Oran : lancement de la 24e édition du Championnat arabe d'athlétisme    Insécurité en France: les appels à la démission du ministre de l'Intérieur se multiplient    Explosion dans un port en Iran: Chaib signe le registre de condoléances    Le Forum diplomatique de solidarité avec le peuple sahraoui insiste sur l'exercice par les Sahraouis de leur droit à l'autodétermination    Glissement de terrain à Oran: le relogement des familles sinistrées sera programmé selon le rapport d'expertise du CTC    Le président de la République souligne sa volonté de poursuivre la consolidation des acquis réalisés dans le monde du travail    Assurances : l'Algérie abrite la 3e Conférence Arabe des Actuaires du 8 au 10 juillet    Journée internationale des travailleurs : poursuite des efforts de l'Etat pour consolider les acquis professionnels et sociaux des travailleurs    Le président de la République reçoit le ministre ghanéen des Affaires étrangères    ANP: Arrestation de six éléments de soutien aux groupes terroristes    Aïd El-Adha: arrivée au port de Ténès d'un navire chargé de plus de 12.000 têtes de moutons en provenance d'Espagne    Rebiga reçu à Hô Chi Minh -Ville par le Vice-Premier ministre vietnamien    CHAN 2025/Algérie-Gambie: poursuite du stage à Sidi Moussa avec l'intégration des joueurs du CSC    24e Championnat arabe d'athlétisme: l'Algérien Ameur Abdennour remporte la médaille d'or du 20 km marche en ouverture de la compétition à Oran    L'entrée de l'aide humanitaire à Ghaza, "une question non négociable"    L'Algérie franchit le cap des 2 millions d'abonnés FTTH et lance le Wi-Fi 7    Le championnat national de football se met à jour    L'Algérie clôture sa participation avec un total de 21 médailles    De Gustav Landauer à Hassan Nasrallah ou l'universalité de l'esprit de la société    Kiev doit céder les territoires conquis par la Russie    Le projet de loi présenté à l'APN    Ooredoo et l'Association nationale de volontariat organisent une opération de reboisement à Bou Saâda    Lorsque l'on a la bravoure en principe, il n'y a plus d'obstacle    Domination de la sphère informelle et écart croissant entre le cours du dinar sur le marché parallèle et celui du cours officiel : quelles solutions ?    Présentation à Alger des projets associatifs    Journées portes ouvertes sur les écoles et les instituts supérieurs dédiés à la Culture et à l'Art    Hommage à Alger à Kaddour M'Hamsadji, doyen des écrivains algériens    Le CS Constantine ne peut s'en vouloir qu'à lui-même    La DSP et les gestionnaires des EPH joignent leurs efforts pour une prise en charge des patients    Patriotisme et professionnalisme    Quelles est la situation de la balance commerciale et des exportations hors hydrocarbures en 2024 de l'Algérie ?    De Gustav Landauer à Hassan Nasrallah ou l'universalité de l'esprit de la société    Des prix « lignes rouges » et des représailles contre les contrevenants    Avant-première du documentaire ''Zinet Alger : Le bonheur'' de Mohamed Latrèche    Les renégats du Hirak de la discorde    Un site historique illustrant l'ingéniosité du fondateur de l'Etat algérien moderne    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



ATTITUDES
Tabou
Publié dans Le Soir d'Algérie le 14 - 03 - 2015


[email protected]
Rania rentre en pleurs à la maison. Sa maman, affolée, tente de comprendre pourquoi son enfant qui n'a pas encore onze ans sanglote.
- Quelqu'un t'a frappée ? Tu as eu une mauvaise note ?
Rania ne répond pas. La maman la rassure, lui caresse les cheveux, balaie de ses yeux son corps chétif et ne constate aucune anomalie, aucun signe d'agression.
- Rania ma chérie, tu peux tout dire à ta maman. Qui t'a mise dans cet état ?
Rania essuie ses larmes, baisse les yeux, et dit :
- Avant de sortir de l'école, je suis passée aux toilettes et j'ai vu du sang dans ma culotte. J'ai eu la peur de ma vie. Je ne l'ai dit à personne, même pas à Zineb, ma meilleure amie. Je suis sortie en courant.
Le visage de la maman passera par toutes les couleurs. A son tour, elle ne put prononcer une parole. Elle dira dans son for intérieur : «Mon Dieu, si jeune, je ne m'y attendais pas du tout, je pensais avoir un peu plus de temps pour la préparer.» Elle ne croyait pas si bien dire. Rania est une fille timide, réservée, très pudique, elle a une seule amie, Zineb.
Bûcheuse, son seul souci : décrocher la meilleure note. Et c'est ce qu'elle fait depuis qu'elle a franchi les portes de l'école pour la première fois. Fille unique, Rania a toujours eu peur de la foule.
De tempérament calme, elle préfère s'isoler pendant la récréation et éviter le chahut que font ses camarades. Elle a choisi Zineb, car elle lui ressemble quelque part. Le sang dans sa culotte, elle en avait entendu parler par accident lorsqu'elle avait surpris une conversation entre les élèves de deuxième année de son collège, mais elle n'en n'a pas saisi le sens, et elle était loin de se douter que ça pourrait lui arriver à elle aussi.
La maman, désemparée et surtout prise au dépourvu, ne sait pas par où commencer. Elle panique, cherche ses mots et culpabilise. «Rania est tellement fragile, elle a dû être épouvantée. Comment ça a pu m'échapper, j'aurais dû la préparer avant même qu'elle ne passe au collège. Mais elle est tellement jeune ! Cela me replonge plusieurs années en arrière. J'ai eu la même frayeur, on ne m'avait pas préparée moi aussi. Mais à notre époque, c'était tabou. On ne parlait pas de ces choses-là avec les petits. Et c'est quand ça arrive que l'on donne des explications très lapidaires. Je me souviens que je tremblais quand je l'ai annoncé à ma mère. Elle m'a dit tout de go : ‘‘Tu sais, tu es une femme maintenant. Et tu peux avoir des enfants, alors fais très attention.'' Elle m'a ensuite préparé une aasida (purée de semoule) à laquelle elle a ajouté de l'huile, puis elle m'a demandé de bien regarder la nappe d'huile, un rituel que sa mère, et avant elle sa grand-mère, pratiquaient quand leurs filles avaient leurs premières menstruations. ‘‘Comme ça tu n'auras pas d'acné'', m'a-t-elle expliqué. Aujourd'hui, je ne sais pas comment expliquer à Rania la métamorphose. Je ne sais pas non plus si je dois perpétuer le rituel. Mais je m'en veux de n'avoir pas épargné à ma fille le traumatisme qu'elle vient de subir, exactement comme ma mère ne l'a pas fait pour moi.
Je m'étais pourtant juré, moi, l'universitaire, la femme du XXIe siècle, de ne jamais reproduire la même faute avec mes enfants. Et je ne pouvais m'empêcher de penser au désarroi de toutes ces petites filles issues des régions de l'Algérie profonde. Rania ignorait tout de son corps, et pour elle, ces gouttes de sang qui coulent d'un «organe tabou» c'était la fin du monde. Les larmes aux yeux, je la serre dans mes bras, en me disant que mon bébé, l'insouciance, la naïveté personnifiée, est encore trop jeune pour être une femme.»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.