Motivation n La plupart des Algériens avaient pour seul objectif de découvrir d'autres pays et d'améliorer leurs connaissances. Leur devise était : «Les voyages forment la jeunesse»… Il était étudiant à la belle époque, quand les loisirs n'étaient pas un luxe ni la chasse gardée des nantis. Lyès, 45 ans, actuellement enseignant de langue française, se rappelle : «Le voyage, dans les années 1979-1985 était une mince affaire. La bourse suffisait pour acquérir un billet de bateau Alger-Marseille (aller et retour). Quant aux autres frais du séjour, nous les assurions par le biais de petits boulots…» «Le dinar avait de la valeur. 1 296 DA nous suffisaient pour visiter un pays outre-mer et nous permettaient de couvrir les dépenses pour une période de 20 jours.» Les formalités de voyage, raconte notre interlocuteur, «étaient très simples. Elles se faisaient en l'espace de quelques heures, d'autant plus que le visa n'était pas exigé.» Lyès reprend : «On ne demandait que le certificat de scolarité pour les étudiants, la carte militaire pour les autres. La période des vacances scolaires était synonyme de voyage. Notre devise était : “Les voyages forment la jeunesse''. Cela nous a, d'ailleurs, permis d'approfondir nos connaissances et de maîtriser des langues étrangères.» Les jeunes ne partaient pas du tout avec l'intention de s'installer à l'étranger. Pourtant, les occasions ne manquaient pas. «Lors de mon retour d'un déplacement Bayonne-Marseille, j'ai fait la connaissance d'une Brésilienne qui m'a demandé de rester avec elle. Elle était charmante, intellectuelle et riche, mais rien de cela ne m'a convaincu de rester car à l'époque, nous ne nous plaignions de rien chez nous», témoigne Lyès. Les jeunes étaient prêts à utiliser tous les moyens pour sortir. Pour sa part, une étudiante a, pour échapper au diktat de sa famille conservatrice, fait croire à ses parents qu'elle était en voyage linguistique alors qu'elle faisait partie d'un groupe d'étudiants (filles et garçons) qui voyageait en Espagne sans motif pédagogique. Profitant des simples formalités de voyage de l'époque, les Algériens, toutes couches sociales confondues, avaient l'opportunité de visiter les quatre coins du monde. L'époque des beaux jours du voyage est malheureusement révolue. «Aujourd'hui, en dépit de ma situation professionnelle qui est de loin supérieure à celle de l'étudiant que j'étais alors, je me retrouve dans l'incapacité de me permettre un petit voyage. Les charges de la famille, les factures de gaz, d'électricité, d'eau, la scolarité des enfants, etc., j'y fais face difficilement. Comment voulez-vous que je voyage ? Je suis un adepte des périples, mais ma situation financière me pénalise…», lâche un autre enseignant avec un profond soupir.