il est tout à fait singulier, parce qu'il porte une inscription en arabe qui n'a pu encore être déchiffrée et qu'il ne porte pas ces glaçures qui rendaient les céramiques imperméables." Or, dans le monde arabe, rappelle-t-elle, on préfère alors les objets sans glaçures. Pour leur fraîcheur, mais aussi, comme le disent les poèmes, parce que l'on aime le goût de la terre.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.