Si la Kabylie est connue pour son huile d'olive et son nombre impressionnant d'oliviers, que les incendies accidentels et criminels n'ont pu faire disparaître, la région de Maatkas, à quelque 25 kilomètres au sud du chef-lieu de la wilaya de Tizi Ouzou, est plutôt célèbre pour la qualité de son huile d'olive et le nombre important de ses huileries. D'ailleurs, quand les autorités de la wilaya cherchent à mettre en valeur la qualité de l'huile d'olive de la région, notamment en direction de visiteurs étrangers, c'est toujours Maatkas qui est choisie comme exemple. Et dans cette localité, le village d'At Zaïm occupe une bonne place dans la filière oléicole, particulièrement en ce qui concerne le nombre d'oléiculteurs et d'oléifacteurs. Sur les cinq huileries que compte ce village, trois sont la propriété de la famille Mahmoudi père et fils. Une huilerie familiale qui existe depuis l'occupation française. Saïd Mahmoudi, l'un des quatre fils, est en charge de l'huilerie traditionnelle. La plus ancienne des trois. Les deux autres, une semi-automatique et une autre électrique, ont été réalisées entre 2008 et 2009, l'ancienne huilerie ne pouvant plus faire face à la demande toujours croissante des oléiculteurs. Rachid, un villageois qui a établi le contact avec l'oléifacteur, ne tarit pas d'éloges sur le sérieux qui caractérise le travail des Mahmoudi. Au bout de quelques années d'existence, l'huilerie Mahmoudi accueille les olives de tous les villages de la commune et même de la commune voisine de Souk-El-Tenine. L'expérience et le sérieux ont fait la différence. Et cette sollicitation grandissante de la part des propriétaires d'oliviers a contraint les Mahmoudi à créer les deux nouvelles huileries. L'acquisition des deux nouvelles huileries n'était cependant pas sans conséquences. La récolte des olives connaissant l'alternance en matière d'abondance, les Mahmoudi sont contraints une année sur deux à mettre au moins une huilerie à l'arrêt. «L'année dernière, la récolte était très faible, nous étions obligés à fermer l'huilerie traditionnelle et à ne faire fonctionner que la moderne, pour des raisons économiques», déclare Saïd Mahmoudi, pour qui la rapidité de l'huilerie moderne, avec de surcroît moins de main-d'œuvre, fait baisser le prix de revient. Durant la campagne oléicole 2011-2012, l'huilerie Mahmoudi a fonctionné moins de deux semaines, et avec un seul ouvrier. La campagne en cours est bonne, dit-il encore, mais pas comme celle vécue en 2010-2011 qui a connu une récolte exceptionnelle. En effet, cela cadre parfaitement avec les chiffres de la direction des services agricoles (DSA) qui ont fixé les prévisions oléicoles à 400 000 quintaux d'olives pour la campagne 2012-2013, alors que les huileries de la wilaya n'ont eu, durant la campagne écoulée, que 180 000 quintaux à triturer. C'est donc une bonne récolte qui est attendue cette année, mais loin derrière celle de la campagne 2010-2011 qui avait enregistré un chiffre exceptionnel de 820 000 quintaux d'olives. Ce n'est donc pas cette année que le prix du litre d'huile d'olives va baisser, puisque les oléiculteurs et les oléifacteurs vont tenter de récupérer les énormes pertes subies l'année dernière. Et c'est sans surprise que le litre est proposé à six cents (600) dinars, que ce soit au niveau des huileries ou chez les particuliers. C'est ce prix d'ailleurs que l'huilerie Mahmoudi pratique à l'occasion de la campagne oléicole en cours. Selon Saïd Mahmoudi, c'est toujours le même procédé qui lie oléiculteur et oléifacteur. Le propriétaire des oliviers paie la trituration quand il a les moyens de payer à raison de six cents dinars le quintal d'olives, sinon l'oléifacteur prend 10 % du produit trituré en guise de rémunération. Cette seconde option est très intéressante financièrement pour les huileries, puisqu'un quintal d'olives produit entre 15 et 22 litres d'huile. Mais Saïd Mahmoudi ne se contente pas de triturer l'olive pour en faire de l'huile. Il s'occupe même du transport des olives vers son huilerie et de l'huile vers ses clients, y compris en faisant plusieurs kilomètres à bord de son pick-up pour rallier les villages les plus reculés de la commune de Maatkas et celle voisine de Souk-El-Tenine. Cette question de transport fait que Saïd Mahmoudi ne s'arrête jamais quand la récolte est abondante. Il est toujours en activité, au point où il n'a aucune idée sur la quantité d'olives triturées ou d'huile produite dans son huilerie. «Je n'ai même pas le temps de compter. Certains jours, il y a tellement d'olives qu'il faut vite transformer une quantité pour passer à une autre pour pouvoir s'en sortir», souligne notre interlocuteur, ajoutant que durant les saisons d'abondance il recrute jusqu'à six employés pour faire face à la demande, alors qu'il se contente d'un seul employé durant les saisons des vaches maigres. «Si les Mahmoudi continuent avec le sérieux et la qualité de leur travail, ils risquent d'être submergés par les oléiculteurs de plusieurs autres régions de la wilaya», conclut leur voisin Rachid, qui tient un petit local de gâteaux traditionnels dans le village.