Le dernier tome du Photographe est aussi captivant que les précédents. Lefèvre, Lemercier et Guibert ont su trouver le ton juste pour nous raconter l'Afghanistan des années 1980. Une odyssée poétique. Sur les traces d'un aventurier malgré lui. C'était le temps des moudjahidine contre l'Union soviétique en Afghanistan. Les premiers tentaient de faire sortir l'armée rouge de leur pays. En 1986, le reporter-photographe Didier Lefèvre accompagne une équipe de Médecins Sans Frontières (MSF) en Afghanistan. Après trois mois, très éprouvants aussi bien physiquement que moralement, il décide de rentrer seul, l'équipe qui l'accompagne décidant de rallonger le trajet retour. Son accompagnatrice le laisse repartir seul mais lui fait part de ses réserves. La région n'est pas très sûre pour tout le monde, encore plus pour les Occidentaux. Mais l'appel de Paris est plus fort que l'insécurité. C'est donc le retour vers le Pakistan. Les premiers jours sont légers, aériens. Les derniers beaucoup moins. Le voyage devient péripéties puis vire à l'odyssée. Avec bonheur. Le troisième et dernier tome du Photographe est un rare moment de bonheur. On a été agréablement surpris par les deux premiers tomes. Pour ce dernier album, on redoutait des répétitions fastidieuses, des ressassées commerciales. Il n'en est rien. Le troisième tome tient la distance. Il est aussi intéressant, poétique, humaniste que les premiers, sinon plus. Le mariage de la photographie et du dessin est des plus réussis. Déjà inaugurée lors des précédents albums, cette technique comporte beaucoup de risques. Lefèvre, Lemercier et Guibert ont su trouver le ton juste. Le dessin et la photographie se soutiennent à tour de rôle. L'histoire y gagne en profondeur. L'ascension solitaire d'une montagne illustre, on ne peut mieux, ce mariage réussi. On n'est pas déséquilibré par le changement photo/dessin. Emportés par la poésie, l'humour. Le photographe est un grand moment bédé. Ce nouveau genre, bande dessinée-reportage, dans la veine de Joe Sacco, est appelé à faire des émules tant il est captivant quand il est fait avec talent. Et Lefèvre, Lemercier et Guibert n'en manquent pas. Ils savent parler aux hommes, à leurs cœurs. Le Photographe, tome 3, Lefèvre, Lemercier et Guibert, Aire libre, Dupuis.