L'industriel allemand Siemens a annoncé avant-hier soir qu'il déposerait une offre de rachat du pôle énergie d'Alstom au plus tard le 16 juin s'il était assuré que son examen bénéficie du même traitement que celle de l'américain General Electric, qui a la préférence du fleuron industriel français. Si ce processus garantit bien une égalité de traitement et un juste accès à l'information jusqu'au bout, alors Siemens présentera sa proposition le 16 juin au plus tard, a déclaré le président de Siemens France, Christophe de Maistre, lors d'une audition devant la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, nous préparons notre décision avec sérénité, sérieux et détermination en nous appuyant sur deux piliers: une vérification approfondie de la situation financière d'Alstom et une large concertation avec toutes les parties prenantes, de la direction du fabricant de TGV et de turbines électriques aux syndicats en passant par les clients et l'Etat, a-t-il ajouté. Il a rappelé que son groupe réalisait un examen approfondi des comptes d'Alstom depuis un peu moins de trois semaines. Siemens refuse la démarche du fait accompli, d'une offre présentée à la hussarde, a-t-il dit, en référence à l'offre de son rival GE, la seule sur la table actuellement, élaborée secrètement avec Alstom au grand mécontentement du gouvernement. Le conglomérat industriel américain avait décidé la semaine dernière de la prolonger de trois semaines le délai, jusqu'au 23 juin, pour convaincre le gouvernement français de la pertinence de son offre à 12,35 milliards d'euros, qui a déjà les faveurs d'Alstom. L'Etat a demandé aux prétendants davantage de garanties sur l'emploi et le devenir du pôle transport d'Alstom, qui se retrouverait seul en cas de cession du pôle énergie qui représente environ 70% du chiffre d'affaires total. Interrogé le 20 mai par les députés, le P-DG d'Alstom, Patrick Kron, avait garanti à Siemens un processus d'examen rigoureux, équitable et transparent de son dossier. Le groupe allemand, qui s'est invité fin avril dans les discussions avec le soutien de Paris et Berlin, a évalué les activités énergie d'Alstom entre 10,5 et 11 milliards d'euros et lui a proposé dans une offre préliminaire de lui apporter en plus ses activités ferroviaires. Nous sommes absolument persuadés que notre union ferait la force de nos deux entreprises et qu'ensemble nous construirions deux champions européens de taille mondiale, capables de faire durablement face à la concurrence, qu'elle vienne d'Amérique du Nord ou d'Asie, a déclaré M. de Maistre. Notre projet prendrait la forme d'une alliance entre Alstom et Siemens, a-t-il expliqué. C'est justement le type de mariage que l'exécutif entend favoriser, plutôt qu'une simple acquisition. Concrètement, cette alliance verrait Siemens acquérir, pour les faire croître, les activités énergie d'Alstom, à l'exception de celles que les pouvoirs publics jugeraient essentielles à la souveraineté énergétique de la France, notamment dans le nucléaire. Nous nous engagerions à conserver ces activités, car elles présenteraient toutes un intérêt, a-t-il souligné, insistant sur le fort ancrage de Siemens en France, où il compte 7 000 employés. En contrepartie, Siemens apporterait à Alstom toutes ses activités de matériel roulant, des trains à grande vitesse aux bus électriques, mais le groupe allemand reprendrait les lucratives activités de signalisation du français. Ce grand Alstom Transport serait détenu majoritairement par des capitaux français et son siège se trouverait en France, comme celui des activités de transmission, d'hydraulique et de turbines à vapeur, selon Christophe de Maistre. Siemens a assuré que son projet ne serait pas celui d'une restructuration défensive, garantissant l'emploi pour une durée de trois ans à compter de la clôture de la transaction.