Impasse et horizons bouchés. Malgré une multiplication de propositions pour un "dialogue" susceptible de mener le pays à une sortie de crise, aucune avancée n'a été enregistrée. Chacun attend le signal de l'autre partie. Depuis quelques mois, le pouvoir navigue à vue. Traversé par des courants différents et parfois contradictoires, il n'arrive pas à prendre de décision. Il sait qu'il faut négocier. Mais ne sait pas comment faire pour parvenir à cet objectif. Et cela bloque. De l'aveu même des médias officiels, le pays est "dans l'impasse". Même la télévision gouvernementale, qui a pour habitude de "positiver" tout ce que fait le pouvoir, a fini par admettre que la situation est "bloquée". Un reportage en ce sens, diffusé par "l'Unique" ce dimanche soir, ne désigne pas le "coupable". Mais il est clair que la première responsabilité revient au pouvoir. Cela fait, en effet, plusieurs semaines que les autorités ne parviennent pas à convaincre l'opposition de sa bonne intention d'aller vers un vrai dialogue. Cette difficulté se matérialise par le déni de la situation des détenus d'opinion. Malgré une demande insistante de leur libération de l'opposition et des manifestants, le pouvoir reste sourd et ne veut même pas reconnaître cette réalité. Pourtant, toutes les parties qui appellent au dialogue font de la libération des "détenus d'opinion" une condition sine qua non avant d'entamer un dialogue avec le pouvoir. Plus que cela, la classe politique réclame des "mesures d'apaisement" susceptibles de "créer des conditions d'une élection présidentielle". Seule réponse du pouvoir ; depuis au moins deux vendredis, la pression est quelque peu retombée sur les manifestations. Depuis les arrestations hasardeuses des manifestants qui portaient l'emblème amazigh, les brutalités sont devenues rares. Ce qui n'empêche pas le pouvoir d'imposer un véritable blocus sur la capitale et les grandes villes du pays. Les manifestants venus des wilayas environnantes sont systématiquement refoulés aux portes d'Alger. Il n'y a cependant pas que le pouvoir qui bloque le processus de dialogue. Au sein de la classe politique sont apparus au moins deux blocs politiques, pour l'instant inconciliables. Les forces du changement, constituées essentiellement des partis "nationalistes" et "conservateurs", qui ont signé le pacte d'Aïn Benian. Leur préoccupation principale est l'organisation d'une élection présidentielle dans les plus brefs délais. Mais "pas à n'importe quel prix", avertissent-ils. Face à eux, les formations de "l'alternative démocratique" veulent une période de transition et ne font pas de la présidentielle une "fin en soi". Ils comptent organiser, le 31 août, une conférence nationale. Mais la participation des autres tendances politiques à la rencontre semble déjà compromise. Selon des indiscrétions, des partis politiques, comme le MSP et Talaie El-Houriat, ne voient pas d'un bon œil la tenue d'une réunion de l'opposition sans qu'ils soient directement associés à l'initiative. Ils considèrent l'initiative de "l'alternative démocratique" comme "une convocation". Or, selon un homme politique, "une réunion pareille doit être préparée de concert avec tout le monde. On ne peut pas fixer une date et appeler les autres à se joindre à toi". Des frictions de cette nature ont toujours compromis les rapprochements entre les partis de l'opposition. Cela ne fait que perdurer la crise et élargir le fossé qui existe entre les différents acteurs présents sur la scène politique. "Les Algériens n'ont jamais appris à se parler", a avoué l'ancien ministre Abdelaziz Rahabi. "J'ai l'impression que personne ne veut parler à personne", s'est également angoissé l'ancien président de l'APN Karim Younès, qui tente actuellement une nouvelle médiation politique. Mais, pour l'heure, tout reste au stade des intentions.