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Entre sable et ciel…
Publié dans La Nouvelle République le 31 - 10 - 2024

« On roulera jusqu'à Chinguetti... ». La mythique cité mauritanienne recèle des trésors plus ou moins connus, dont la stupéfiante fraîcheur de Timkemkemet, son oasis aux champs « grands comme des draps de lit » et la langueur conviviale de ceux qui y vivent. »On passera là un temps butoir, le temps d'être et de le savoir ». Puis, il y a le désert, ces dunes qui essaient dans bruit d'avaler Chinguetti, ces paysages où « le temps semble se recycler sans fin ».
On roulera jusqu'à Chinguetti sur une piste rectiligne, laissant passer derrière nous du temps plutôt que des kilomètres, hypnotiques, caillouteux et rougeâtres.
Le ciel s'incline avec le jour, dans une glorieuse lumière déférente.
Visiter la palmeraie de Timkemkemet, les jardins, le village, c'est comme une évidence avec Mokhtar. Il a grandi là, c'est chez lui. Il s'avance dans les passages de sable entre les parois des jardinets, salue les voisins. Des champs de blé en herbe grands comme des draps de lit. Betteraves, carottes, navets, ombres, abris de palmes, mélopées tranquilles. Mokhtar rencontre une vieille femme aux bras cuivrés drapés de rose. Elle bavarde avec lui en riant. Il a vingt-sept ans, pour elle il est toujours un enfant de l'oasis.
Nous nous étonnons des eaux opulentes dans les cuvettes autour des troncs de palmiers. Les rigoles sont colmatées d'une couche d'argile qu'il faut aller chercher à l'oued, à plusieurs kilomètres. Ici, dans l'oasis, l'eau n'est qu'à six mètres de profondeur. Il n'a pas plu depuis deux ans. Et l'eau claire, abondante, stupéfiante, arrose chaque jour des jardins de verdure, les légumes, les hibiscus en fleur.
Quitter l'espace des jardins, c'est arracher une douceur. On continue vers le village, en pleine chaleur, et on découvre les habitations éparses. Une centaine de personnes vivent le long de la dune, en plein sable. Nul arbre ici. La lumière étourdit.
Les habitations sont construites d'éléments végétaux, des cabanes ternes qui arrondissent le dos, lâchées contre l'espace de la dune ocre : arcs de dattes, parois de fibres, portes de nervures tissées. A l'intérieur, des nattes, rien, et la lumière maîtrisée, dorée, marbrée d'ombre. L'air circule, miraculeusement rafraîchi.
Des petits enfants nous donnent la main sans parler, pour marcher en notre compagnie. Une fillette m'a adoptée : quatre ans peut-être, des tortillons en coiffure, une robe désuète dépenaillée, fermée par une épingle anglaise. Ses pieds flottent dans des savates en plastiques bien trop grandes. Elle louche et me regarde gravement, le nez bouché. Sa petite main est ronde, confiante, fidèle. Elle ne demande rien, juste n ma main pour marcher vers là où elle ne serait pas allée.
Mokhtar passe la tête dans la cahute-épicerie. Il est accueilli par deux jeunes femmes rieuses, d'une saine beauté, enveloppées dans leurs voiles légers. Elles sont heureuses de le voir lorsque ses circuits de guide l'amènent au village. Elles nous invitent à prendre le thé. L'épicière est assise au sol, actionnant une vieille machine à coudre à manivelle. Elle la pousse de côté, sort le brasero et le plateau de verres. Pendant que chauffe l'eau, elle nous prépare le zrig, la boisson de bienvenue : un grand bol de bois d'épineux noirci au feu et taillé, où elle verse du petit-lait de chèvre aigre sucré et de l'eau. Le bol passera de main en main, de lèvres en lèvres. Les camarades de Mokhtar arrivent les uns après les autres, chèches et boubous.,. et l'on se serre dans la pièce où quelques objets dépareillés et des produits sommaires sont en vente, trois sachets de riz, deux paires de tongs.
Une fillette aux tresses fines vient acheter quelques blocs de charbon de bois qui lui seront pesés sur une balance à main. On reste là assis, dans le courant d'air chaud entre les deux portes ouvertes sur l'éclaboussante luminosité. On ne voit que des sourires, des mains qui se serrent avec enthousiasme, une langueur conviviale.
La jeune épicière radieuse verse d'un verre dans l'autre, de haut jusqu'à ce qu'il mousse, le thé vert à la menthe sucrée. Le plateau passe avec les petits verres. J'écoute sur ma langue ce que dit le proverbe : « Le premier est amer comme la vie, le second doux comme l'amour, le troisième suave comme la mort ». Amer comme la vie lorsqu'elle n'est pas ce partage de paroles paisibles et sourires amicaux, doux comme l'amour quand il est celui des pas de Mokhtar dans une vie choisie. Suave comme la mort, eu l'on peut imaginer une mort suave si elle n'arrache rien mais permet de se couler dans l'infini.
On passera là un temps sans butoir, le temps d'être et de le savoir.
Sur le chemin du retour, on verra au loin, de l'autre côté de l'oued, les palmiers ensevelis presque jusqu'au faîte extrême, poignante verdure dans la dune qui finit d'avaler le premier Chinguetti. Le vent et le sable, tyrans impitoyables.
Marcher et lancer le regard vers les lointains, la houle hypnotique des dunes, les stratus si hauts. Marcher et se laisser bercer par la marche. Par la marche et les dunes. Par les dunes et l'espace.
Trois arbres isolés, des teïchett me dit Mokhtar. Il cueille parmi les épines, de petits fruits ovales. Il en ôte la coquille couleur d'ivoire.,. m'en propose un. J'ai longuement roulé ce toug entre mes dents pour racler sa pulpe de miel sauvage. Le noyau a accompagné ma salive dans la marche.
Reprendre la marche, reprendre la tension des tendons, la mobilité des chevilles. Monter et descendre les dunes, observer le peu, Beyod le dromadaire blanc qui arrache une bouchée de tiges tout en avançant et la malaxe à larges torsions de ses lèvres molles et musclées, créant un jus vert salivé.
J'ai vu Mokhtar allongé sur la crête d'une dune, tracer d'un doigt de danse nos prénoms dans la langue du sable. J'ai marché en baissant la tête, enveloppée de mon chèche bleu, pour me protéger de la luminosité hurlante. J'ai marché, le regard au plus loin, comme si j'attendais quelqu'un. J'ai marché seule dans le ciel vers l'horizon, et l'horizon s'éloignait. J'ai marché derrière Beyod, dans ses pas ronds et larges, des cœurs en colonne qui froissaient à peine le sable.
Chaque pas appelle le pas suivant ; les dunes se succèdent sans fin, sans interruption, toujours en mouvement, harmonieuses dans leurs courbes d'évidence. Toutes les dunes, neuves, repassées par le vent continu. Marcher seuls, dans ces dunes c'est comme être les premiers dans la neige vierge, un privilège, un luxe, une royauté.
(A suivre…)


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