Au contraire, comme les compagnons du Proph?te, tel le Calife Omar Ibn El Khatab, et l?imam Abou Hamid El Ghazali, l?Emir soulignait que Coran et la sunna nous disent que les droits humains d?passent m?me les droits divins. La religion est venue pour l?humain, pour le lib?rer, le responsabiliser, le civiliser, l?humaniser et non point l?oppresser. L?Emir rappelait souvent ? ses compagnons que la derni?re sourate du Coran s?intitule Nass, les gens, les humains, l?humanit?, le dernier mot du mashaf le corpus est Nass, ce qui signifie que le Message a pour but de favoriser l?humanit? et vise l?humain. L?Emir pr?cise avec clart? : ? Le tort que l?on a pu faire aux lois d?origine religieuse est h?las provoqu? davantage par ceux qui veulent en assurer le triomphe par des moyens qui ne sont pas appropri?s que par ceux qui les combattent ? Il faisait allusion sans aucun doute aux extr?mismes de toutes les religions qui perdent de vue le projet spirituel lib?rateur, qui respecte avant tout la libert?, la conscience et la dignit? de l?autre. Pour l?auteur des Mawaquifs cela va de soi que la libert? est le fondement de l?existence, comme les grands penseurs il savait aussi que les libert?s sans limites ne sont pas la libert?. Il gardait en vue le fait que les droits de l?homme ont pour but de respecter la dignit? de l??tre humain, et non pas favoriser la domination d?un seul point de vue, et la perte de tout sens moral, ?thique, d?ontologique. L?id?e d?homme vertueux est au centre de son projet, pour former ? la fois un individu ?quilibr?, responsable et ouvert ? l??tre en commun. Car le vertueux est celui qui ne m?prise jamais personne et ma?trise ses passions. Pour le fondateur de l?Etat moderne alg?rien, savant et ma?tre soufi, les droits humains, doivent ?tres v?cus en coh?rence avec le droit des peuples. Ce sont des instruments li?s, indissociables, pour marquer sa diff?rence, son opposition face ? l?inacceptable, et fonder une r?sistance afin que la dignit? soit pr?serv?e et le vivre ensemble librement consenti. Le fait que la question des droits humains est la question fondamentale, pas seulement une question fondamentale r?sume donc la pens?e de l?Emir Abdelkader, inspir? par son incomparable foi, par son mod?le le Proph?te. L?Emir est notre mod?le, celui qui s?est inspir? de mani?re fid?le du mod?le par excellence, el Insan el kamil, l?homme total, universel, le Proph?te. Ce n?est pas par hasard que le premier commentaire d??El Mawaqifs, Le livre des Haltes? est le verset coranique sur le Proph?te comme exemple ? suivre. La vision et l??uvre d?Abdelkader tirent leur richesse ? la fois de la source spirituelle et des acquis de la raison humaine universelle. Sur le plan pratique, l?Emir Abdelkader les a prouv? et mis en ?uvre. Les ?minents conf?renciers ont bien d?montr? comment de mani?re exemplaire sur le plan humanitaire il a organis? et men? la r?sistance nationale durant 15 ans et comment il a trait?, entre autres, les prisonniers. Les historiens et les t?moignages, ? commencer par les soldats fran?ais eux-m?mes et les pr?tres chr?tiens, reconnaissent son caract?re magnanime sans faille. Sa politique humanitaire et sa culture de la paix en temps de guerre s?expriment d?s 1837 par un texte ?difiant sur la d?tention des prisonniers et il r?digea en 1843 un d?cret national sur les m?thodes de l?art de la guerre au sens humanitaire. Tout autant, m?rite d??tre connu m?dit? et enseign? comment en exil il s?est comport?, adonn? au dialogue et assum? la relation avec l?ennemi d?hier, ou l?autre diff?rent par la religion, la race ou la culture. Ses correspondances avec des personnalit?s du monde entier mettent pour la plupart l?accent sur l?importance de l??galit? des droits entre les humains et le besoin de fraterniser afin de fonder une nouvelle civilisation, qui fait d?faut. Au vu de cet h?ritage, nous pouvons avancer, en toute objectivit?, que l?Emir Abdelkader el Djazairi est ? la fois un des p?res fondateurs du droit humanitaire moderne, du dialogue des civilisations de notre temps et de l?essai de renaissance du monde arabe.
