Nous sommes revenus aux plus belles années du PAP, comprendre programme anti-pénuries des années 80. La décision du ministère du Commerce d'autoriser l'importation de quelque 10.000 tonnes de viande ovine en prévision du prochain mois de ramadhan sonne comme un air de déjà vu. Celui de la fin des années 80, où le gouvernement de l'époque, grâce à de bonnes rentrées pétrolières, avait mis en place le fameux PAP. Presque vingt ans après, nous retombons dans la même configuration, celle de la pénurie et de la hausse des prix des produits agricoles, annonciatrice de l'imminence du mois sacré. Non, en vérité, la décision cette fois-ci du ministère du Commerce est orientée vers la lutte contre la spéculation qui fait feu de tout bois durant le mois de ramadhan parmi les professionnels de la filière des viandes rouges et blanches. Sauf que l'importation massive de viandes, comme les autres produits de large consommation, donne un sérieux coup de pied à tous les discours sur le développement local, l'encouragement à la production locale et à la limitation de la facture des importations. Ce n'est pas normal, pire c'est antiéconomique de procéder à l'aveuglette, sans décision réfléchie, à un programme d'importation de plusieurs centaines de millions de dollars de viandes rouges pour lutter seulement contre la spéculation et la hausse des prix. Comme si les Algériens n'ont qu'un mois devant eux pour manger de la viande pas chère, consommer une quantité infinie de fibres animales durant un mois censé être celui de l'abstinence. A moins que l'on ne veuille cacher un problème par d'autres, il est patent que l'économie nationale n'arrive pas à trouver ses équilibres : ceux d'une croissance soutenue, d'une inflation maîtrisée, la bonne santé des principaux indicateurs macroéconomiques, notamment une production agricole et industrielle orientée vers l'exportation, vers les grands marchés internationaux. Nous n'en sommes pas là, et le gouvernement, au lieu de donner un coup de fouet aux investissements créateurs de richesses, de plus-values économiques, de nature à résorber le chômage et améliorer les salaires des travailleurs, procède par une logique rentière en mettant sur le marché des produits fabriqués ailleurs. C'est également suicidaire puisque, au moment où la lutte est menée pour réduire la facture des importations, on décide de mettre un trait sur cette stratégie, l'espace d'un mois de ramadhan qui a bon dos. Et puisqu'on est dans cette configuration de soutenir les prix des produits largement consommés au mois de ramadhan, pourquoi ne pas agir dès maintenant pour que le sucre n'atteigne pas des sommets ? Les exemples de cette dérive peuvent être imaginés à l'infini. Et puis, quand un programme massif d'importation a-t-il résolu les problèmes de la faiblesse de la production nationale, tous produits confondus ? Jamais, n'est-ce pas ? Alors, quelle lecture va-t-on donner cette fois-ci, au moment où les prix des viandes jouent au yo-yo, au programme projeté par le ministère du Commerce ? Non, la priorité du moment est de rassurer le citoyen sur les réelles potentialités nationales de production de produits agricoles, à des prix défalqués de l'inflation importée ou artificielle. !
