Liées par une solide coopération militaire et énergétique, l'Algérie et la Russie s'emploient, aujourd'hui, à fonder les bases d'une relation économique et commerciale mutuellement bénéfique. Pour ce faire, plusieurs actions sont envisagées pour l'année 2017. Considérée comme l'un des plus importants fournisseurs d'armements au monde, la Russie veut, désormais, construire des relations d'affaires pouvant aider son partenaire algérien à diversifier son économie et atténuer les effets de la crise qui sévit actuellement. Disposant d'un savoir-faire reconnu dans les domaines de l'agriculture, de l'industrie lourde et légère, des transports et du tourisme, Moscou se montre, en effet, attentive aux besoins exprimés par les autorités algériennes d'aller vers l'après-pétrole. Dans cette optique, de nombreux projets et rencontres sont programmés dans les prochaines semaines. Le représentant commercial de la Fédération de Russie en Algérie, Alexey Shatilov, évoque en particulier la participation des entreprises russes à la Foire internationale d'Alger (FIA) prévue du 8 au 13 mai prochain au palais des expositions des Pins maritimes. La 50e édition de la FIA revêt une importance particulière pour la partie russe, qui sera accueillie cette fois-ci comme «invitée d'honneur». Pour Alexey Shatilov, la participation à la plus grande manifestation économique algérienne sera l'occasion idoine pour présenter les dernières réalisations russes et étudier toutes les propositions pour le lancement de projets en commun. La décision de réserver un pavillon spécialement pour les entreprises russes a été prise, en avril 2016, lors de la visite du premier ministre Abdelmalek Sellal à Moscou. L'objectif, selon Shatilov, est d'explorer toutes les opportunités d'affaires et d'investissements existantes en impliquant en premier lieu les chefs d'entreprises issues aussi bien du secteur public que privé. Pendant la tenue de la 50e FIA, les autorités des deux parties ont convenu aussi d'organiser les travaux de la 8e session de la Commission intergouvernementale mixte, à la résidence d'Etat de Djenane El Mithak. Une importante délégation composée d'officiels et d'hommes d'affaires russes sera conduite par le ministre de l'Energie, M. Alexandre Novak. Parmi les grandes entreprises russes qui feront parties des exposants, on peut citer d'ores et déjà le leader du machinisme agricole, Rostselmash. Il s'agit de l'un des constructeurs les plus puissants dans ce domaine, et qui mettra à profit sa participation à la FIA pour présenter une nouvelle moissonneuse-batteuse pouvant aider considérablement les exploitants algériens. «Il est même possible d'organiser dans l'avenir une production mixte», a dévoilé le responsable de la représentation commerciale russe. Le secteur de l'agriculture pourra constituer, selon notre interlocuteur, un autre domaine de coopération au même titre que celui de la défense et de l'énergie. Sur cette base, il a été convenu de mettre en place des mécanismes bancaires et financiers pour soutenir la communauté d'affaires à nouer des relations durables et structurées. Création de comptes de correspondance Deux hauts responsables de la Banque régionale sud de la Russie ont séjourné récemment à Alger dans le but de créer des comptes, spécialement pour effecteur des opérations bancaires et de transfert d'argent. Il s'agit d'Ivan Naborshchikov et de Vladimir Kuzmin, conseillers du président du Directoire. Les deux dirigeants russes ont rencontré lors de ce déplacement des responsables du ministère des Finances, de la Banque centrale, de la Banque extérieure et de la Badr. L'établissement bancaire moscovite se prépare à ouvrir des comptes de correspondance au niveau de la Badr et de la BEA, ce qui va aider considérablement, selon Alexey Shatilov, les sociétés algériennes et russes, particulièrement celles du secteur agricole. Les mêmes responsables russes ont eu également des réunions de travail avec des exportateurs algériens d'agrumes fortement intéressés par le marché russe. Un marché potentiel convoité actuellement par plusieurs pays de la région méditerranéenne, d'où l'intérêt pour les opérateurs algériens de bien s'organiser et de mettre en place avec leurs partenaires russes les moyens indispensables pour la durabilité de ce commerce. Dans le domaine énergétique et scientifique, les projets sont plus au moins satisfaisants, à en croire le responsable commercial de la Fédération de Russie. Ce dernier citera, entre autres, l'importante découverte de gisement de gaz à Berkine (Illizi) par la compagnie Gazprom et le projet de l'entreprise Axion, issue du groupe militaire produisant la fameuse arme Kalachnikov, et la fourniture d'équipements médicaux en Algérie. Ce ne sont pas, ici, les seuls investissements concrétisés. D'autres projets non moins importants attendent le feu vert des autorités algériennes, à l'exemple de celui portant sur la fabrication de wagons par le complexe Uralvagonzavod, une importante entreprise d'armement fabricant des chars de combat, le fameux T14 Armata. L'accord signé il y a deux ans avec Ferrovial d'Annaba pour la production de matériel ferroviaire n'a toujours pas été concrétisé. Des efforts à déployer Malgré toute la bonne volonté affichée de part et d'autre pour hisser le niveau de la coopération, il n'en demeure pas moins que des obstacles persistent et font que le volume des échanges hors secteur d'armement reste encore faible, en deçà des potentialités. Sur le plan politique et diplomatique, la relation ne souffre d'aucun quiproquo. Plusieurs accords et conventions ont été signés, dont la plus importante est celle de la déclaration de Partenariat Stratégique scellée en avril 2001. Les visites d'officiels et d'hommes d'affaires entre les deux pays n'ont jamais cessé. Une forte coordination existe au sein de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et du Forum des pays exportateurs de gaz. Mais cela n'a pas permis pour autant de développer les échanges commerciaux et les investissements qui sont toujours au stade embryonnaire. Le représentant de la Division commerciale russe reconnaît d'ailleurs que le partenariat dans ces domaines progresse «très lentement». Pour capter les investisseurs et touristes russes, l'Algérie est appelée donc à déployer plus d'efforts en matière de législation et surtout de conditions d'accueil. Réciproquement, les entreprises algériennes sont également invitées à s'intéresser davantage au marché russe disposant d'opportunités indéniables. L'heure est propice pour passer du stade des déclarations de bonnes intentions à celui des actes concrets sur le terrain.