Il est des situations qui poussent l'individu à se sentir délaissé et inutile pour la société. C'est le cas de ce jeune non-voyant, licencié en psychologie de l'université d'Alger depuis plus de six ans. B. Rachid, puisque c'est de lui qu'il s'agit, est âgé de 31 ans, se retrouve aujourd'hui, après des années de sacrifices et de travail sans répit pour atteindre son objectif de suivre ses études malgré les pires difficultés auxquelles sont confrontés les non-voyants, avec le lot quotidien d'obstacles qui obstruent leur parcours, sans emploi et sans aucune rente à même de soulager un tant soit peu leur marasme. Rachid ne sait plus à quel saint se vouer pour espérer décrocher un poste d'emploi et pouvoir ainsi avoir une vie décente. Depuis qu'il a terminé ses études, ce jeune psychologue n'a pas cessé de frapper à toutes les portes des établissements et institutions susceptibles de le recruter ou de l'aider dans sa recherche d'emploi. Rencontré à l'école des jeunes aveugles de Boukhalfa, ce jeune résidant à Draâ El Mizan, à une quarantaine de kilomètres du chef-lieu de wilaya, n'a pas manqué de nous exprimer sa colère et sa révolte de se voir à chaque fois «aveuglé» par les promesses sans suite. «C'est la quatrième fois que je viens ici dans l'espoir de décrocher un poste d'enseignant dans cette école, et à chaque fois, on me répond qu'aucun poste budgétaire n'est affecté, alors qu'un déficit en la matière est pendant depuis des années», dira le concerné sans omettre de nous informer qu'il a pu bénéficier d'un contrat dans le cadre du préemploi comme conseiller d'orientation scolaire et pédagogique au Cosp de Draâ El Mizan. Un contrat qui ne lui a pas été renouvelé après une année d'exercice. Il se retrouve donc, une deuxième fois, au chômage. A propos de cette formule d'emploi, Rachid ironise en qualifiant ce contrat de «pré-chômage» car, comme il nous l'a dit, la majorité des bénéficiaires de ces contrats se retrouvent une deuxième fois au chômage au lieu de les intégrer automatiquement dans le monde du travail. Désarmé face à cette situation qui dure, et voyant que toutes les portes lui sont fermées, il dit comprendre, maintenant, pourquoi les jeunes ne pensent qu'à la fuite et à la recherche d'horizons plus cléments. Cette «opportunité» ne lui est pas aisée, lui qui souffre déjà du handicap de la vue et qui manque de moyens à même de répondre à ses besoins les plus élémentaires. Rachid garde tout de même une lueur d'espoir et attend que les différentes structures, chargées de la prise en charge de cette frange de handicapés, fassent un geste à son égard.