Le stratagème consiste à trouver une formule qui peut montrer que le peuple sahraoui bénéficie de l'accord UE-Maroc. Il consiste à modifier les accords avec le Maroc par le biais «d'une pirouette juridico-sémantique pour mentionner... que le Sahara occidental est sous supervision du Maroc», indique l'ambassadeur d'Algérie à Bruxelles. L'arrêt rendu par la Cour européenne de justice est-il resté lettre morte? Cela ne serait pas étonnant. L'UE, qui a en effet ignoré les référendums qui lui ont été défavorables, peut allègrement en faire de même avec la voix du peuple sahraoui qui aspire à son indépendance. La question mérite en tout cas d'être posée, eu égard à ses manigances qui tendent à tout prix de le contourner pour ne pas s'attirer les foudres du souverain marocain. Contrarié par la décision de la Cour de justice de l'UE (Cjue) qui avait annulé, le 10 décembre 2015 en première instance, l'accord agricole signé en 2012 entre son pays et les 28, le roi avait suspendu tout contact avec cette dernière. Depuis que les magistrats européens ont confirmé ce jugement de manière encore plus prononcée en soulignant que le Sahara occidental est un territoire séparé du royaume et que par conséquent l'accord agricole qui lie l'UE au Maroc ne peut lui être appliqué, les menaces se sont amplifiées. Une sévère mise en garde a été adressée à l'Union européenne le 16 février 2016. Rabat a appelé Bruxelles à mettre «pleinement» en oeuvre l'accord agricole entre les deux parties et a agité l'éventualité de lui tourner le dos. «Le Maroc et l'Union européenne sont liés par un accord agricole dont l'application est effective sur le territoire du royaume du Maroc, et ce, malgré un épisode judiciaire qui a, en toute logique, confirmé le protocole agricole entre le Maroc et l'Union européenne», avait affirmé le ministère marocain de l'Agriculture et de la Pêche tout en interpellant son partenaire. Un appel qui s'apparente à un ultimatum. «Ainsi, celui-ci doit désormais s'appliquer conformément à l'esprit qui a présidé à sa négociation et sa conclusion», souligne la même source qui a signifié à l'Union européenne son obligation d'assurer le cadre nécessaire pour l'application des dispositions de cet accord dans les meilleures conditions. Un avertissement à peine voilé saupoudré d'une bonne dose de chantage qui apparemment a été pris au sérieux. L'ambassadeur d'Algérie à Bruxelles, qui connaît le dossier sur le bout des doigts, nous en dit plus. «L'UE envisage de modifier les accords avec le Maroc pour mentionner de manière explicite et au détour d'une pirouette juridico-sémantique que le Sahara occidental est sous supervision du Maroc.» affirme Amar Belani dans une contribution parvenue à L'Expression. Le stratagème consiste à trouver une formule qui peut montrer que le peuple sahraoui bénéficie de l'accord UE-Maroc. L'arrêt rendu par la Cour européenne de justice, le 21 décembre 2016, souligne le contraire. «Or, en l'occurrence, il n'apparaît pas que ce peuple (sahraoui, Ndlr) a consenti à ce que l'accord soit appliqué au Sahara occidental», ont écrit les magistrats de la Cjue. Un casse-tête pour l'UE. «Sur la question du consentement de la population du Sahara occidental - autre casse-tête que la Cjue a posé comme préalable incontournable à la mise en conformité nécessaire des accords UE-Maroc avec le droit international -, l'UE est confrontée à la question délicate de savoir comment l'obtenir et surtout auprès de quel interlocuteur légitime», signale l'ancien porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Rabat pourrait venir à la rescousse. «L'activisme des officiels marocains sur cette question laisse présager un forcing accru pour imposer un collectif croupion constitué d'assemblées 'élues'' (sic) et d'ONG triées sur le volet...» a prévenu Amar Belani. Une intrigue qui décrédibilise l'UE et son deux poids, deux mesures pour résoudre les conflits à travers le monde.