Le procès de l'affaire Sonatrach I a pris fin hier. Le verdict a été mis en délibéré pour mardi prochain. Au terme de ces cinq semaines d'audience, les prévenus auxquels le tribunal a demandé, comme à l'accoutumée, de dire un dernier mot, ont tous clamé leur innocence et sollicité l'acquittement. Hier, les plaidoiries des avocats de Belkacem Boumediene, ancien vice-président chargé de l'activité amont poursuivi dans l'affaire Sonatrach I pour l'organisation d'une association de malfaiteurs, passation de marchés en violation de la réglementation, abus de fonction, dilapidation de deniers publics, corruption et blanchiment d'argent, ont clôturé les débats dans le procès de l'affaire Sonatrach I. Ainsi, le tribunal criminel a mis le verdict en délibéré pour mardi 2 février prochain. Les deux avocats, qui ont plaidé avec beaucoup d'émotion, notamment Me Abdelhak Madani qui a vitupéré à n'en plus pouvoir continuer, amenant le juge Mohamed Regad à suspendre l'audience pour lui permettre de reprendre ses esprits, ont dénoncé une instruction à charge contre leur client. "Le magistrat instructeur s'est mis dans la tête que mon client était complice en procédant à des déductions. Il est ensuite allé chercher des déclarations et des faits qui peuvent prouver sa théorie. Il a voulu à tout prix l'inculper en menant une enquête à charge contre lui et en se basant sur des contrevérités. Aucun élément ne prouve son implication dans des faits délictueux. Pire, les documents, comme nous l'avons démontré tout au long de ce procès, contredisent ces déductions", s'est plaint Me Abdelhak Madani. Et d'ajouter : "Toute l'affaire se base sur une problématique éthique (les intérêts détenus par les enfants de Meziane dans une entreprise prestataire pour Sonatrach, ndlr), discutable d'ailleurs, et non pas sur des faits délictueux. Or, mon client a été mis en détention préventive juste parce que Mohamed Réda Djaâfar Al-Ismaïl a reconnu son visage lors de sa confrontation avec lui. C'est dramatique. Il n'a même pas posé de question à Al-Ismaïl pour savoir dans quelles conditions il l'a vu." Mohamed Meziane : "Je n'ai pas trahi !" L'avocat qui n'a pas manqué de louer les compétences de Belkacem Boumediene a aussi regretté l'emprisonnement de "cadres de sa trempe" pour des actes de gestion entrepris au grand jour, au vu et au su de leur tutelle. "Le magistrat instructeur a mis de côté les correspondances signées et qui constituent des preuves de son innocence et a préféré l'inculper sur la base de déclarations contradictoires faisant état de supposées instructions verbales. Et pour couronner le tout, il a refusé de recourir à une expertise pour évaluer un éventuel préjudice causé par Boumediene sous prétexte que l'Algérie ne dispose pas d'experts en la matière", a-t-il déploré. Belkacem Boumediene, auquel le juge a demandé de dire un dernier mot à la clôture du procès, a clamé son innocence, sollicité l'acquittement ainsi que sa réhabilitation, et ce, après avoir récité des versets de la sourate des Prophètes requérant la miséricorde du tribunal. Tous les autres prévenus, invités à dire un dernier mot, ont sollicité l'acquittement. Al-Ismaïl a déclaré qu'"il a servi le pays honnêtement et qu'il est prêt à le servir de nouveau", Mustapha Hassani a déclaré qu'"il n'a fait que son travail", Cheikh Mustapha a rappelé au juge que "sa suspension du travail depuis l'éclatement de l'affaire l'a ruiné", Bachir Faouzi Meziane a dit qu'"il n'a rien à voir avec cette affaire et qu'il été embarqué injustement", son frère Mohamed-Réda a prononcé deux mots pour demander l'acquittement, El-Hachemi Meghaoui a déclaré qu'"il a été de bonne foi tout au long de son parcours professionnel, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé", son fils Yazid-Lyes a estimé qu'"il est victime d'une injustice", Benamar Zenasni a dit qu'"il est innocent et loin de tout ce qu'on lui a reproché", Abdelouahab Abdelaziz a dit qu'"il a toujours servi le pays avec sincérité", Mohamed-Chawki Rahal a précisé qu'"il se trouve pour la première fois devant un tribunal", Mouloud Aït El-Hocine a "remercié le représentant du ministère public pour n'avoir rien requis à son encontre", Mohamed Senhadji a souligné qu'"il a exercé ses fonctions dans les limites de ses prérogatives". Ce dernier, qui parle mal l'arabe, a provoqué un rire dans la salle en commettant un lapsus : il a dit "massalihi (mes intérêts) au lieu de salahiati (mes prérogatives)". Nouria Miliani, a déploré de"n'avoir pas vu ses enfants, qui vivent en France, depuis sa mise sous contrôle judiciaire". "J'ai été touchée dans mon honneur alors que je n'ai fait qu'exercer ma profession et Sonatrach n'est qu'un client pour moi", a-t-elle ajouté. "C'est un examen de la part du Bon Dieu. Même les prophètes n'ont pas échappé à l'examen", a modéré le juge. Et à Nouria Miliani de répliquer : "Les prophètes sont des hommes, moi je suis une femme !". Encore des rires dans la salle. Mohamed Meziane, lui, a eu cette réplique : "J'ai travaillé pendant 43 ans dans le secteur de l'énergie dont 33 ans comme cadre supérieur. Je n'ai jamais commis une infraction. Je n'ai jamais trahi, ni mon pays ni Sonatrach. Je sollicite l'acquittement et aussi la réhabilitation." Lyas Hallas