Le témoignage de Sami El Haj, journaliste soudanais de la chaîne Al Jazeera, sur les tortures qu'il a subi dans la prison de Guantanamo reste l'un des témoignages les plus édifiants. Le journaliste a été détenu pendant presque sept ans dans cette prison de terreur. «Comme les détenus étaient tous musulmans, l'administration du camp les soumettait à beaucoup de vexations et d'humiliations touchant la religion. J'ai vu de mes propres yeux des soldats déchirer le Coran et le jeter dans les toilettes. Ils s'assoient sur le Coran aussi longtemps que l'on ne répondait pas aux questions posées. Ils insultaient nos familles, notre religion. Ils faisaient semblant de téléphoner à notre Dieu pour lui demander, en se moquant de nous, de venir nous sauver», a-t-il déclaré dans une interview accordée à Silvia Cattori lors de son passage à Genève. «Ils nous rouaient de coups. Ils nous couvraient d'insultes racistes. Ils nous enfermaient dans des pièces froides, au-dessous de zéro, avec un seul repas froid par jour. Ils nous suspendaient par les mains. Ils nous empêchaient de dormir et, quand on s'assoupissait, ils nous frappaient sur la tête. Ils nous montraient des films illustrant des séances de tortures atroces. Ils nous montraient la photo de torturés décédés, tuméfiés, sanguinolents. Ils nous maintenaient sous la menace de nous transférer ailleurs pour nous torturer encore plus. Ils nous arrosaient d'eau froide. Ils nous forçaient à faire le salut militaire en écoutant l'hymne des Etats-Unis. Ils nous forçaient à porter des vêtements de femmes. Ils nous forçaient à regarder des photos érotiques. Ils nous menaçaient de viol. Ils nous mettaient nus, nous faisaient marcher comme des ânes, en nous demandant d'aller ici et là. Ils nous demandaient de nous asseoir et de nous mettre debout 500 fois de suite. Ils humiliaient les détenus en les enveloppant du drapeau états-unien et israélien, ce qui était une manière de dire que nous étions enfermés dans le cadre d'une guerre de religion», a-t-il indiqué. «Quand, couvert de poux, sale, le détenu est tiré de sa cellule pour être soumis à de nouvelles séances de tortures, pour le conduire à collaborer, il finit par dire n'importe quoi et ne plus savoir qui il est. J'ai subi plus de 200 interrogatoires sous la torture. 95% des questions concernaient Al Jazeera. Ils voulaient me faire accepter de travailler comme espion au sein d'Al Jazeera. En échange, ils m'offraient la nationalité états-unienne, pour moi et ma famille, et un salaire en fonction de mes résultats. J'ai refusé. Je leur répétais que mon métier est celui de journaliste, pas celui d'espion, et que j'avais le devoir de faire connaître la vérité et d'œuvrer pour que les droits de l'homme soient respectés», a-t-il affirmé. C'est l'un des personnages qui continue d'exiger la fermeture de cette prison et l'arrêt de ces tortures. Le messager de la paix s'est engagé à poursuivre son travail de journaliste et à défendre la cause juste pour les droits de l'homme et les libertés.