Décédé à l'âge de 81 ans, Ammar Allalouche, dont la notoriété dépasse les frontières, rêvait de "l'édification d'un espace culturel maghrébin pour une meilleure compréhension de l'art et pour la création d'une fédération des arts et de la culture au Maghreb". Après Mahdjoub Benbella, décédé en juin dernier, voilà que la scène culturelle algérienne perd un autre artiste majeur, le plasticien et sculpteur Ammar Allalouche. Décédé jeudi à l'âge de 81 ans à Constantine, sa ville adoptive, cette annonce a suscité beaucoup d'émotion. Connu pour sa générosité, sa simplicité et sa grande créativité, le peintre disparu laisse l'univers artistique "orphelin". Engagé et militant dans l'âme, il rêvait de "l'édification d'un espace culturel maghrébin (méditerranéen et africain), pour une meilleure compréhension de l'art et pour la création d'une fédération des arts et de la culture au Maghreb". Il avait écrit à ce propos : "L'art des années 60 en Tunisie, en Algérie et au Maroc constituait un champ sémantique culturel où les artistes vivaient un système de références communes. Dans cette période existait déjà une constellation de foyers culturels dans le Maghreb où les artistes vivaient à l'unisson et partageaient leur espoir. Et pourquoi pas aujourd'hui en 2020 et après ?" Pour ce peintre et sculpteur qui a laissé derrière lui une cinquantaine d'années de carrière dans la création, la recherche et l'enseignement, l'art était un acte de liberté. Il a peint la femme, l'homme, le terroir, l'univers... En somme, il a peint l'humanité avec poésie. Dans un texte publié sur son site, Ammar Allalouche a expliqué sur son travail : "Je suis proche de tous ceux qui militent en faveur d'un art nouveau, car pour moi l'art nouveau, c'est tout d'abord une optique et une vision de la modernité comme étant une tendance vers l'universalité. Mon art, depuis plus d'une quarantaine d'années, représente l'objectivation des manières d'enracinement de la figuration. Dans la conscience et la tradition ethnique et (éthique), surtout dans l'art populaire." Tout en ajoutant : "Je suis toujours prêt à transformer le sujet (objet) considéré au profit de la peinture en gardant pourtant l'intention d'intégrer à l'œuvre une pensée morale qui, si elle veut devenir active, demande une forme concrète, et c'est la raison pour la laquelle je crée une alternance du figuratif et de l'abstrait." Né en 1939 à El-Milia, dans la wilaya de Jijel, Ammar Allalouche a suivi des études techniques à Constantine, à Annaba et à Alger. Il enchaîne par la suite des études aux instituts d'architecture et des beaux-arts d'Alger. Il a enseigné dans divers établissements, notamment aux Beaux-Arts, aux instituts d'architecture et de communication à Constantine. Très actif, entre création et exposition, il a participé à de nombreux colloques internationaux sur l'artisanat et présidé la section de l'Union nationale des arts plastiques (Unap) de l'Est algérien ainsi que l'Association nationale des arts plastiques (Assemblée d'Oran). Il a effectué entre autres des recherches sur les arts et l'architecture et a été plusieurs fois primé en Algérie et à l'étranger. À l'annonce de sa disparition par sa famille sur son compte facebook, de nombreux acteurs culturels, amateurs d'art ou anciens étudiants, ont témoigné sur les réseaux sociaux sur cet homme atypique, dont le talent et les valeurs ont dépassé les frontières.