«La dépolitisation postrévolutionnaire a fait de la liberté un acquis et, du coup, elle a été perdue comme projet et espérance» écrit l'auteur... Les Editions Barzakh vous convient à une rencontre avec la psychanalyste Karima Lazali (animée par la journaliste Ghania Mouffok) avec Mohamed Mebtoul (anthropologue) et Sofiane Hadjadj (éditeur) autour de son ouvrage Le Trauma colonial, Enquête sur les effets psychiques et politiques de l'offense coloniale en Algérie (Découverte/Koukou, 2018) et ce aujourdhui, à partir de 15h à la librairie L'Arbre à dires, sise boulevard Sidi Yahia, Immeuble 48 - Hydra, Alger «Si l'indépendance de l'Algérie a entraîné un retour vers l'asservissement, c'est donc aussi parce que la libération ne suffit pas à faire la liberté. La libération relève certes en partie d'une croyance imaginaire, mais elle ne peut mener à un authentique affranchissement, à un accomplissement de chaque citoyen que si la liberté est sans cesse débattue comme potentialité, toujours à venir. La dépolitisation postrévolutionnaire a fait de la liberté un acquis et, du coup, elle a été perdue comme projet et espérance», écrit Karima Lazali. Pour cette dernière, psychanalyste, seuls les effets profonds du «trauma colonial» permettent de comprendre, car plus d'un demi-siècle après l'indépendance, les subjectivités continuent à se débattre dans des blancs de mémoire et de parole, en Algérie comme en France. Elle montre ce que ces «blancs» doivent à l'extrême violence de la colonisation: exterminations de masse dont la mémoire enfouie n'a jamais disparu, falsifications des généalogies à la fin du XIXe siècle, sentiment massif que les individus sont réduits à des corps sans nom... La «colonialité» fut une machine à produire des effacements mémoriels allant jusqu'à falsifier le sens de l'Histoire. Et en cherchant à détruire l'univers symbolique de l'«Indigène», elle a notamment mis à mal la fonction paternelle: «Leurs colonisateurs ont changé les Algériens en fils de personne» (Mohammed Dib). Mais cet impossible à refouler, ressurgit inlassablement. Et c'est l'une des clés, explique l'auteur de la permanence du «fratricide» dans l'espace politique algérien: les fils frappés d'illégitimité mènent entre frères une guerre terrible, comme l'illustrent le conflit tragique FLN/MNA lors de la guerre d'indépendance ou la guerre intérieure des années 1990, qui fut aussi une terreur d'Etat.