Le jeune homme aux immenses yeux sombres participait aux patrouilles du Mujao. Comme tous les suspects de « terrorisme », il devrait être présenté à un juge, à Bamako ou Sévaré (centre). En attendant, Ousmane rejoint la « cellule » d'un pas vacillant. « C'est une cellule de fortune », dit un peu gêné le colonel Maïga. A l'intérieur du réduit de moins de 4 m2, éclairé par une minuscule fenêtre à barreaux, huit hommes, jeunes pour la plupart, assis à même le sol. La chaleur est étouffante, l'odeur d'urine suffocante. Les prisonniers y sont enfermés depuis au « maximum trois, quatre jours », selon les gendarmes. Depuis son arrivée le 27 janvier à Gao, au lendemain de l'entrée dans la ville des forces françaises et maliennes, le colonel Maïga a fait déférer une trentaine de détenus: « C'est peu mais c'est que les autres sont morts! Il faut bien comprendre que ces gens ne viennent pas pour combattre et se replier. Ils viennent pour mourir ». Selon le témoignage d'Ousmane, de nombreux combattants du Mujao ont déserté le mouvement depuis qu'il a fui devant l'avancée des forces françaises et maliennes. «Il nous a dit que certains avaient été rattrapés et sont maintenant prisonniers du Mujao », précise l'adjudant Ibrahim. Un autre détenu nie avoir appartenu au Mujao. « J'ai jamais été Mujao! On m'a arrêté pour rien », hurle-t-il. Selon les gendarmes, l'homme était pourtant connu à Gao pour être le « petit » (proche collaborateur) de «Yoro », un des cadres du Mujao dans la ville. Dès son arrivée, le colonel Maïga a expliqué les « règles » à ses hommes. « A Bamako, j'étais formateur des officiers de police judiciaire ». « Dans cette gendarmerie, il n'y pas eu une seule exaction. Nous n'avons frappé, ni insulté personne. Nous faisons notre travail dans le respect des valeurs républicaines », dit-il. « Nous n'avons pas le droit aux exactions et nous sommes là aussi pour que les militaires n'en fassent pas », assure-t-il. Interrogé sur les accusations portées par des organisations de défense de droits de l'homme, le colonel Maïga affirme que « s'il y a des preuves », il n'hésitera pas à poursuivre des militaires. « Même après une rébellion, même après une situation insurrectionnelle, il faut respecter le droit! », martèle-t-il avec conviction.