Les entreprises, administrations et institutions algériennes se dotent massivement de système digital, mais ceci risque d'exposer leurs systèmes d'information aux cyberattaques. C'est dans ce domaine que l'expert algérien en cybersécurité Abdelaziz Derdouri est intervenu, jeudi dernier, dans l'émission «LSA direct» du Soir d'Algérie, afin de donner des éclairages sur la cybersécurité et la cybermenace. L'Algérie figure parmi les pays les moins développés néanmoins elle dispose des meilleurs informaticiens dans le monde. Abdelhalim Benyellès - Alger (Le Soir) - 3 ans après la fin de leur formation, 80% des ingénieurs informaticiens algériens partent à l'étranger. Au moment où un grand nombre de pays dans le monde enregistre un grand déficit, de l'ordre de 1 000 postes à pourvoir au Canada, fait savoir l'invité de «LSA direct» qui cite le cas du Canada qui enregistre 1 000 postes à pourvoir, d'un taux de 45% de manque dans beaucoup d'autres pays alors qu'aux Etats-Unis, le manque s'élève à 300 000 postes. C'est dans ce conteste qu'il lance un appel aux autorités pour la protection des informaticiens algériens confrontés à un grave problème d' « hémorragie ». « Un phénomène grave, dit-il, quoiqu'il ne soit pas aussi bien médiatisé que celui de l'exode des médecins algériens. « Les enjeux de la cybersécurité sont énormes et de ce fait nous sommes appelés à créer des pôles de recherche pour la protection des infrastructures sensibles contre les cyberattaques par nos propres moyens», fait-il savoir, s'adressant à l'Etat, dont, estime-t-il, la « cybersécurité est de son ressort exclusif » pour développer une stratégie politique basée sur la création des organismes qui veillent à la mise en œuvre de projets. « Ce qui n'est pas l'affaire des techniciens et des experts mais celle du gouvernement », tient-il à souligner. En réponse à une question de l'animateur de l'émission, Hakim Laâlam, sur l'élaboration de la carte Chifa confiée à un opérateur étranger, l'expert en cybersécurité considère que ceci « pose un problème de protection de données personnelles des citoyens ». « Il n'est pas normal de confier des données à des étrangers », dira-t-il, au moment où à l'étranger, les lois européennes de protection des données sont établies comme des mesures qui concernent les compagnies et organismes internationaux. Au sujet des dernières déclarations du porte-parole du gouvernement sur la « guerre électronique menée contre l'Algérie à partir de l'étranger », ce qui est perçu comme une agression électronique à enjeux économiques, Abdelaziz Derdouri considère que « nous assistons à une militarisation du cyberespace », citant les cyberarmes (logiciels) comme moyen pour recueillir des données secrètes dans une conjoncture de crise utilisées dans le but de faire pression sur des Etats, et dont l'Algérie ne fait pas exception, note-t-il. Dans le cadre de cette guerre électronique menée contre l'Algérie, il dira que la société israélienne NSO fournit des cyberarmes à certains pays arabes comme le Maroc et l'Arabie Saoudite pour agresser électroniquement l'Algérie. Et dans le même sens, il citera une autre compagnie italienne qui développe des outils d'écoute et d'intrusion livrés à un certain nombre de pays arabes pour récupérer des données sur les réseaux. Concernant l'interdiction de diffusion de certains journaux électroniques en Algérie, une mesure prise dernièrement par les autorités visant la réduction de l'impact sur l'accès à l'information de certains sites, l'expert en cybersécurité considère que « ce n'est pas une solution efficace dans le sens où il s'agit de mesures qu'on peut contourner ». Ajoutant que selon des études récentes d'accès au VPN pour contourner la censure, l'Algérie figure parmi les pays du monde les mieux placés dans la connexion aux serveurs pour l'accès aux sites interdits. Enfin, au sujet des « guerres futures d'affrontement informatique », l'invité de «LSA direct» considère que cela dépend de la vision des responsables algériens dans le domaine de l'exploitation de la « matière grise » nationale disponible. Abdelaziz Derdouri dira que « l'Etat peut investir dans le potentiel algérien pour participer à la politique de recherche et de développement d'outils de cybersécurité ». Il citera dans ce contexte l'exemple des Etats-Unis comme étant un Etat qui finance les universités pour former des experts en collaboration avec le ministère de la Défense », conclut-il. A. B.