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Retour sur l'autobiographie de Pierre et Claudine Chaulet *: L'Algérie, le doute et la perspective de l'Histoire
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 01 - 04 - 2012

Les frustrés d'une absence de débat public sur le cinquantenaire de l'indépendance nationale peuvent trouver dans l'autobiographie «à deux voix» que les époux Chaulet viennent de signer aux éditions Barzakh quelques points d'histoire et de mémoire pour soulager leur peine et revenir sur quelques séquences-clés du demi-siècle que l'Algérie vient de vivre.
Leur livre n'a sans doute pas d'autre prétention que celle de l'autobiographie. Il enserre en quelques chapitres ce qu'ils ont bien voulu partager de leur vie et de leur intimité. Mais, derrière le récit qu'ils font de leur existence propre et pendant laquelle, soixante ans durant, ils ont connu l'amour, l'engagement, la famille, l'amitié, la déception, l'effroi du fanatisme religieux, l'exil, l'interrogation, il y a le discours et le témoignage sur une séquence importante de l'histoire algérienne contemporaine.
Pierre et Claudine Chaulet, doit-on le rappeler, ne sont pas des Algériens ordinaires. Dès l'aube de la révolution, ils ont tous les deux milité dans les rangs du FLN historique au moment où d'autres Algériens, individuellement ou collectivement, attendaient de s'assurer du sens du vent. Très tôt, ils sont devenus ensemble, en 1955, des acteurs de la guerre et de la révolution anticoloniale, et restent, aujourd'hui, parmi ces observateurs clés qui ont été en contact direct avec certains de ses grands chefs.
Au parti jusqu'aux années 1980, du moins pour le docteur Chaulet, le couple, qui a siégé pendant plusieurs années en tant qu'élus à Alger, s'est ensuite mis, après 1962, au service du pays, Pierre en tant que médecin spécialiste de la lutte contre la tuberculose et cadre à la santé publique, Claudine à l'université et dans la recherche en sciences sociales.
Les événements et les anecdotes qu'ils narrent en commun ou dans un «je/tu» stupéfiant d'accord et de complicité ne sont, donc, pas uniquement des pièces biographiques. Par certains aspects, ils sont à verser au fonds de l'histoire et de la mémoire qui fondent depuis plus d'un demi-siècle l'imaginaire collectif algérien. Par d'autres, ils valent discussion et réflexion, en particulier sur la question des minorités ethniques, confessionnelles et politiques qui se sont engagées pour la libération de l'Algérie, et leur place dans l'imaginaire politique et social algérien.
Car, bien qu'occasionnellement célébrée, notamment depuis peu par une association dont il convient de décrypter l'action sur le terrain, Mechaâl Ech Chahid de Mohamed Abad qui a récemment rendu hommage peu avant son décès au militant communiste et moudjahid Georges Acampora, la contribution de ces groupes à la lutte de libération reste largement méconnue des générations actuelles.
Un demi-siècle après l'indépendance, leur histoire est presque oubliée. Son omission dès l'amont 1962 n'est pas uniquement le synonyme de l'échec d'une partie des Algériens qui rêvaient d'une société ouverte, juste, démocratique et sans complexe ni rejet vis-à-vis de ses minorités. Elle renseigne également sur les conséquences profondes qu'ont eues depuis cinquante ans sur l'histoire et la mémoire nationale les choix et les acteurs politiques qui se sont imposés à la fin du colonialisme français et pour lesquels, par conviction ou par calculs de pouvoir, être Algérien se limitait à l'arabité et l'islamité.
Deux vies, un livre
Mais revenons au texte des Chaulet. A la forme du livre, il ne s'agirait pas d'une autobiographie mais plutôt d'un assemblage épistolaire que ses auteurs ont commencé à rédiger en 2007.
Leurs souvenirs croisés ou entremêlés ont quelque chose de la conversation écrite. Ils commencent aux «origines» de l'un et de l'autre et finissent à la fin des années 2000. C'est-à-dire à l'âge de la retraite et d'un bilan où il n'y a ni commerce ni regret. Mais beaucoup de cette lucidité que tout Algérien un tant soit peu honnête peut avoir et s'apercevoir qu'en cinquante ans, bien de beaux rendez-vous ont été ratés.
