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La fille fatale
le Procès en appel de mme MAYA S'EST OUVERT HIER AU TRIBUNAL DE TIPASA
Publié dans Liberté le 27 - 12 - 2020

Le mystère de sa supposée filiation avec Bouteflika a fait d'elle une femme jouissant d'une influence considérable. Des ministres et des hauts cadres de l'Etat ne lui refusaient aucun privilège. Elle a tissé un maillage de liaisons qui lui ont permis d'amasser des biens incalculables.
Le procès en appel de Zoulikha Chafika Nachinache, connue sous le nom de Mme Maya, fille présumée du président déchu Abdelaziz Bouteflika, s'est ouvert, hier, à la cour de Tipasa.
La femme de 62 ans récuse d'emblée les accusations portées contre elle, en dédouanant, dans le même sillage, les anciens ministres, Mohamed Ghazi et Abdelghani Zaâlane, ainsi que l'ancien DGSN inculpés dans la même affaire. Elle affirme n'avoir jamais bénéficié de faveurs, n'avoir pas transféré illégalement des devises à l'étranger et n'avoir pas acquis frauduleusement des biens immobiliers dans le pays et à l'étranger. "Mon domicile a été perquisitionné sans aucune charge à mon encontre. On ne m'a pas notifié, par écrit, l'ISTN, ni la saisie de l'argent et des affaires récupérés chez moi. Madame la présidente, je suis en prison sur la foi ‘des on-dit' sans aucune preuve", a-t-elle contesté, d'emblée. La juge de siège reprend le contrôle des auditions : "Comment avez-vous eu les dix milliards de centimes trouvés chez vous (exactement 9,5 millions de dinars, ndlr) ?" La prévenue met en cause Omar Yahiaoui, un député à la retraite actuellement en cavale. "C'était mon voisin. Il a déposé l'argent chez moi, en mon absence, prétextant qu'il y avait du monde dans sa maison. Il l'a remis à mes filles dans des cartons scellés. Le lendemain, il a repris 5 millions de dinars. La police a saisi le reste avant qu'il le récupère", explique-t-elle. Sa fille aînée, Imène Benachi, corrobore : "Notre voisin a demandé de garder chez nous des cartons de petits-pois. Je lui ai fait confiance." Dans la villa n°142 de Moretti, 25 kg de bijoux en or, 270 000 euros et 30 000 dollars ont été également trouvés par les services de
sécurité.
Zoulikha Nachinache raconte avoir connu Mohamed Ghazi, lorsqu'elle envisageait d'investir dans un parc d'attractions dans la wilaya de Chlef, qu'il administrait au moment des faits. "Comment vous êtes-vous présentée à M. Ghazi ? Comme la fille présumée de l'ancien président de la République ou un membre de sa famille ?", demande le représentant du ministère public. "Je n'ai aucun lien de parenté avec l'ex-Président (Abdelaziz Bouteflika, ndlr). M. Ghazi m'attendait car on lui avait annoncé ma visite", répond-elle sans préciser, à l'audience, dans quelles circonstances se sont tissées des accointances avec l'ancien chef de l'Etat. Elle soutient, néanmoins, lors de l'interrogatoire des avocats de la défense, que son père a fait la guerre de Libération nationale aux côtés du défunt président Houari Boumediene.
"L'ancien président et mon grand-père étaient comme des frères", témoigne Imène Benachi, sa fille aînée. Selon l'un des avocats de la sexagénaire, Abdelaziz Bouteflika avait une affection particulière pour Mme Nachinache et ses filles. "Elles fréquentaient la famille Bouteflika. Des gens ont exploité cette relation", nous révèle-t-il.
La mère et ses filles aussi, à en croire les témoignages à charge. Au titre du projet de rénovation d'un parc d'attractions à Chlef, inscrit au nom d'Imène âgée à l'époque de 20 ans (2004), Zoulikha Nachinache a obtenu 15 hectares et un logement de l'OPGI. Elle a bénéficié ensuite, également à Chlef, d'une assiette foncière de 5 000 m2, au nom de son autre fille Farah, sur laquelle elle projetait de réaliser une station-service.
"Après deux ans d'attente, je n'ai pas obtenu les autorisations requises, je l'ai vendu à un milliard de centimes." Elle nie, en outre, avoir obtenu des avantages sur instigation de l'ancien DGSN, Abdelghani Hamel : garde rapprochée pour elle et ses filles, ainsi que le dressage de ses chiens par un agent de la brigade canine et installation de caméras de surveillance par des techniciens de la police nationale.
"C'est faux. Abdelghani Hamel est venu chez moi avec Mohamed Ghazi après le cambriolage de mon domicile. Il m'a orientée vers un opérateur dans les équipements de surveillance que j'ai payé. Il y avait juste une escorte pour ma fille Farah." Des éléments de la Sûreté nationale lui opposent une déposition contradictoire. Elle réfute avoir bénéficié des services d'agents d'entretien et d'un chauffeur, salariés au ministère du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, sous l'autorité de Mohamed Ghazi.
La villa de 42 milliards
"Je rémunérais les femmes de ménage 25 000 DA par mois chacune en sus des extras. Le chauffeur les transportait", soutient Zoulikha Nachinache. Elle ne donne pas d'explications cohérentes sur l'acquisition de six biens immobiliers et l'origine des provisions de ses comptes bancaires en Algérie et à l'étranger.
