Résumé de la 4e partie n Françoise Bruckenau dit n'avoir jamais voulu écrasé son amant avec sa voiture, mais que c'est lui qui s'est précipité sur sa Fiat 500... «Il est possible, monsieur le président, que j'aie eu un geste de désespoir. Mais je ne peux plus me rappeler si j'étais ou non en train de traverser la rue. — C'est une plaisanterie ! s'exclame le procureur. Si vous maintenez cette version, je fais accuser le témoin de tentative de coups et blessures contre la personne de Françoise Bruckenau.» Comme l'assistance le regarde ahurie, il s'explique rapidement sans un sourire : «Un homme normalement constitué qui se jette sur une Fiat 500, ce n'est pas pour mourir c'est pour la renverser, c'est évident.» Après quelques murmures, le président demande que l'on fasse entrer le premier témoin. Il s'agit de la mère d'Erni Schmidt : une femme inerte, sèche et froide comme un galet. D'après son témoignage, il ressort que l'accusée n'était pas tendre avec son amant. Elle le giflait lorsqu'il lui faisait des reproches. «Et vous lui faisiez souvent des reproches ? demande le président au jeune homme. — Oh ! non, monsieur le président, je ne lui en ai fait qu'une dizaine depuis, le début de l'année. — Si je compte bien... remarque le procureur, comme nous sommes en avril, ça fait tout de même un peu plus de deux gifles par mois.» Le second témoin est une brave bourgeoise très embarrassée d'être là. Elle confirme ce que tout le monde connaît, à savoir que dès le choc, l'accusée s'est arrêtée. «Rien ne prouve qu'elle se soit arrêtée volontairement, remarque le procureur, le corps d'un homme c'est plus qu'il n'en faut pour bloquer les roues d'une Fiat 500. — Peut-être... reconnaît le témoin. Mais elle s'est précipitée sur lui. — Pour l'achever ? demande le procureur. — Oh ! non, monsieur... Elle lui demandait s'il avait mal.» Le crâne du procureur est encore secoué d'un rire silencieux tandis qu'entre le troisième témoin. C'est un expert sérieux comme un pape. Il expose devant la Cour un rapport très technique et quasiment incompréhensible duquel il ressort une seule chose claire : Françoise n'a pas freiné avant l'accident. «Bien sûr puisqu'elle a été surprise !.., s'exclame la défense. — Bien sûr puisqu'elle voulait le tuer !» s'exclame le procureur. Et il demande à l'expert : «Est-ce que l'accusée a accéléré ? — Je n'ai aucun moyen technique de répondre à votre question. Mais les témoignages que j'ai pu recueillir semblent indiquer qu'elle n'a pas accéléré.» Après l'audition de différents autres témoins, il devient évident que le président, le public et probablement les jurés souhaitent une issue heureuse à ce procès. Manifestement, il leur répugne de séparer de nouveau et sans doute définitivement ces deux partenaires. En outre, après ce qui s'est passé dans ce ménage on peut comprendre que Françoise ait eu un mouvement de colère. Et tous semblent apprécier la volonté de cette frêle jeune femme et l'estiment capable de réaliser son projet de reprendre la vie en commun. La personnalité de Françoise est ainsi faite qu'elle a tendance à agir impulsivement, à réfléchir ensuite aux conséquences, quitte à en rester effarée. Et puis il y a leur enfant. Mais le problème est ardu, voire insoluble juridiquement car il ne fait aucun doute qu'elle a jeté sa voiture volontairement sur son amant. A suivre Pierre Bellemare