Pendant qu'ils multipliaient les hommages dithyrambiques et obséquieux à Hocine Aït Ahmed, de jeunes enflammés chahutaient la minute de silence au stade d'Oran par un énigmatique «falastine echouhada», repris dans les tribunes sur l'air du célèbre chant de colère inspiré par la révolte d'octobre 1988. «Ils», ce sont tous ceux qui, dans le système ou à sa périphérie, ne pouvaient pas décemment se revendiquer du moindre héritage de Hocine Aït Ahmed dans son parcours d'homme, de militant et d'intellectuel. C'est qu'il leur pose un sérieux problème : il aurait pu être comme eux et il est si différent. Jusque dans sa manière de s'habiller, jusque dans sa manière de… respirer. Ils s'accrochent alors à ce qu'ils pensent être une évidence : le combat pour l'indépendance et le dévouement pour la patrie en partage. En l'occurrence, il y en a même qui ont eu l'outrecuidance de «lui reconnaître ça» ! Mais c'est votre parcours qui est sujet à caution, Messieurs, pas celui de Hocine Aït Ahmed ! Et sous prétexte qu'ils ont avec lui un moment d'histoire commun, ils pensaient avoir le privilège d'avoir des différences avec lui, suggérées sans être dites pour des raisons de gravité du moment et de courtoisie bienséante ! Dans la foulée, on imagine alors Si El Hocine dans le rôle moins embarrassant qu'ils lui destinent dans leurs suggestions : celui d'un grand militant du mouvement national et de la guerre de Libération, puis d'opposant dans la liberté retrouvée dont ils auraient combattu loyalement les idées et le projet. Non, Messieurs, ça ne s'est pas passé comme ça. Il eut fallu pour cela que l'Algérie fasse l'économie de l'ignoble été 1962, il eut fallu pour vous des idées à la place des chars et pour Aït Ahmed une tribune politique à la place de la prison d'El Harrach ! Ils sont tellement embarrassés par l'ensemble du parcours politique du défunt qu'ils ont «oublié» même ces deux dernières décennies où ils ont eu à l'affronter dans des conditions qui permettaient un minimum de liberté de parole et d'action politique ! Cela ne diminuerait pourtant en rien le respect qu'ils prétendent lui témoigner et relèverait même de la morale politique. Quant à évoquer les quelques travers qu'ils ne sont pourtant pas les seuls à lui reprocher, cela relève d'une culture politique qui n'est pas la leur. La… leur, on sait ce qu'elle a donné. Entre autres des jeunes nourris à l'ignorance et à l'irrespect de nos valeurs les plus sûres dont Hocine Aït Ahmed en est une incarnation. Les jeunes Oranais qui ont chahuté la minute de silence en opposant à Aït Ahmed la cause palestinienne dont il a été un farouche défenseur, comme les jeunes Kabyles qui leur répondent à la même hauteur, n'y sont pour rien. Ils ont même le mérite du révélateur. Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.