«Il y a des êtres qui vous marquent, et leur vie transcende la mort». C'est par cette formule qu'un proche de Katchou aime à présenter l'homme, pour traduire la diversité et la richesse de sa personnalité. Car l'artiste cache un être attachant, sensible, «quelqu'un qui entre dans le cœur», selon cette expression bien de chez nous. Emu et bouleversé par la disparition de Katchou qu'il connaît depuis de longues années, notre interlocuteur, tout en se pliant à la volonté divine, tient à relever que la disparition du chanteur laisse un grand vide, non seulement sur la scène artistique mais également sur celle, plus subtile, de la vocation et du sens que chacun donne à sa vie. Et sur ce plan, l'Algérie a perdu un patriote qui cultivait avec passion l'amour du pays. Cette dimension en a fait un chanteur du terroir chaoui qu'il a su sublimer, mais également un artiste de dimension nationale, car son souci était d'être écouté et compris, ce pour quoi il parsemait ses textes de paroles en arabe, et dans d'autres idiomes locaux. Katchou l'artiste, pour être attaché au terroir, n'en était pas moins soucieux de modernité et, pour l'histoire, il a été le premier à donner à la rahabba, cette danse typique du patrimoine chaoui, une nouvelle envergure. C'était, se souvient son ami, en 2002, lors du festival de Timgad. Katchou avait mis en scène une superbe chorégraphie avec 80 danseurs et un groupe de rappeurs, ce qui avait donné un spectacle de rahabba unique dans les annales. Le chanteur était très proche de son parolier et du chanteur Dida, avec lequel il avait fait un duo mémorable. Katchou était donc un artiste accompli, mais le répertoire de l'homme était encore plus riche. D'une extrême sensibilité, il était omniprésent dans le domaine caritatif et l'action citoyenne. Dans les grandes campagnes de solidarité au lendemain de catastrophes naturelles, mais aussi à l'échelle de la personne et du citoyen, il suivait la voix du cœur. Son bonheur était proportionnel à celui des autres, et il ne pouvait souffrir que quelqu'un soit dans le besoin ou dans la précarité. Son âme charitable le poussait à dispenser son aide tout le temps et en tout lieu. Il cultivait le sens du partage et de la solidarité. Fils digne et bon père de famille, il était un porteur de valeurs. Le jour même de son accident, il avait sollicité son père afin qu'il assure la restauration des pensionnaires des centres d'accueil pour personnes âgées. Un dernier geste sous le signe du cœur. C'était, en guise d'adieu, la signature de l'homme. Un homme qui incarnait une voix et une voie.