"Je n'ai pas utilisé de deniers publics. Je ne connais pas Abdelghani Zaâlane. Mohamed Ghazi n'est jamais intervenu en ma faveur dans un cadre illégal", clame-t-elle. Le procureur de la République l'accule avec un chiffre : 28 transactions immobilières que la prévenue a effectuées entre 2006 et 2016 alors qu'elle ne justifiait pas d'une fortune antérieure connue. "Je travaillais jour et nuit. Je n'ai jamais prétendu être quelqu'un d'influent", rejette-t-elle en bloc. Farah Benachi, 33 ans, se présente ensuite devant la présidente d'audience. "Pendant les faits, j'étais mineure. J'étais étudiante jusqu'en 2011.
J'ai travaillé à Sonatrach de 2016 à 2017. Depuis cette année, je n'ai eu aucune activité professionnelle et je n'ai contacté aucun crédit", se défend-elle. "Vous êtes propriétaire d'une villa à Ben Aknoun qui vaut 42 milliards de centimes, d'un chalet à Palma (en Espagne ndlr), d'un lot de terrain à Chlef revendu à un milliard de centimes, alors qu'il était incessible... et de comptes bancaires en Algérie et à l'étranger. Comment avez-vous acquis tous ces biens à votre âge et en ayant travaillé moins d'une année à Sonatrach ?", interroge la magistrate. "C'est maman qui procédait à ces transactions en mon nom. Quand elle me demandait de signer un document chez le notaire, je le faisais sans poser de questions", répond la jeune femme. Elle nie, autant que sa mère, avoir transféré de grosses sommes en devises à l'étranger à chaque voyage, grâce à des complicités au sein de la Police des frontières. Auditionnée sur des chefs d'inculpation identiques, sa sœur aînée, Imène, se contredit à maintes reprises.
"L'investissement dans un parc d'attractions a été fait en mon nom, car ma mère, malade, ne pouvait pas l'assurer."
À la même question du parquet, elle répond : "C'est maman qui gérait tout." Elle affirme que l'infrastructure, dont les droits de concession se limitaient à 100 000 DA par an, générait 3 milliards de centimes de profits pendant la même période.
"Le financement des biens immobiliers provenaient des recettes du parc d'attractions et des fonds propres à maman", avance-t-elle. "Cela ne justifie pas tous vos biens", rétorque la juge de siège.
À 15h, l'ancien wali de Chlef et ancien ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, Mohamed Ghazi, 71 ans, éprouvé par une santé précaire, est auditionné assis. Il est poursuivi pour abus de fonction et octroi d'indus privilèges à autrui.
"Mon seul tort est d'avoir exécuté les ordres du président de la République. Le SG de la Présidence (Mohamed Rougab cité dans l'affaire comme témoin, ndlr) m'a demandé de prendre en charge le projet d'un proche du chef de l'Etat (...) De 2004 à 2019, je pensais avoir affaire à la fille du Président. Ce n'est que durant mon interrogatoire par la Gendarmerie nationale que j'ai su la vérité", se confie-t-il. "Vous n'avez pas cherché à confirmer ce prétendu lien de parenté ?" demandent tour à tour la présidente de la chambre pénale et le parquet. "Je pensais que c'était un secret de famille à préserver", atteste-t-il. Et c'est en cette qualité que Mohamed Ghazi présentait, avoue-t-il, la dame aux hauts responsables auprès desquels, il intercédait en sa faveur, dont Abdelghani Zaâlane et Abdelghani Hamel, respectivement chef de l'exécutif de la wilaya d'Oran et DGSN au moment des faits.
Il s'embrouille, parfois, dans ses réponses : "Je ne me rappelle pas ; ce n'est pas moi qui ai supervisé ce dossier ; je ne savais pas que le terrain de 5 000 m2 avait été revendu..."
Il certifie, néanmoins, qu'il avait appelé une fois Abdelghani Zaâlane pour lui parler d'un projet d'investissement recommandé par Mme Nachinache dans sa ville.
Des intermédiaires, parmi lesquels Abdelghani Belaïd (condamné en première instance à 7 ans de prison), étaient chargés de baliser le terrain et de collecter les fonds (les fameux 9,5 millions de dinars d'Omar Yahiaoui). Belaïd et Miloud Benaïche ont sollicité une parcelle industrielle au wali d'Oran. Ils sortent bredouilles de cette entrevue préliminaire. Ils obtiennent, néanmoins, l'attribution d'un terrain dans une localité différente de celle souhaitée. Abdelghani Zaâlane souligne qu'il avait douté de l'affaire.
Il a appelé le frère conseiller de l'ancien président de la République, Saïd Bouteflika, pour s'informer sur la véritable histoire de Mme Maya.
C'est par l'entremise de cette délation que Zoulikha Nachinache est entendue, une première fois, par les services de sécurité, en 2017, sans être inquiétée, outre mesure, jusqu'à la chute de sa dynastie deux ans plus tard. Au moment où nous mettons sous presse, les auditions des accusés — il en restait six — et des témoins se poursuivaient. Les réquisitoires du parquet et les plaidoiries sont prévus pour ce lundi.

Souhila HAMMADI


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