500 pages, donc, pour se raconter à deux et par deux et au bout desquelles, outre l'enfance et la jeunesse, on saura que leur mariage en 1955 n'était pas qu'une union entre un homme et une femme. Mais un engagement à vie qui leur vaudra la peur, le risque, la prison pour Pierre à Serkadji (Barberousse), puis, pour faire vite, la rencontre clairement déterminante, le 21 septembre 1955, avec Abane Ramdane.
Claudine le décrit comme quelqu'un d'«un peu enveloppé, très sympathique et direct». «Après une longue conversation globale, se souvient-elle, il nous pose la question de confiance : «Est-ce que l'organisation peut compter sur nous ?» Nous répondons, ensemble, et séparément : «Oui».
L'approbation plongera le couple dans la fureur et la passion de la révolution. Dans son cours, il côtoiera des militants comme M'hamed Yazid, Salah Louanchi, Réda Malek qui travailla avec Pierre à la rédaction d'El Moudjahid, Mahfoud Kaddache, Frantz Fanon, bien sûr, Abdelhamid Mehri, Abdelmalek Temam, Krim Belkacem, Slimane Dehilès, Ouamrane. Il subira aussi sa part maudite et obscure faite de purges et de règlements de compte comme ceux dont sera victime Abane. A propos de son assassinat, Pierre écrit: «Nous avions pu le sauver des mains des parachutistes et lui épargner le sort de Larbi Ben M'hidi en janvier 1957, grâce au courage de Claudine. Nous ne pouvions rien faire, onze mois plus tard à Tunis, dans un pays frère, parmi ses frères».
Ce mot est ironiquement mis en italique ! Mais jusqu'à la fin de la guerre, le combat continue. Après l'indépendance, l'Algérie était libre et les Chaulet ont vécu «des heures exaltantes, en participant activement - douloureusement parfois - à la construction d'une Algérie nouvelle». S'ils admettent des «échecs personnels» parce que (…) les constructions qu'ils ont mises en place «ont été parfois détruites par la conjonction des ambitions et des intérêts hostiles», ils estiment que leur insuccès, celui de leur génération, est avant tout le résultat du «grand échec collectif lié au recul des mouvements porteurs de progrès social dans le monde»…
Leur propos, de gauche comme on dit, est indulgent. Il n'est, pour autant, d'aucune naïveté. Certaines descriptions qu'ils font des tourmentes algériennes sont, métaphoriquement, saisissantes. Il en est par exemple ainsi du récit que Claudine fait par exemple de la révolte d'octobre 1988. Dans ce passage digne de l'univers tragiquement loufoque de certains films d'Emir Kusturica, elle rapporte que «juste après avoir pris la route menant à El Harrach, nous tombons sur un barrage improvisé : quelques planches qui brûlent et une vingtaine de personnes qui montent la garde, dont un nain.
Ils sont étonnés de voir une femme au volant, inspectent d'un œil anxieux l'intérieur de la voiture, disent attendre une livraison de frigidaires». Tout y est dit ou presque. Mais les lecteurs du livre trouveront d'autres passages foudroyants sur la «décennie rouge», l'assassinat de Boudiaf, l'effroi du fanatisme religieux, les amitiés qui se dérobent dans l'infidélité et la compromission, l'effritement de la magnifique solidarité des années de la révolution…
Sur les années Bouteflika, qui ferment l'autobiographie, on apprend qu'au lieu de la concorde civile et de la réconciliation nationale, les Chaulet auraient souhaité une opération «vérité et justice» à l'exemple des Sud-Africains. «On peut comprendre, disent-ils, le désir de paix et d'oubli d'un passé horrible de la part d'une population traumatisée, mais l'étape de la reconnaissance des faits, celle de la reconnaissance des erreurs et des crimes, ne peuvent êtres escamotées si l'on veut assainir la vie sociale et rendre possible le vivre-ensemble.»
Le ton final est sévère mais jamais résigné. «Nous avions perdu une grande partie de nos repères», dit Claudine. Mais, «nous espérons que note histoire contribuera à aider les jeunes à se construire (…) à se forger de leur pays une vision moderne ouverte, celle des hommes et des femmes qui se sont lancés dans la lutte de libération, une vision débarrassée de tout simplisme ou manichéismes réducteurs». «L'essentiel, disent-ils, c'est de continuer à replacer le pays dans la perspective de l'Histoire». C'est le moins qu'on puisse espérer en cette période de doute et d'incertitude.
*Pierre & Claudine Chaulet
Le choix de l'Algérie Deux voix, une mémoire Préface de Réda Malek Editions Barzakh 2012, 900 dinars.


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