L'objectif est d'accompagner le code d'investissement, riche en avantages accordés aux investisseurs, par des textes d'application permettant un accès rapide au foncier industriel. Des lors, il importe de ne pas confondre vitesse et précipitation et d'avoir à la fois des conditions permettant d'accroître les investissements, sans pour autant créer un climat de clientélisme, dans l'attribution du foncier industriel. À ce titre, nous allons voir les dispositions du projet de loi fixant les conditions d'accès au foncier, pour émettre quelques recommandations et ne pas retomber dans les erreurs du passé. Dispositions du projet de loi Présenter un projet de loi sur le foncier industriel qui reprend les mêmes dispositions d'un système qui a montré ses limites ne peut qu'aboutir au même désastre. Le foncier qui a profité aux spéculateurs a fait perdre à l'Etat des années de développement du fait des procédures pour récupérer les parcelles indument attribuées. Le système du calpiref et celui de l'aniref ont montré leurs limites. Dernièrement, il a été décidé de confier à l'Agence Algérienne de Promotion de l'Investissement (Aapi), à travers la plateforme le soin d'attribuer le foncier, puis dans le projet de loi, comme si on était avide de bureaucratie, il a été décidé de constituer une commission regroupant les représentants des différentes structures. Cette démarche risque d'aboutir à des pratiques malsaines et au clientélisme tant décrié par les pouvoirs publics et les investisseurs en même temps. Les opérateurs qui souhaitent bénéficier d'un terrain en concession devront aller investir dans les communes à promouvoir. Quant aux rares parcelles restantes dans les grandes villes, elles devront être confiées à l'Aapi qui les mettra en location aux investisseurs, en reversant le produit aux collectivités locales ou Domaines avec une commission pour l'Aapi couvrant ses frais de gestion du parc et de mise en relation. Pour l'idée de recenser les biens des entreprises publiques non exploités et les mettre sur le marché, cela devra se faire en rémunérant ces entreprises ou en leur confiant le montant correspondant pour qu'elles puissent se relancer et non pas leur retirer les actifs sans compensation. Ce qui nous renverrait à l'ère socialiste et ses dégâts sur l'économie. Par ailleurs, le texte qui prévoit la concession donne la possibilité d'hypothéquer le terrain or comment peut- on hypothéquer ce qui ne nous appartient pas? À ce titre, beaucoup de banques ont commencé à refuser l'enregistrement de l'hypothèque car il s'agit d'un terrain en concession et non en propriété. Il est possible aussi de permettre aux investisseurs à travers le système bancaire, qui va s'étoffer avec la CNL comme banque, d'acquérir des terrains au prix du marché, avec un crédit à long terme, de constituer des sociétés civiles immobilières propriétaires du terrain et qui vont louer ce dernier à l'entreprise d'exploitation. Par ailleurs, l Aapi devra être soucieuse du nombre d'emplois créés réellement dans l'attribution des terrains, sachant que l'Etat accorde beaucoup d'avantages, notamment les franchises de taxes et les exonérations d'impôts qui sont un manque à gagner pour le Trésor public. La feuille de route du Président: Le président de la République n'a cessé, dès son élection, d'accorder toute l'attention pour gagner la bataille de l'emploi et relancer l'investissement sous toutes ses formes. En continuant d'agir en «bon père de famille», le Président est seul capable de sauver le foncier industriel, en réorientant la politique de l'Etat et en engageant la création de nouvelles industries dans les zones d'ombre qui nécessitent un bon coup de développement économique, d'autant plus qu'elles ont bénéficié d'efforts considérables de l'Etat, en matière d'infrastructures et leur population ne demande qu'à travailler et participer à l'essor du pays. Le patriotisme économique Il est bon de rappeler la fameuse phrase de J.F.Kennedy «Ne vous demandez pas ce que le pays peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour votre pays». Outre cette citation mythique, la mère des Kennedy's disait à ses enfants: «À ceux qui ont beaucoup citation, il sera beaucoup demandé». C'est dire le poids qui pèse sur les investisseurs pour rendre à notre cher pays tout ce qu'il nous a donné. À ce titre, nous avons de qui tenir puisque les exemples sont légion et Mustapha Ben Boulaïd a été parmi ces innombrables exemples puisqu' il a vendu ses bus pour l'Algérie alors que d' autres ont voulu vendre l'Algérie pour des bus. Gageons que les pouvoirs publics vont prendre conscience de la nécessité de préserver le foncier et de l'utiliser à bon escient et non comme une matière à la merci des spéculateurs. Les pôles économiques Dans la stratégie de relance des investissements, il faudra privilégier les pôles économiques par