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L'origine des prénoms employés en Algérie
Yanis, Yanès
Publié dans Liberté le 18 - 09 - 2014

Ce prénom masculin est d'un emploi récent. On pense qu'il est d'origine arabe et relève de la racine ‘NS qui a fourni de nombreux prénoms, aussi bien masculins que féminins. Ces prénoms dérivent tous du verbe anasa "devenir familier, rendre familier, être doux, tenir compagnie". Yanis ou Yanès est donné comme synonyme d'Anis "ami, compagnon". En fait, il est proche d'un prénom d'origine européenne, Yanis, qui est un diminutif de Jean, venant de l'hébreu Yohanna. Dans l'histoire du Maghreb ce nom est porté justement par un esclave d'origine européenne. Yanès est le nom de l'esclavon qui gouvernait Tripoli, au commencement du 11e siècle de l'ère chrétienne. Le mot esclavon, en arabe saqlîb, désigne un esclave d'origine européenne, germanique ou slave, capturé dès l'enfance et converti à l'islam. L'Ifriqya – on appelait ainsi la province qui s'étendait du l'est de l'Algérie à la Libye actuelle – relevait de l'autorité des Fatimides. Quand ces derniers se transportèrent au Caire, ils confièrent l'administration de la province à Bologhine Ibn Ziri, de la dynastie des Zirides. Le calife fatimide al-Mouizz nomma à la tête de Tripoli comme gouverneur Abdallah Ibn Yakhlouf, un chef de la tribu berbère des Kétama, fidèle alliée des Fatimides. En 997, Bologhine parvint à obtenir de Nizar, le successeur d'al-Mouizz, la permission de joindre Tripoli à son royaume. Il l'obtint, et Bologhine nomma à sa tête un gouvernement sanhadjien, c'est-à-dire de sa tribu. En l'an 1000, El-Hakem, le nouveau gouvernement fatimide, nomma à la tête de Tripoli un esclavon du nom de Yanès. Selon Ibn Khaldoun, cette nomination a été favorisée par le gouverneur sanhadjien, Yemloul, en révolte contre Badis fils d'al-Mansour fils de Bologhine. Berdjouan, un autre esclavon qui avait une grande autorité auprès des Fatimides, l'avait également favorisée : il voulait, en mettant Yanès à la tête de Tripoli, l'éloigner du Caire. Pendant que ce nouveau gouverneur se rendait à Tripoli à la tête d'une forte escorte, Badis envoya à sa rencontre son armée, commandé par Djaâfar Ibn Habib. La rencontre eut lieu dans la plaine de Zenzour, une bataille s'engagea entre les deux armées et dura trois jours. Yanès fut tué et ses soldats se retirèrent à Tripoli. Ibn Habib les suivit et assiégea la ville. Felfoul Ibn Khazroun, au service des Fatimides, les délivra et il le nommèrent gouverneur de Tripoli.
M.A. Haddadou
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