Rattrapés par la justice, les ex-walis de Constantine sont en pleine tourmente. Après Noureddine Bedoui, c'est au tour de Abdelmalek Boudiaf d'être convoqué le week-end dernier par la brigade économique et financière de la police judiciaire de la wilaya de Constantine, pour répondre à des faits relatifs à la corruption et aux magouilles financières durant la période où il était wali. Bientôt, Hocine Ouadah sera également entendu dans le dossier de «Constantine, capitale de la culture arabe 2015». Ilhem Tir - Constantine (Le Soir) - L'enquête ouverte pour attribution de marchés douteux et de lots de terrain à des investisseurs fictifs durant la période 2010 à 2015 a conduit Noureddine Bedoui devant les enquêteurs constantinois. Son lourd dossier n'est pas clos, puisque plusieurs enquêtes ont été ouvertes en parallèle. L'ex-wali de Constantine de 2010 à 2013 a été interrogé sur la gestion des projets d'urbanisme lancés durant cette période et les différentes attributions d'assiettes foncières octroyées pour la réalisation de logements promotionnels, ainsi que des lots de terrain se situant au niveau de l'extension de la zone multiservice de la nouvelle ville Ali-Mendjeli. Si l'on considère uniquement cette zone, sur les 39 lots distribués, 2 projets uniquement ont été érigés dont l'un est entré en production (Pharmedest Sarl), et l'autre projet (Const Alliance) est finalisé à plus de 90% et souffre actuellement de la non-viabilisation de la zone. Les 37 autres supposés projets n'ont jamais vu le jour, et le comble est qu'au niveau de cette même zone, l'on trouve 5 boulangeries industrielles, «de quoi nourrir toute l'Afrique en pain !», ironise un investisseur. Le dossier du foncier industriel a ouvert la voie aux enquêteurs pour convoquer Abdelmalek Boudiaf, qui lui est cité dans plusieurs affaires impliquant également des promoteurs immobiliers, des députés et des sénateurs de l'ancienne et de l'actuelle législature, appartenant notamment au FLN et au RND, et des industriels pharmaceutiques. Abdelmalek Boudiaf, ministre de la Santé sous Bouteflika, très impliqué dans l'affaire du complément alimentaire «Rahmet rabbi», devrait s'expliquer sur de nombreux scandales de gestion en tant que ministre, mais aussi en tant que wali de Constantine. Il traîne notamment la lourde accusation du gaspillage de plus de 7 milliards de dinars. Les enquêtes avec Abdelmalek Boudiaf ont touché plusieurs dossiers qui ont provoqué une grande polémique aux niveaux local et national dans la ville des Ponts. Il s'agit de projets de rafistolage des façades des rues principales de la ville, en plus des 160 millions d'euros avec lesquels la grande salle de spectacles «Zenith», plus tard appelée «Ahmed Bey», a été achevée, un coût exagéré par rapport à des projets similaires construits dans d'autres pays. Parmi les dossiers ouverts, celui du pont géant, des défaillances constatées dans le projet du tramway, le palais des Expositions qui n'a pas vu le jour, le nouveau CHU de Ali-Mendjeli, un autre projet avorté, le «boulevard des cliniques» et les grosses connexions avec le monde de l'industrie pharmaceutique. Noureddine Bedoui et Abdelmalek Boudiaf ont été convoqués dans le cadre de cette affaire de corruption ouverte suite à un mandat judiciaire émis par le procureur de la Cour suprême. Quant à la manifestation «Constantine, capitale de la culture arabe», les ex-walis sont accusés dans des affaires de corruption présumée, dilapidation de deniers publics et passation de marchés en violation de la réglementation. Ces accusations apporteraient certainement de l'eau au moulin de nombreuses voix qui s'étaient élevées pour dénoncer «la gestion opaque» des projets initiés dans le cadre de la manifestation culturelle, dont le budget global qui lui avait été consacré est estimé à 700 milliards de DA. L'ex-wali Hocine Ouadah sera entendu également dans le cadre de ce dossier, lui qui a hérité d'une situation déjà catastrophique a dû gérer les passifs du cadeau empoisonné laissé par ses prédécesseurs. D'après nos sources, il sera convoqué en tant que témoin pour apporter ses éclaircissements. À noter que plusieurs parties ont été déjà entendues par les enquêteurs au sujet de ce dossier qui, si les accusations s'avèrent fondées, risque d'éclabousser pas mal de monde. I. T.