Dans une d�mocratie, il existe principalement deux types d�obligation de rendre des comptes : la �responsabilit� verticale�, par laquelle les �lecteurs, en d�autres termes les gouvern�s, exercent un contr�le sur la classe gouvernante, et la �responsabilit� horizontale�, par laquelle ceux qui gouvernent sont responsables envers d�autres instances, officielles ou non, des institutions qui interviennent comme garde-fous du syst�me. Dans un environnement d�mocratique, le succ�s de la responsabilit� verticale semble assur�. En th�orie, ceux qui gouvernent et ceux qui sont gouvern�s sont cens�s �tre semblables (�tout le monde peut �tre �lu pr�sident�) ; il n�y a pas de personne ou de groupe qui d�tiendrait d�finitivement le pouvoir politique. Les gouvernants sont choisis parmi le peuple et leurs pouvoirs sont juridiquement limit�s dans le temps. S�ils gouvernent mal, le peuple peut les sanctionner par le vote. S�ils abusent de leurs pouvoirs, le peuple peut r�clamer qu�ils d�missionnent ou soient sanctionn�s. Pourtant, dans la pratique, l�exercice de la responsabilit� verticale se heurte � de nombreux obstacles. Le processus �lectoral n�a lieu que de mani�re p�riodique. M�me dans un contexte o� les �lections sont libres, un gouvernement est jug� sur l�ensemble de ses performances telles qu�elles sont per�ues par l��lectorat. Ainsi, il n�est pas tenu pour responsable de certains de ses actes et abus sp�cifiques qui, d�une �lection � l�autre, sont parfois �oubli�s� du public. Si les gouvernants ne parviennent pas � assurer leur r��lection par le soutien d�un peuple satisfait, ils peuvent y parvenir par la combinaison d�une culture du secret, du client�lisme et par un syst�me d�alliances politiques. Ils peuvent �galement prendre des mesures d�magogiques de court terme, au d�triment de l�int�r�t du public � plus long terme. Par ailleurs, le processus d�mocratique peut �tre compromis par la volont� de certains hommes politiques d��tendre les limites de leur pouvoir et de leur autorit� afin de gouverner avec le moins d�opposition possible. La comp�tition pour la conqu�te du pouvoir politique est aiguis�e par le fait qu�il peut donner acc�s � des ressources �conomiques. Cela est encore plus vrai dans les pays o� celles-ci sont rares. Le recours � la corruption politique est un des moyens pour cette conqu�te, qui joue alors comme un facteur pervertissant le processus d�mocratique. GOUVERNER AUTREMENT OU L�EXERCICE DU �CONTR�LE PAR LE BAS� La corruption �lectorale sous diverses formes existe partout. Mais �l�achat� des votes est une pratique courante surtout dans des contextes de pauvret�. Si l�on ajoute � cela que le co�t de la comp�tition politique a par ailleurs explos� sous l�effet conjugu� de la corruption �lectorale et des techniques modernes de marketing politique, on comprend alors pourquoi le financement occulte des candidats ou des partis politiques se banalise. Seuls ceux qui d�tiennent des ressources, ou ceux qui r�ussissent � les convaincre, ont des chances de conqu�rir le pouvoir. Les �quipes en place sont favoris�es car elles abusent souvent de leur acc�s direct aux ressources nationales. Ainsi, l�acc�s au pouvoir peut cr�er des dettes financi�res ou morales envers les d�tenteurs de ressources, dettes qui vont peser sur certaines des d�cisions prises. Le cercle se referme lorsque ceux-l� m�mes qui ont conquis le pouvoir par diverses pratiques de corruption politique se r�mun�rent par la corruption. En outre, la politique est devenue une profession. Cette derni�re a g�n�r� ses propres r�gles et normes de conduite qui tendent � se g�n�raliser dans la classe politique, qu�elle soit au pouvoir ou dans l�opposition. On assiste d�s lors � l��mergence d�une classe d�hommes politiques professionnels qui partagent largement un ensemble de valeurs, dont certaines peuvent aller � l�encontre des id�aux d�mocratiques. Les actions qu�ils prennent, lorsqu�ils acc�dent au pouvoir, sont parfois � l�oppos� des promesses faites lorsqu�ils �taient dans l�opposition. En g�n�ral, la transparence � l��gard du public est rarement consid�r�e par les dirigeants en place comme un avantage. Ils ont leur propre int�r�t � contr�ler les informations donn�es aux gouvern�s et la fa�on dont elles sont pr�sent�es. Les citoyens ne sont pas inform�s de mani�re ad�quate des actions des gouvernants et n�ont pas le pouvoir d�investigation leur permettant d�enqu�ter sur d��ventuels abus. La situation se complique du fait de l�existence d�une �lite puissante qui a acquis des pouvoirs consid�rables et gagn� le contr�le d�une multitude d�organes strat�giques, telles les banques centrales, les institutions de contr�le des pratiques commerciales, les entreprises de l'Etat et m�me celles du secteur priv�. Cette �lite, qui �tait cens�e, � l�origine, s�interposer, et dans une certaine mesure prot�ger le peuple contre la classe dirigeante, est aujourd�hui largement d�pendante de la classe politique, du moins dans ses �chelons sup�rieurs. Elle n�a pas le plus souvent l�obligation institutionnelle de rendre des comptes au public. Ainsi, la complexit� de l�Etat moderne rend tr�s difficiles l�exercice formel du contr�le par le bas et la pratique de la responsabilit� verticale. Gouverner autrement c�est autant permettre l�exercice du �contr�le par le bas� que pratiquer la responsabilit� horizontale. Cela n�cessite un environnement int�gre et une volont� politique claire qui reconna�t la souverainet� du droit et le droit d�acc�s � l�information des citoyens. Ces notions sont corollaires au principe de la primaut� de l�int�r�t g�n�ral qui est � la base de la d�fense du bien public. Dans le contexte de l�Alg�rie, les syst�mes d�all�geances* susceptibles de r�sulter de l�appartenance � un clan, � une tribu, � une r�gion ou � un parti peuvent entraver la soumission � l�obligation de rendre des comptes � la population et menacer la d�fense du bien public et la supr�matie du droit. Djilali Hadjadj *All�geance : obligation d'ob�issance et de fid�lit� � un souverain Synonyme : soumission