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Tendances
Djamel Amrani, l'absent présent
Publié dans Le Soir d'Algérie le 02 - 03 - 2016


Youcef Merahi
[email protected]
Le 2 mars 2005 disparaissait l'un des poètes, sinon le poète le plus talentueux, le plus sensible, le plus authentique, le plus marginal, le plus robuste et le plus attachant des poètes algériens. Je rajouterai à ce collier d'éloges qu'il était le poète national, par excellence. En effet, Djamel Amrani cumulait toutes ces fleurs que je tisse aujourd'hui autour de sa mémoire. Pour plusieurs raisons : d'abord parce qu'il n'aimait pas les louanges, même s'il a toujours reconnu que les articles qui lui ont été consacrés, ici et ailleurs, ont été dithyrambiques ; ensuite parce qu'il m'a fait l'honneur de son amitié, poétique et humaine, et qu'il manque à mon horizon.
Alger n'est plus «mon Alger. Je ne retrouve plus cet Alger d'une époque que je magnifie, en ce moment où la nostalgie me bouffe les neurones. Djamel Amrani, d'un seul passage, bourré ou pas, remplissait tous les espaces de cette ville marâtre. En ce temps où l'amitié flirtait avec l'amour du cœur, dans ce mythique café du Quat'zarts, assis à une table en compagnie d'El-Yès, un ami de la vieille garde, nous mouillions la glotte, pour la bonne cause. Djamel déboule, en furie, comme un poète en colère contre le destin. Et la destinée. Le serveur ne tergiverse pas une seule seconde ; il lui ordonna de quitter la salle. Mon ami, serviable comme pas possible, prit la défense du poète, à qui il propose un pot. Djamel se met à notre table, heureux de la compagnie, mais ignore que nous connaissions son parcours poétique. Et sa poésie engagée, en faveur de la révolution de 1954. A peine les lèvres humectées, El-Yès, facétieux comme un singe, engagea la discussion par une
question : «Alors, Djamel, tu bivouaques toujours dans tes certitudes ?» Pour les connaisseurs de l'œuvre d'Amrani, Bivouac des certitudes est un des titres phares de sa poésie. Sans demander son reste, sans finir sa bouteille, Djamel quitta précipitamment le Quat'zarts, comme si la question lui avait fait rappeler un cauchemar. Mais au fait, écrire de la poésie, n'est-ce pas le début du cauchemar ? Surtout pour un poète comme Djamel Amrani qui avoue «écrire l'indicible avec des mots» ! Pourquoi a-t-il fui devant cette question, somme toute anodine ? Je me pose encore la question. Question que je n'ai jamais osé lui poser durant des années d'amitié. Je n'ai pas, non plus, trouvé de réponse dans la profondeur de ses poèmes. Ne dit-il pas, pour affirmer l'écriture dans l'oubli de visages incendiés : «Je vois des visages dans des visages d'incendie à ne plus savoir si corolles et pétales se fondent par habitude ou par hasard dans un jour de cactus/dans un soir rouge épineux/Je vois des visages égarés sur la mer fraîche.» (in Aussi loin que mes regards se portent, p. 68, Sned, 1972). Qu'a donc vu Djamel Amrani sur nos visages bouffés par une chevelure à la mode alors, pour qu'il abandonne comme ça une bouteille tentante comme une sirène ?
J'essaie, vois-tu Djamel, de discipliner une mémoire carnivore pour dire l'espace d'une chronique l'homme que tu étais et le poète que tu as su mettre au niveau des exigences du vers, de ses tourments, de ses insomnies (je te savais insomniaque total, tu dormais d'épuisement, me disais-tu), de ses muses qui désertent le lit de la puissance verbale et de cette indifférence sociale qui raillait le poète. Je te tranquillise Djamel, rien n'a changé en ce pays où les fleurs se parent de noirceur et où la mer vomit ses envies de se débiner de nos rivages. Pire encore, le poète meurt en cachette, en silence et en souffrance, pour ne pas déranger. Hier, juste hier, Messaour Boulenouar – un enfant du «rempart des gazelles» – s'en est allé sur la pointe des pieds. Malek Alloula en a fait autant. Quant à Ahmed Azeggagh, il a fumé sa dernière cigarette par les deux bouts, pour faire le bras d'honneur à la Faucheuse. Je regrette, Djamel, le livre d'entretien que nous n'avons pas su finir, pour la postérité de ton nom. Tu avais beaucoup de choses à nous dire. A nous confier. Sur ta vie. Sur tes prisons. Sur ta «nuit du dedans». Sur ta poésie. Sur ton amour du piano. Sur ta soif inextinguible de la vie, de la vie tout court. Mais le jour où ta vénérable maman a rejoint le ciel, je savais que notre projet était déjà un vieux souvenir à ruminer. Nous n'avions que quelques questions à reformuler, me disais-tu. Ah, comme je regrette ton refus d'une heure de discussion filmée ! Je savais ta «parole d'abondance». C'est ainsi ! Il n'y a que les regrets à pétrir, comme pour préparer une galette de repentance. C'est peut-être le prétexte à cette chronique. Dis-nous, Djamel, ton amplitude : «Mais quelle plainte dit mon nom/Quel exil me résume/Baies ouvertes, corps sans ombre/L'homme se lave au nantissement des roses.»(p. 106).
Alger n'est plus Alger, sans le poète qui battait le pavé de l'indifférence et des moqueries. Sans tes déambulations, Djamel (tu m'as toujours reproché ce mot, comme je te comprends, maintenant), le soleil sur Alger n'a plus la même sonorité. Ni la même couleur. Ni la même chaleur. Même les amis, Djamel, ceux de la belle époque, ceux du Quat'zarts, ceux du Coq hardi, ceux du Tassili, ceux de... Ceux de... oublient de s'annoncer ; ils sont avalés par une vie qui n'a plus la saveur de la vie rêvée, du temps de la poésie à ciel ouvert. Ces endroits, que la nostalgie vorace m'ordonne de citer, n'existent plus. Ils sont fermés par l'intolérance. On n'est plus au stade de l'indifférence et des pat' d'éléphant. On est au stade de l'injonction et du kamis. A ton enterrement, je me rappelle qu'il pleuvait à torrent. Il pleut autant, aujourd'hui. Ce lamento, que je fixe comme chronique, est ma manière de faire un voyage à rebours dans un rêve que je distingue à peine. Mais tu l'écrivis si bien, je réécris ton poème : «Je sais/J'ai vu/C'est l'heure de décliner ton nom/Et tandis que je pleure/Ton cœur bat la mesure de mes débauches/Mais je t'aime par tout ce qui te situe/Te date/Te nomme/Oh/Feu de roses dont la flamme m'abreuve/Lave-moi du doute/Lavez-mois ô pluies/De la souillure des mots», p. 112 et 113.
Au fait, ton roman (il ne paraîtra qu'après ma mort, me disais-tu) connaîtra-t-il l'oubli du cœur ? Tes poèmes inédits le resteront-ils en l'état, encre sans parole ? L'oubli est une simple limite chez nous. Alors que le poète n'en a aucune. Dors tranquille, Djamel, je sais que tu es mort d'une overdose de solitude et d'indifférence. Un jour, peut-être !


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