régions et faire des hubs qui regroupent des activités selon la spécificité géographique, les installations déjà existantes et une politique prospective. Le colonisateur a voulu nous déstabiliser par le processus de régionalisation. Il nous appartient d'en faire une force économique. Il importe d'encourager les villes de Béjaïa, de Tizi Ouzou ou Bouira à s'investir dans l'agroalimentaire, l'hôtellerie ou la construction tant leurs atouts sont indéniables dans ces domaines. Nous pourrions créer les plus grandes écoles de commerce à Ghardaïa ou à El Oued, en renforçant et en encadrant l'activité commerciale à El Eulma et Tadjenant, tant leur expérience dans les échanges commerciaux se rapproche des places commerciales de Dubaï et Shangaï. Nous devons renforcer l'agriculture, l'élevage dans les Hauts-Plateaux et dans les domaines où ils excellent. Nous devons aider les villes du Sud à être d'excellents viviers pour ingénieurs et techniciens pétroliers mais aussi pour les nouvelles énergies. Nous devons hisser Sétif et Bordj Bou Arréridj à être des pôles d'excellence pour les activités d'électronique, informatique en créant une sorte de Slicone Valley où peuvent émerger les start-up qui fournissent les nouvelles technologies aux entreprises. Nous devons prévoir une taxe de 1% à 3% pour une grande partie des entreprises pour la recherche et développement. Quant à la population carcérale, il faudra envisager son affectation dans les projets d'infrastructures en affectant les jeunes à des travaux de viabilisation ou dans le désert avec un salaire dont une partie serait confiée au prisonnier et la partie restante bloquée pour une réinsertion future, d'autant plus que les bonnes conditions carcérales ont banalisé la prison. Les ajustements nécessaires En fiscalité, la création d'une redevance suppose un service rendu par l'administration et en 2007, une redevance a été créée lors des différentes demandes faites auprès de l'Andi devenue Aapi. Par contre, au nom de l'universalité, cette redevance est versée au Trésor public et ne profite aucunement à l Aapi de façon directe. Ce qui empêche cette institution névralgique de se développer et d'accomplir de bonnes actions sur le plan national et international pour relancer l'investissement. Il serait judicieux de prévoir une quote-part ou le produit total de ces redevances à l Aapi pour qu'elle puisse se développer et constituer un excellent ambassadeur des potentialités de ce pays en termes d'investissements. Par ailleurs, le guichet unique qui se retrouve en situation pléthorique, sans aucun intérêt particulier sachant que la plateforme permet de faire les demandes auprès des différentes administrations et la configuration actuelle du guichet unique n'est pas intéressante, car les représentants des différentes administrations ne peuvent rien apporter de significatif, puisque les diverses démarches nécessitent souvent l'examen des demandes en commission, comme le permis de construire ou le registre du commerce qui nécessite le déplacement devant l'administration concernée. De ce fait, la configuration idoine du guichet unique devrait remplacer les représentants des administrations par des conseillers à l'investissement en charge d'un portefeuille d'investisseurs, avec des relais dans toutes les administrations, pour fluidifier le travail, orienter l'investisseur et jouer le rôle de facilitateur. Dans un autre registre, il faut agir sur plusieurs fronts, en permettant à l'Etat de relancer l'investissement en Algérie, d'identifier les potentialités d'investissements à l'étranger et d'adapter l'arsenal juridique, pour permettre l'investissement public et privé à l'étranger. On peut aisément prévoir la transformation du Fonds National d'Investissement en Fonds Algérien d'Investissement. Cet organisme ayant déjà à son actif un portefeuille d'investissements pourrait servir de fonds souverain et il serait alimenté chaque année avec une partie des réserves de change, au lieu de les placer en bons du Trésor américain peu rentables. La volonté d'adhérer aux BRICS pourrait se faire en étant en position de force tant, il est clair que nous disposons d'une proximité historique avec les membres de ce nouvel ordre mondial en plus de nos réserves de change, permettant même de placer une partie dans la future banque des BRICS. Nous avons raté dans un récent passé, la possibilité de faire de notre pays une nation à l'abri du besoin et de la volatilité des prix du pétrole. Il nous appartient en notre âme et conscience et au nom de tous les sacrifices consentis par nos ancêtres, de bien prendre ce virage comme le dit le proverbe sioux; «Nous n'héritons par la terre de nos ancêtres, nous l'empruntons à nos enfants». Méditons et agissons tant qu'il est possible. *Diplômé de l'ENA d'Alger et de la faculté de droit d'Aix en Provence. Fateh Merouane IBBOU