Parle-t-on de développement rural ou agricole? Beaucoup de moyens ont été concédés pour des résultats dérisoires. La wilaya de Tizi Ouzou a bénéficié d'importants budgets pour le développement de l'agriculture. Malgré les efforts des pouvoirs publics pour doter ce secteur de tous les moyens financiers et techniques pour sa relance, les résultats demeurent en deçà des attentes. Des causes souvent exogènes à ces dispositifs mis en oeuvre ont toujours bloqué l'activité agricole. Après des années d'attente, le temps est au changement de cap. Les procédés non concluants ont amené les pouvoirs publics à tenter d'autres stratégies. Dorénavant, les agriculteurs sont tenus par des contrats. Il a été décidé de les appeler, contrats de performance. Un bref aperçu des problèmes rencontrés par les agriculteurs permet de conclure que s'il s'agissait seulement de moyens, le programme serait prometteur. Mais, en fait, le vrai problème se situe tout à fait ailleurs. Pour enclencher une dynamique sur un secteur, il est demandé, au préalable, d'agir sur l'état d'esprit de la population. A voir l'approche socioculturelle de l'agriculture dans la société qui se maintient encore, il est à douter du résultat de ce louable programme qui s'échelonne jusqu'à 2014. Demander aujourd'hui aux agriculteurs de réaliser des performances, c'est ordonner à un aveugle de passer le fil par le chas d'une aiguille. Il s'avère plus que jamais d'actualité de prendre le mal par la racine. Le développement du secteur de l'agriculture dans la wilaya bute sur des problèmes plus culturels que financiers et techniques. Les manifestations de ce constat sont multiples. Derrière toutes ces feuilles de route, la réalité du terrain montre d'autres choses. Premièrement, les pouvoirs publics entretiennent toujours l'ancien cliché qui lie intimement les deux concepts du développement rural et du développement agricole. Tandis que le premier dénote plutôt des réalités sociologiques, le second renvoie aujourd'hui à la vie économique d'un secteur. Dans le monde moderne, la jonction entre ces deux représentations est affaire de spécialistes. Deuxièmement, en consultant les documents émanant de la wilaya et de l'APW, l'on est frappé de constater des jonctions approximatives et floues. Les conditions climatiques et morphologiques d'une région, à titre d'exemple, ne relèvent pas de problèmes qui entravent l'activité agricole dans sa conception économique. Sous d'autres cieux, ces caractéristiques sont des indicateurs objectifs et scientifiques pour donner une spécificité agricole. Troisièmement, les mêmes rapports mentionnent une superficie agricole utile (SAU) de 98 725 hectares. Les rédacteurs dans leur exposé affirmaient que cette SAU se caractérise par un morcellement extrême des exploitations au nombre de 66 650 unités (au dernier recensement général agricole de 2001) et par le statut juridique privé (96%) des propriétés qui entravent toute intensification et modernisation de l'agriculture dans la région. Ces caractéristiques culturelles sont citées ici comme de véritables entraves à l'activité agricole. L'on continue encore donc à considérer les spécificités sociologiques et culturelles comme des barrières alors que l'économie moderne s'attache plutôt à rentabiliser par des formules ingénieuses ces dernières. De l'autre côté, sur le terrain, l'on continue de pratiquer l'agriculture à la manière traditionnelle. Ces dernières semaines, l'activité dominante dans les villages est sans conteste la fauchaison. Le problème du morcellement apparaît au grand jour à travers cette activité. Chaque villageois se doit de ramasser son foin. A l'issue de deux semaines de galère, chacun propose à la vente de miniscules quantités de bottes à des prix inconcevables. L'éleveur se voit contraint d'acheter l'aliment du bétail à des prix allant de 400 à 600 dinars en plus d'autres produits importés souvent introuvables sur le marché. Résultat: le villageois achète encore, rarement, un kilo de viande à des prix qu'il ne cesse de dénoncer. En fait, les services de l'agriculture n'ont-ils pas pensé trouver une formule qui puisse faire bénéficier les éleveurs de cette richesse qui pousse et qui se fait arroser et détériorer par les orages depuis des millénaires sans aucune solution. Enfin, en attendant les résultats en 2014, il est aussi bénéfique de faire participer les spécialistes. Leurs efforts joints aux grosses enveloppes financières mobilisées seront un atout pour séparer le grain de l'ivraie.