Nouveau casse-tête pour les ménages! Entretenir un véhicule est devenu un défi quotidien, tant les prix des pièces détachées et des lubrifiants ont connu une hausse vertigineuse. «Il faut encore en trouver sur le marché», se lamente Youba, un jeune homme qui a fait le tour de la capitale à la recherche de disques de frein pour son véhicule, en vain. Son histoire n'est malheureusement pas un cas isolé. Un simple détour à la cité Soummam de Bab Ezzouar, surnommée le «paradis» de la pièce détachée à Alger, suffit à comprendre l'ampleur du problème. Le désarroi des consommateurs se lit sur leurs visages. «Makache!», cette réponse (qui signifie «Il n'y a pas!») revient inlassablement, comme l'expliquent des automobilistes déambulant de magasin en magasin sans jamais trouver ce qu'ils cherchent. Omar, un mécanicien de profession, observe avec impuissance cette situation. «Si on a la chance de trouver ce que l'on cherche, on découvre que les prix ont doublé et souvent, ce sont des pièces de qualité médiocre», déplore-t-il. Face à cette réalité, beaucoup de ses clients renoncent à entretenir leurs véhicules. «Certains choisissent de garer leur voiture, tandis que d'autres prennent le risque de rouler avec des pièces défectueuses, car ils n'ont pas d'autre choix», poursuit Omar. La grogne des citoyens ne s'est pas fait attendre, notamment sur les réseaux sociaux où des appels à l'aide se multiplient. Les transporteurs publics, en particulier, tirent la sonnette d'alarme. «Les prix des pneus ont augmenté de plus de 5 000 dinars, et ce sont des produits fabriqués localement. Quant aux pneus importés, ils sont presque introuvables», rapportent plusieurs d'entre eux sur des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux. Le nouveau «gâteau» Les lubrifiants, malgré leur production locale, ne sont pas épargnés par cette flambée. «Les huiles fabriquées en Algérie coûtent au minimum 5 000 dinars pour cinq litres, alors que les produits d'importation sont deux à trois fois plus chers», s'indignent de nombreux automobilistes.Les commerçants en pièces détachées, eux, dénoncent une situation hors de contrôle. «Il y a un manque flagrant de marchandise, notamment pour certaines pièces», affirment-ils. La baisse des importations et une production locale insuffisante, voire inexistante, pour certains produits, ont créé un déséquilibre sur le marché. Une situation qui semble profiter à certains. «Une mafia s'est emparée du marché, elle spécule sur les prix en limitant la quantité de pièces disponibles, maintenant ainsi les prix à des niveaux toujours plus élevés», révèlent plusieurs commerçants. Cette «Isaba» profite également de la situation pour inonder le marché de produits de qualité médiocre, vendus à des prix exorbitants. «Après avoir été chassée du marché de l'agroalimentaire, elle s'est réorientée vers le secteur des pièces détachées, où elle peut agir discrètement avec des marges plus importantes», déplorent les commerçants. Hacène Menouar, président de l'association El Aman de protection des consommateurs, confirme ces faits. Il souligne que les plaintes des citoyens se multiplient, tout comme les constats faits sur le terrain fait par son association. Selon lui, cette situation est due à un manque de concurrence, un vide laissé par l'absence de régulation. «Cette mafia a trouvé un nouveau moyen de saigner les Algériens. Ce problème doit être résolu en urgence, car il constitue une double menace, à la fois pour le pouvoir d'achat des ménages et pour leur sécurité», alerte-t-il. Menouar va plus loin, pointant du doigt un risque accru d'accidents de la circulation. «L'entretien des véhicules coûte aujourd'hui si cher que de nombreux automobilistes renoncent à effectuer les réparations nécessaires. Cela risque d'augmenter le nombre accidents, notamment quand il s'agit de pneus, de suspensions ou de freins», prévient-il. La pollution générée par des véhicules mal entretenus constitue un autre sujet d'inquiétude. Menouar souligne les graves conséquences sanitaires que cela peut engendrer et appelle à une prise de conscience collective pour endiguer cette dérive. Une bataille à livrer À voir cette situation, on comprend mieux la colère que le chef de l'Etat a piquée lors du dernier Conseil des ministres. Abdelmadjid Tebboune s'est montré particulièrement ferme à l'égard de ce qu'il a qualifié de «lobby de l'importation». Il a ordonné au ministre du Commerce de resserrer l'étau autour de ces acteurs économiques qui profitent du marché pour spéculer. «Il ne sera jamais toléré de créer la pénurie, pour quelque raison que ce soit», a martelé le Président, tout en insistant sur la vigilance nécessaire de la part du gouvernement. Dans ce cadre, Tebboune a également annoncé la préparation d'un décret présidentiel visant à réguler le commerce extérieur et à encadrer strictement les opérations d'exportation, afin d'éviter tout déséquilibre du marché national.