La violence dans le milieu hospitalier est de retour. Le service des urgences de l'hôpital de Boudouaou, dans la wilaya de Boumerdès, a été, la semaine dernière, le théâtre d'un affrontement avec des sabres. Une personne blessée, évacuée vers ce service, a été agressée à l'arme blanche en présence de l'infirmier. Le personnel médical affirme faire face à ce genre de situations au quotidien. Pour le Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP), il ne s'agit pas d'un phénomène nouveau. De pareils cas sont signalés à travers le territoire national depuis 2012. Sauf que la situation s'est aggravée ces deux dernières années. Les médecins de garde travaillent dans un climat d'insécurité Le SNPSSP a recensé 2.700 cas d'agressions en huit mois seulement contre le personnel médical, notamment les médecins, a indiqué le président du syndicat, le docteur Lyès Merabet. « Nous avons au syndicat lancé une étude sur la violence dans le milieu hospitalier en 2015 et 2016. Nous avons enregistré 2.700 cas survenus la nuit au niveau des points de garde, à savoir les services des urgences. Tout le corps médical est exposé à ces agressions. Et même les patients ne sont pas épargnés », déplore-t-il. Notre interlocuteur précise que le syndicat a saisi, en 2012, Djamel Ould-Abbès, alors ministre de la Santé, pour prendre des dispositions préventives. « Nous avons revendiqué une intervention urgente et efficace avant qu'il ne soit trop tard », regrette-t-il. « Plusieurs mouvements de protestation ont été organisés afin d'alerter les pouvoirs publics, notamment la tutelle. Des rencontres ont eu lieu sur ce sujet, mais aucune mesure n'a été prise », a indiqué le responsable. A une question sur la formation des agents de sécurité des hôpitaux par la police pour faire face à ce genre de situations, le président du syndicat a soutenu que c'est une bonne démarche. Il indiquera que la Protection civile doit également former les agents de sécurité des hôpitaux pour intervenir dans les cas d'incendie et autres incidents. La formation constitue l'un des axes de cette démarche. « Il y a tout un travail à faire avec les agents de sécurité, notamment en matière de statut. Il faut savoir que le poste budgétaire de l'agent de sécurité n'existe pas dans la nomenclature des structures hospitalières. Ce sont des ouvriers affectés à l'accueil et à la prévention. Il faut d'abord sécuriser l'agent sur le plan professionnel », plaide-t-il, ajoutant que l'agent doit avoir un certain niveau pour une bonne gestion de la situation. Le Dr Lyès Merabet a proposé le recours aux sociétés de gardiennage et la mise en place de caméras de surveillance au niveau des hôpitaux. « C'est une mesure dissuasive. Le ministère de la Santé a autorité l'installation de ce système, mais les structures de santé n'ont pas les moyens de le faire », fait-il savoir. Le même responsable a appelé à la multiplication des patrouilles des services de sécurité, notamment la nuit, dans les points de garde. « Il faut mettre à la disposition des agents de sécurité des moyens, dont des lignes téléphoniques », soutient-il. L'administration ne joue pas son rôle De son côté, le président du Syndicat algérien des paramédicaux, Lounès Ghachi, a imputé cette situation à l'administration des hôpitaux qui « doit protéger son personnel, notamment les paramédicaux qui font l'objet de mena-ces et d'agressions physiques et verbales. Malheureusement, les victimes d'agressions portent plainte à titre individuel alors qu'elles ont été agressées à l'intérieur d'une structure médicale et l'administration ne poursuit jamais les auteurs. Et même les agents de sécurité n'interviennent pas promptement ou avec efficacité », déplore le président de la SAP. Des rapports ont été transmis mais « ils sont restés sans suite ». Parmi les cas recensés par le SAP, il y a l'agression d'un cadre paramédical, commise par l'accompagnateur d'une patiente. « La victime, enceinte, a eu un arrêt de travail de quinze jours », explique le SAP dans son rapport. Les précisions de la DGSN Des postes de police permanents sont implantés au niveau des centres hospitalo-universitaires (CHU) et les grands hôpitaux, a indiqué, hier, le chef de la cellule de communication auprès de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), le commissaire divisionnaire Amar Laroum. « Ces policiers sont chargés de la sécurité à l'intérieur de l'hôpital en coordination avec l'administration. En cas d'incident, ils font appel à des policiers en tenue et en civil », précise-t-il. L'officier supérieur a, toutefois, affirmé que la présence de la police a été renforcée, notamment au sein des structures implantées dans des quartiers populaires et des zones isolées. En outre, le commandement de la police a procédé à la formation des agents de sécurité dans les structures hospitalières dans le cadre d'une convention signée par le ministère de la Santé et la DGSN, pour mieux sécuriser les lieux. « Il en est de même pour le ministère de l'Education et la Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés. La police a lancé des sessions de formation de leurs agents chargés de la sécurité. Plusieurs conventions ont été signées avec des partenaires pour améliorer le savoir-faire des agents de prévention et de sécurité », a-t-il assuré. Disponibilité de la protection civile Une convention a été également signée par la Direction générale de la Protection civile (DGPC) et la Cnas pour la mise en œuvre d'un programme de formation en matière de sécurité des personnes et des biens en milieu de travail au profit de 2.224 agents de prévention et de sécurité relevant de la Cnas. La DGPC a exprimé sa disponibilité pour la formation des agents des hôpitaux. « Nous sommes prêts à organiser des sessions spéciales pour la formation de ces agents. Des officiers assurent les cours dans ces établissements. La Protection civile a encadré plusieurs formations au profit des agents de sécurité dans des grandes entreprises, à leur demande, notamment dans la sécurité des lieux et la maîtrise des risques », a expliqué le chargé de la communication de la PC, le lieutenant Nassim Bernaoui.